La danse de la fontaine émergente - Chen Zhen et Xu Min - Paris 13
A la fois sculpture hybride, fontaine monumentale et installation d’art contemporain imprégnée d’art industriel, La danse de la fontaine émergente est la dernière œuvre importante imaginée par Chen Zhen, plasticien franco-chinois, avant sa disparition. Une création impressionnante, révélatrice de sa philosophie, hymne à un monde multiculturel. En plein cœur du nouvel espace urbain du XIIIème arrondissement, la place Augusta Holmes qui accueille cette réalisation saisissante a été aménagée par l’architecte Christian Devillers sur le site d’une ancienne usine de captage des eaux de la Seine datant du XIXème siècle reconstruite en sous-sol en 1994. Principale usine de production d’eau non potable de la ville de Paris, elle puise le précieux liquide directement dans le fleuve avant de le filtrer pour alimenter les installations d’arrosage des espaces verts ainsi que les canalisations de la voirie permettant de nettoyer les caniveaux et les égouts.
La danse de la fontaine émergente illuminée - courtesy Ville de Paris
La danse de la fontaine émergente - Paris 13
Inaugurée le 12 février 2008, La danse de la fontaine émergente est une œuvre singulière d’une grande complexité technique combinant le travail du verre et du métal, l’ingénierie caractéristique de l’eau et la vision éclairée d’un artiste de grand talent. Elle aura nécessité plus de 7 ans de travail avant de voir le jour entre la conception et la réalisation.
En 1999, la Commission des Affaires Culturelles de la Ville de Paris passe commande auprès de Chen Zhen dans le cadre du plan d’aménagement de Seine Rive Gauche. L’artiste décède en 2000 d’une maladie du sang alors que l’installation n’est qu’à l’état d‘esquisses, suspendant le projet. La mairie de Paris relance l’idée en 2001. Xu Min épouse et collaboratrice de Chen Zhen finalise les plans de son mari, lui rendant ainsi un dernier hommage posthume. Œuvre monumentale, budget pharaonique, La danse de la fontaineémergente a couté 1 200 000 euro dont 970 000 euro à la charge de la Ville de Paris, le ministère de la Culture et de la Communication participant quant à lui au financement à hauteur de 230 000 euro. Elle a été réalisée par la SEMAPA, société d’étude de maîtrise d’ouvrage et d’aménagement parisienne en charge de la large opération d’urbanisme parisienne Paris Seine Rive Gauche.
La danse de la fontaine émergente - 1er segment détails
La danse de la fontaine émergente - 2ème segment détails
La danse de la fontaine émergente - 3ème segment détails
La danse de la fontaine émergente évoque l’histoire du lieu et symbolise l’énergie de l’eau puisée dans la Seine pour alimenter la ville mais également les liens unissant Paris à la communauté asiatique. Cette œuvre représente un dragon stylisé qui jaillit du mur de l’usine souterraine de production d’eau et dont le corps semble plonger dans le béton devenu liquide par la magie de l’illusion artistique, émerge à nouveau du sol comme d’un lac, bondit une dernière fois avant de disparaître en direction de la Seine. La tête de cet animal mythologique n’est pas représentée laissant, comme le suggère l’encart informatif, l’imagination vagabonder.
L’installation est composée de plusieurs éléments visuellement connectés entre eux. On distingue trois parties. Tout d’abord celle s’épanouissant sur la portion visible de l’usine souterraine, un mur nappé de métal. La façade haute de 16 mètres et large de 9 est comme déformée par la poussée du corps du dragon en bas relief, empreinte imprimée dans l’acier du passage de la créature surgissant des profondeurs de la terre. Elle est encadrée à gauche par un schéma qui représente le croquis axonométrique de l’usine située à 20 mètres de profondeur et à droite celui figurant celle datant du XIXème siècle. Sur la place, elle-même, les deux autres segments de l’œuvre, tubes transparents en verre d’1m80 de diamètre, cerclés d’acier et surmontés d’une crête d’écailles en inox jaillissent et ricochent sur le sol.
Danse de la fontaine émergente illuminée de nuit - courtesy Ville de Paris
Un système hydraulique diffuse l’eau à l’intérieur du corps du dragon à haute pression 80m3/h. Cette eau est recyclée en circuit fermé qu’une citerne de 70m3, située dans les sous-sols, alimente. Le dispositif possède une installation autonome de purification qui permet de réduire la consommation d’eau. Comme la plupart des fontaines de Paris, l’eau est coupée pendant la saison hivernale afin de limiter les dégâts du gel potentiel. A la nuit tombée, l’œuvre s’illumine, éclairage variable réglé par une minuterie. La créature de verre et d’acier, d’eau et de lumière, ondoie à la surface du sol dans un ballet de couleurs.
Danse de la fontaine émergente - détail des tubes- courtesy Chaoborus
La danse de la fontaine émergente - détails - Paris 13
Orientée selon un axe nord ouest / sud ouest, propice selon l’art du Feng Shui, entre Seine (Yin) et soleil (Yang), La danse de la fontaine émergente répond aux préceptes cosmologiques de la sagesse ancestrale chinoise. Il naît de cette œuvre une impression de force et de grâce. Cette représentation de la puissance de l’eau surgissant en geyser canalisée par les flancs de la bête, torrent se déversant dans la flamboyance des jeux de lumière, est d’une poésie folle. On ne peut que regretter les dégradations dont cette installation a été victime ternissant un peu son éclat. Autant je comprends qu’une création comme la Quatrième Pomme de Franck Scurtipeu facile d’accès puisse faire l’objet de vandalisme autant cela m’échappe tout à fait que l’on puisse s’attaquer à une œuvre aussi riche d’émotion, d’une beauté immédiate et généreuse. Et je ne suis pas loin de penser : de la confiture aux cochons !
Danse de la fontaine émergente - œuvre de Chen Zhen et Xu Min
Place Augusta Holmes, rue Paul Klee - Paris 13 Métro Quai de la Gare - ligne 6