Il convient de souligner qu’il n’est pas évident de jouer en matinée La Promesse de l’aube adapté du roman de Romain Gary, et le soir enchaîner avec la correspondance du philosophe Vladimir Jankélévitch dans « La Vie est une géniale improvisation ! ». Janké — comme l’appelaient ses élèves — a entretenu un lien épistolaire avec son ami de toujours, philosophe bien sûr, Louis Beauduc qu’il avait connu à « Normale Sup ».
Cette correspondance de presque 60 ans, divinement narrée par Bruno Abraham-Kremer, m’a plongée dans l’univers de ce cerveau hors normes dont le credo fut : « On peut après tout, vivre sans le je-ne-sais-quoi, comme on peut vivre sans philosophie, sans musique, sans joie et sans amour. Mais pas si bien. » (Complètement d’accord !!!)
Rencontre inattendue avec un être plein de ces nourritures spirituelles primant (ô combien !) sur les nourritures terrestres : philosophe et musicologue français, professeur de Morale, amoureux de la vie, de la pensée, véritable passionné de la culture allemande… mais en rupture avec l’Allemagne après la Seconde Guerre Mondiale ne pouvant pardonner les crimes de la Shoah…
Brillant sans conteste mais apparemment peu bon vivant, il heurtait ses pairs plus qu’il ne les séduisait. Invité, en 1928, aux Décades de Pontigny afin de disserter sur Plotin et Bergson, « Janké » lucide se serait qualifié de la manière suivante : « Je ne suis pas fait du tout pour la philosophie des salons ; je sais que je suis trop violent, pointu, âpre, paradoxal. »
Un être en quête perpétuelle d’Absolu, recherchant apparemment toute sa vie « l’accord parfait entre ses idées et ses actes ».
Passionnant et émouvant !
Jusqu’au 5 mai 2013. Au Théâtre des Mathurins. Le samedi à 16h et le dimanche à 18h.