Ca coûte si peu, mais ça compte. E ça me rend malade.J'enrage. Non pas pour moi et les petits euros dépensés, si,légers...Mais qu'il faille le faire. Voilà, je suis allé faire mes courses et des gens collectaient de la nourriture pur les restos du coeur. Déjà ça m'énerve, parce que ça ne devrait pas exister, ça devrait "aller de soi" l'aide aux pauvres et être pris en charge par l'Etat. bien sûr, ces gens épatants, sympas sont bénéfiques, mais pourquoi ne sont-ils pas chez eux, en paix par ce temps de merde? J'ai parlé avec eux et j'ai demandé ce qu'il fallait acheter. Bon, rien de cher: raviolis en boîte, sucre... J'achète donc en pestant. Ce sera ma goutte d'eau dans la mer... J'ai eu envie d'acheter des bonbons pour les enfants, qu'il y ait un "en plus" non utile, non nécessaire, non pas un luxe mais un sourire Dire que je pense aussi aux gens autant qu'à leur misère, à leurs besoins...je n'ai pas .J'ai quand même pris des biscuits. Un peu de douceur. Mais ça ne m'a pas calmé:je suis toujours fou de rage devant la misère et je l'étais déjà avant de l'avoir connue... Avec ma modeste retraite, je joue quand même le rôle du riche, de celui qui peut, qui doit donner. Le moindre petite avantage est devenu un privilège. J'ai presque eu honte de boire mon thé, si cher, si précieux que je commande sur le net à grands frais: petit luxe, je n'en ai pas beaucoup. Mais rien que les frais de port pourraient acheter une ou eux autres boîtes de conserve, des nouilles, du riz.
D'autres pauvres que je connais en font autant. Des gens vivant du RSA achètent des nouilles, des raviolis en boîte pour les plus pauvres. On en est là.Pendant ce temps les petits-nantis prêchent la frugalité, hurlent contre la "société de consommation" et se distinguent, car ce sont de vrais bourges par leur mode de consommation: ça méprise le maquedot, ça ne veut que du bio... Honte! Et certains qui n'en mangeraient jamais, qui préféreraient se faire tuer plutôt que de bouffer des raviolis en boîte en achètent tout de même.... pour les pauvres. Ils pensent que ce n'est pas sain et n'en donnent pas à leurs enfants. Oui, j'enrage...
Et moi, si con... Je peux préparer de vrais raviolis, faire la pâte, cuisiner une farce fine, suivre la recette d'Escoffier ou de chefs italiens. MEs amis se régalent.;Mais soudain, les raviolis en boîte prennent un goût sublime, celui de la survie, de la goulée d'air qui sauve le noyé. Le hamburger à deux sous devient merveilleux. La nouillasse est paradisiaque, avec de l'emmental sous plastique... on en est là. Avec les traditionnels patates et oeufs durs à la béchamel, régal de fin de mois, quand les fins de mois commencent le premier.
Alors je me sens con, bête, pas à ma place: j'ai posé mes raviolis, mes nouilles, mon sucre dans le caddy des quêteurs. Comme à chaque fois, je tremblais. Avec ma retraite, je suis un riche par rapport aux vrais pauvres. Et je n'aime pas du tout ça. Je suis rentré chez moi, bien au chaud.D'autres sont dans la rue ou dans des abris provisoires à cause du temps.
Vivement l'abondance! Vivement le vrai monde, le pays de cocagne où les oies volent toutes rôties, où les saucisses poussent sur les arbres, le palais de dame Tartine aux murs de chocolat... En attendant, je suis un bourgeois, avec du chauffage et de bonnes pantoufles. Y renoncer ne servirait à rien. Le comble du ridicule est qu'en plus, j'ai fait des économies: je n'ai pas acheté tout ce que je prévoyais. Je n'ai pas osé.Et même en comptant la bouffe pour les pauvres, j'ai dépensé moins que d'habitude. Par honte et bêtise, oui...
Je ne serai jamais écolo... je ne serai jamais bio: je préfère les hamburger les plus grassement gluants, salingues et spongieux à la gastronomie du "pur" de l'idéologie du "sans tache", du "bien blanc", mais quand même du pain gris...laissez venir à moi les additifs pour pauvres et les colorants stridents qui rendent les saucisses mollasses joyeuses comme des ducasses. Comme les fêtes populaires où l'on dépense connement des sous pour des gaufres aqueuses dans une vraie joie de pauvres, de ces joies amères qui ne veulent pas savoir qu'elles se composent aussi d'angoisse, de tristesse et de mélancolie.faut-il se contenter de vivre pur ne pas mourir? Vivement le réchauffement de la planète et les choux gras!
Magazine Culture
collectes alimentaires et resto du coeur et autres fantaisies du destin dans un monde vachement solidaire...
Publié le 14 mars 2013 par Orlandoderudder
14 mars 2013