L’élection de l’homme vêtu de blanc -aussi canonique soit-elle- n’a pas toujours été le fruit d’une émanation directe de l’Esprit Saint qui fut lui-même souvent contrarié par les nombreux esprits chagrins des différentes cours européennes.
Bien rares sont les scrutins électoraux qui peuvent se targuer de faire l’objet d’une aura (ou d’une curiosité) aussi importante à travers le monde. Voilà bien une chose que nos amis américains ne sont pas prêts de voler à ce vieux continent qu’est l’Europe...
Le Conclave qui s’ouvre au Vatican au sein de la Chapelle Sixtine et, qui débouchera sur le nom du 266ème successeur de saint-Pierre, demeurera au centre de l’actualité jusqu’à ce que la fumée blanche (et divine ?) s’élève dans le ciel de la ville éternelle.
De manière à lutter contre les ingérences politiques, c’est en l’an 1059 sous le pontificat du pape Nicolas II que la papauté sera réservée aux seuls Cardinaux. Avant cette date, tout chrétien baptisé pouvait accéder au trône pontifical.
Il faudra néanmoins attendre le Concile de Lyon en juillet 1274 sous le pontificat de Grégoire X pour voir la forme de Conclave la plus proche de celle que nous connaissons actuellement. Après une période de près de 3 ans sans pape, les autorités romaines avaient décidé d’emmurer les cardinaux pour les obliger à désigner un Pape. Dans sa Bulle Ubi Periculum, Grégoire X conservera le principe de cet enfermement en y ajoutant d’une part une restriction d’alimentation à du pain, de l’eau et à du vin à partir du 5ème jour de Conclave et, d’autre part, une vie collective sans séparation d’intimité avec obligation de parler à voix haute pour tous les Cardinaux. C’est de là que les fameuses « messes basses » trouvent leur origine.
Le Conclave connaitra des lors quelques modifications à la marge avant d’être définitivement formalisé en 1996 sous le pontificat de Jean-Paul II au travers de la constitution apostolique Universi Domici Gregis.
Ainsi donc, avant l'ouverture du conclave, les cardinaux, qui n'ont pas le droit de voter pour eux, sont appelés à évoquer le futur de l'Église lors de Congrégations générales, pour préparer l'élection du nouveau Pape qui sera élu lorsqu'il aura recueilli les 2/3 des votes. Le matin du premier jour du Conclave est réservé à la célébration de la messe. L'après-midi est consacré à l'entrée en conclave, puis au premier scrutin qui peut être remis au lendemain. Les jours suivants, on organise une session de vote le matin et une l'après-midi. Lors de chaque session, si les résultats d'un premier scrutin ne sont pas concluants, on procède immédiatement à un second scrutin, ce qui peut porter le nombre de scrutins quotidiens à 4. Les bulletins électoraux dépouillés sont à chaque session brûlés dans un poêle.
Après chaque scrutin, les cardinaux communiquent les résultats au reste du monde par l'intermédiaire d'une cheminée, un conduit étant spécialement installé lors du Conclave. Le résultat du vote est annoncé par une fumée noire (vote non concluant) ou blanche (vote concluant).
En cas de fumée blanche, le Conclave prend fin lorsque le pape a répondu favorablement à la question du cardinal doyen « Acceptez-vous votre élection canonique comme souverain pontife ? » (en latin Acceptasne electionem de te canonice factam in Summum Pontificem ?) puis à « De quel nom voulez-vous être appelé ? » (en latin Quo nomine vis vocari ?), le Pape étant finalement proclamé il rejoint la Salle des Pleurs où il peut exprimer ses sentiments devant l’ampleur de la tâche qui lui est confiée, il est drapé dans l’une des trois soutanes blanches provisoire et reçoit l’hommage de déférence de tous les cardinaux.
Le feu est traditionnellement un feu de paille, mouillée s’il faut produire une fumée blanche, ajoutée aux bulletins de vote dans le poêle pour en produire une noire. Depuis le Conclave de 2005, des fumigènes colorants fabriqués par un « poêle électronique » sont utilisés pour éviter les confusions. De plus, on a décidé cette année-là de faire sonner les cloches de Saint-Pierre en accompagnement de la fumée blanche afin d'éviter les hésitations des spectateurs sur la couleur des volutes s’échappant de la cheminée. Le cardinal protodiacre prononce l’Habemus papam depuis le balcon central de la basilique Saint-Pierre.
En la matière, point de pronostic qui tienne, les Cardinaux jurent qu’ils éliront un pape en tenant compte de la manifestation de l’Esprit Saint ! Reste à savoir maintenant de quelle manière ce dernier va se manifester…Mais ça, c’est une autre histoire !
A la manière de saint-Bernard de Clairvaux : « Le Saint-Esprit est le baiser de Dieu ».