Lecture commune avec Canel.
J’ai découvert Chevy Stevens avec Séquestrée, que j’avais beaucoup aimé et dont j’avais trouvé la narration assez originale, alternant le récit de l’aventure en elle-même et la narration que Annie, l’héroïne de l’histoire, en faisait ensuite à sa psy, une fois échappée de son abominable aventure.
Il est cependant bien dommage que l’auteur utilise ici la même ficelle, ce qui m’a d’emblée un peu déçue. Au cours de ses séances chez le psy, Sara Gallagher raconte sa vie et tous les évènements qui la jalonnent, et vous vous en doutez, ils sont nombreux ! Les 24 chapitres de ce roman correspondent donc aux 24 séances chez sa psy, la discrète Nadine qui semble suivre la jeune femme depuis un certain temps, et dont on ne sait quasiment rien sauf dans les derniers chapitres.
Sara a été adoptée et à l’heure où son mariage avec Evan est programmé, elle ressent le besoin de rechercher ses origines et de retrouver peut-être ses vrais parents, un besoin exacerbé parce qu’elle est déjà maman d’une petite Ally de 6 ans, et parce que ses parents adoptifs et notamment son père, n’a jamais réussi à lui montrer ni amour ni reconnaissance, un regard bien différent que celui qu’il a toujours posé sur les deux filles naturelles que le couple a eues par la suite. La mère quant à elle était aimante, mais souvent malade et alitée, et sinon de toute façon plutôt soumise à son époux.
Bref, Sara décide d’entreprendre des recherches et engage un détective privé qui découvre assez rapidement qui est sa mère naturelle, qu’elle va visiter à l’improviste. Je ne sais pas où en sont les lois françaises sur les recherches de parents, mais j’imagine mal devoir ouvrir la porte à une adulte inconnue qui affirmerait qu’elle est ma fille, d’autant plus si j’ai abandonné le bébé à sa naissance… La femme est question est donc plutôt froide, et ne veut pas entendre parler de Sara, refusant de lui indiquer qui est son père. Mais Sara est têtue (c’est le moins qu’on puisse dire, c’est une vraie tête de mule) et continue de chercher avec les maigres indices déjà découverts. Et là, patatras ! Il semblerait qu’elle soit la fille du fameux tueur des campings, un serial killer qui sévit depuis 26 ans, et qui aurait violé sa mère naturelle quand elle était toute jeune, qui fut la seule de ses victimes à en réchapper. Pas d’bol, comme paternité à assumer, on peut faire mieux, et l’héritage risque d’être lourd à porter…
Et encore moins de chance, quelqu’un vend la mèche et l’info se retrouve sur le net, mettant moins de temps qu’il en faut pour le dire pour se propager de pages en sites… avant de venir aux oreilles du vilain papa qui tout d’un coup est pris d’amour filial et veut retrouver sa fifille. Et c’est là que ça se gâte, et c’est d’ailleurs bien dommage, car je trouvais cette idée de filiation abominable bien sympathique et plutôt originale.
La police est donc mise dans le coup et c’est le sergent Sandy Mc Bride et le capitaine Bill Reynolds qui vont être chargés de protéger Sara, et surtout qui veulent coincer le serial killer. C’est en effet leur but premier, car le lecteur se rendra vite compte que la jeune femme est totalement manipulée par les deux flics, qui usent de persuasion pour qu’elle continue de répondre aux appels téléphoniques du fameux John et qu’elle accepte de même ses cadeaux : des « souvenirs » de ses victimes d’autrefois. Les appels téléphoniques sont tracés, mais ne permettent pas de localiser le tueur qui se cache dans des régions isolées et dans des parcs nationaux, et qui menace de repasser à l’action si jamais Sara ne lui répond plus.
Rien ne va plus pour la jeune femme, qui devient totalement stressée, et on la comprend aisément. Son couple en pâtit puisqu’elle est sur les nerfs et que son fiancé s’inquiète, d’autant plus qu’il travaille dans une réserve naturelle loin de leur habitation et part pendant plusieurs jours d’affilée. Elle ne peut pas en parler non plus à sa famille, refusant d’inquiéter ses parents (sa mère surtout, car c’est de la colère de son père dont elle a peur), et refusant également d’en parler à ses sœurs, bien sûr à celle avec laquelle elle ne peut pas s’empêcher de se chamailler, mais aussi avec l’ainée avec qui les relations sont pourtant harmonieuses.
La voilà donc seule face au tueur qui tente à chaque appel de la faire parler et d’en savoir plus sur elle : ses goûts, ce qu’elle aimait quand elle était petite, son fiancé et bientôt sa fille, puisqu’il apprend que Sara a un enfant. Il veut dès lors la rencontrer, ainsi que la petite fille, ce que refuse catégoriquement la jeune femme, qui lui ment sur les goûts de l’enfant quand il l’interroge.
Ces conversations m’ont paru totalement surréalistes, et cette partie du roman hautement improbable. Je ne m’y connais pas à fond en sérial killers, mais il me semble vraiment impensable qu’un homme avec un tel passé recherche des liens de famille, et d’une façon aussi naïve. Et puis 26 ans « d’exercice », ça me semble un peu long, non ? Que fait donc la police qui ne l’a toujours pas coincé au bout de tant d’années ?
Sara ne peut que se tourner vers Bill, le flic qui est le seul à la soutenir et à lui dire de faire ce qu’elle ressent et qu’elle n’est pas obligée de continuer à accepter les appels téléphoniques, tant pis pour l’enquête. Ils se rapprochent, au point que leur relation est sur le point de devenir ambigüe, du moins pour Sara qui ne sait plus très bien où elle en est et passe son temps à se quereller avec Evan quand il est à la maison, tandis que le flic tente de persuader la jeune femme de lire L’Art de la guerre de Sun Tzu, un bouquin qui le passionne.
Je ne vous raconterai pas la fin de l’histoire, ni même si elle se termine bien ou mal… Car à part ces quelques remarques et le caractère un peu geignard de l’héroïne qui m’a pas mal énervée par moment, il faut avouer que ce thriller est rondement mené et que malgré ses défauts et une situation qui devient de plus en plus irréaliste, c’est un bon page turner qui vous fera passer un excellent moment. Dommage que les derniers rebondissements soient trop stéréotypés, ils n’apportent pas grand-chose si ce n’est une certaine lassitude en fin de lecture.
Pour les amateurs du genre, Chevy Stevens est donc une auteur à suivre. Pour ceux qui veulent de la nouveauté et des histoires plus véridiques et moins « clichés », passez votre chemin. Et si vous êtes sujet à des crises de colère ou même de violence incontrôlées, n’oubliez pas de vérifier sur vos papiers votre filiation, peut-être êtes-vous également le fils ou la fille d’un horrible criminel, ce qui expliquerait vos pulsions violentes…
Il coule aussi dans tes veines de Chevy Stevens
Éditeur : Archipel (9 janvier 2013)
Collection : Suspense
400 pages ; 22 €
Un grand merci à Christel de LP Conseils pour m'avoir envoyé ce roman !
Bleu comme le papillon !
Ile de Vencouvert