Le nouveau pape a donc choisit le nom de François, en référence évidente à Saint François d’Assise. Un signe de retour à l’essentiel, qui nous offre l’occasion de nous réapproprier sur la théologie de la pauvreté et du don développée par le fransiscain saint Bonaventure en interprétant la vie de saint François d’Assise.
![Saint François d’Assise : une théologie de la pauvreté et du don stigmates](http://media.paperblog.fr/i/622/6226668/saint-francois-dassise-theologie-pauvrete-don-L-QrRG2n.jpeg)
Saint François est devenu pauvre parmis les pauvres : il a fait l’expérience du don de soi et de la pauvreté ; saint Bonaventure produira à partir de cette expérience une conceptualisation du don, suivant quatre formes du don :
1) Don de l’avoir : donner ce qu’on a
Saint François pris pour lui le verset de l’evangile de Saint Matthieu : « Si tu veux être parfait, va, vend tout ce que tu possède, et suis-moi. » Ainsi François se dépouille et donne son argent et ses biens aux pauvres. C’est le don de l’avoir.
2) Don de l’être : se donner soi-même
Mais il ne suffit pas d’aider les pauvres, il faut devenir pauvre soi-même, tout comme Dieu est devenu homme, se dépouillant de sa condition divine. Ainsi, comme Dieu s’est Lui-même donné, il faut se donner soi-même. C’est le don de l’être.
3) Don du don : libéralité, aban-don
La parfaite pauvreté ne retient rien pour elle-même, pas même la pauvreté elle-même : « le savoir du don tue le don » disait Derrida, ou encore : »toute réciprocité du don tue le don » selon J-L Marion. Ainsi c’est faire vraiment don que de donner le don, c’est à dire ne rien en attendre en retour et ne pas s’en enorgueillir. C’est le don du don, l’aban-don.
On retrouve le débat contemporain sur la donation où Jean-Luc Marion élabore la position suivante: la mise entre parenthèse du donateur (puisqu’il ne faut rien attendre du don), du receveur (puisqu’il faut un jour se détacher de ses dettes) et du don lui-même (puisqu’il ne faut pas en prendre acte). Donateur et donné ainsi disparus, il ne reste que l’acte de donation.
4) L’humilité, la dépendance : reconnaissance de sa condition de créature
Encore plus parfait que le don du don, il y a l’humilité, c’est à dire la reconnaissance qu’à la créature de savoir qu’elle n’est rien et ne dépend que de Dieu (humilité : humus : terre (cf. Genèse 1)). Ce n’est donc pas l’humilité de servitude comme on la trouve chez Saint Paul ou Saint Bernard. L’humilité est l’étape suprême du don : le fransiscain se donne tellement qu’il n’a plus rien, ni même lui-même, et ne dépend plus que de Dieu. C’est la forme la plus aboutie du don.
À partir de l’ouvrage d’Emmanuel Falque, Saint Bonaventure et l’entrée de Dieu en théologie, 2001.