Le blues d’Amin Khan se décline de plusieurs façons. Et comme tout blues, il prend sa source dans un pays, dans un amour, qu’il n’a pas besoin de nommer, par pudeur peut-être, par mélancolie certainement. D’une voix très douce il dit des textes courts (Arabian blues) ou ce qu’il présente comme un texte long (Archipel Cobalt), sur lequel je m’arrête un peu.
La forme semble évidente : aux « il y a », exprimant une sorte de permanence du courant, succèdent des « et puis soudain », rompant avec le flot. L’auteur se laisse porter par un rythme comme pour nous perdre dans un chant d’amour interrompu, comme on se perd dans la mémoire, dans l’ombre du sang, du temps, dans le silence noir, qui alourdit les paupières, ou rouge, comme « la soie rouge de son cœur », ou bleu, mais de quel bleu ? Un bleu cobalt, un bleu de patience, un bleu « des flammes d’un feu ancien »… Ce texte qui attend sa musique, n’est-il pas un autoportrait où la lenteur revendiquée est ponctuée d’éclats, de sanglots, de frissons ? Entendez comme coïncident les débuts de ces mots, Archipel Cobalt, et du nom du poète, Amin Khan, dans la langue française qui porte son écriture ?