Non pas que je ne me préoccupe pas de ma santé, mais j’avais la réplique qui mettait un terme à tout débat éventuel : « mourir de ça ou de d’autre chose… ».
En ce qui me concerne, les raisons qui m’ont fait arrêter de fumer sont superficielles, parfois idiotes, je l’admets, mais elles ont été efficaces.
Tout d’abord, je suis coquette de nature. Une vraie fille, qui aime se mettre des crèmes, des masques, du maquillage… Et je suis certaine de ne pas être la seule à avoir remarqué que quand on fume, on ne se maquille pas. Non, on fait de la peinture. Parce que le tabac rend le teint terne, les lèvres gercées, les yeux éteints et cernés. Je passe sur les doigts et les dents jaunes, l’haleine fétide.
Arrêter de fumer a été pour moi une révélation. Quand on enlève le masque de nicotine, j’ai retrouvé la vraie fonction du fond de teint. J’ai retrouvé la joie de voir mon rouge à lèvres tenir plus de 10 minutes.
Mais il n’y a pas que le physique. Fumer amène à des attitudes totalement ridicules. Mais obnubilée par le manque, je ne m’en rendais pas compte.
Sortir quand il pleut pour m’en griller une, grelottante, ne profitant même pas de la cigarette car il faisait trop froid. Je l’ai fait. Et au moment de rentrer, frigorifiée pour me précipiter vers le radiateur le plus proche, je devais affronter la sempiternelle remarque du collègue/ami/parent/mari non fumeur : « si t’as froid, t’avais qu’à pas sortir ». A présent, fièrement, je peux me venger en guettant le fumeur désespéré et lui sortir la même phrase avec le même regard d’ahuri.
Fumer en voiture, c’est la classe. Tout du moins, je le croyais.
Car non, ce n’est pas classe du tout. Tout d’abord, allumer une cigarette est dangereux. Que celle qui n’a jamais quitté la route des yeux pour chercher son briquet caché au fond du sac ou tenter de récupérer la cigarette tombée entre les jambes, juste sous l’accélérateur, me jette la première pierre.
Je recrachais nonchalamment ma fumée sur le pare-brise dégoutant de ma voiture, tout aussi dégoutante avec les paquets vides lancés un peu partout au grès des différents périples et la poussière que j’attribuais à tout, mais pas à la cigarette bien sûr.
Je me souviens d’une situation particulièrement humiliante qu’il m’est arrivée en voiture. Je suis en ville, au volant, le printemps est beau, je crâne, fière et forte. Je m’arrête à un feu rouge, tourne la tête et remarque à une terrasse une table avec des jeunes hommes plutôt mignons. Ils me sourient, je leur souris, tête haute. Le feu passe au vert, au même moment, une petite voix dans ma tête me signale que la cigarette est terminée et qu’il serait bien de la jeter par la fenêtre. Devant cette table de futurs maris potentiels. Mais j’avais oublié que l’addition vent + vitesse + clope par la fenêtre = retour de mégot dans la tête. J’ai ravalé ma fierté et fais une croix sur mon futur mariage, tout en nettoyant la trace de cendre sur mes lunettes.
En étant fumeuse, j’ai déjà fait tomber ma cendre sur une table, ai tenté de la ramasser, me suis brûlée les doigts (oui parce que la cendre, c’est chaud), ne me suis pas rendu compte que mes doigts étaient noirs et me suis gratté le nez…
J’ai déjà fait cramer une fringue, ou alors un rideau… En fait, je crois que c’était les deux.
J’ai déjà eu, dans des moments importants, la voix qui s’est mise à faire des sons étranges, à la limite du paranormal, me faisant douter pendant un court instant de mon genre.
Enfin, le souvenir de la lèvre brûlée par la cigarette restée trop longtemps dans ma bouche en attendant de trouver un briquet me rappelle simplement que ces petites choses, au final, ajoutées à la perspective de préserver ma santé et mon compte en banque, me rendent vraiment heureuse d’avoir aujourd’hui arrêté la cigarette.