Entre passé et présent
D'un côté, prenons un quartier au centre ou à l'ouest de la ville. Qu'observe-t-on? Des immeubles modernes, parfois spectaculaires, concoctés par des architectes renommés. On s'y attend.
Le quartier de Shinjuku à la tombée de la nuit
La galerie d'art 21_21 de Ando Tadao
Le musée d'art Suntory de Kuma Kengo
Le musée d'art Mori à travers l'araignée géante de
Louise Bourgeois appelée Maman
La merveille de Kisho Kurokawa, le Centre national d'art, qui
ondule à l'extérieur et surprend avec ses cônes géants à l'intérieur
La Tokyo Skytree de Tadao Andō et Nikken Sekkei et,
au premier plan, l'Asahi Beer Hall de Philippe Starck
Et des détails amusants repérés en levant le nez,
comme ici dans une rue consacrée uniquement
au matériel de cuisine
Toutes ces constructions surprenantes, je les ai recherchées, notées, soulignées dans mon guide. J'avais aussi souligné le quartier d'Akihabara, "electric town", parce qu'il semblait que c'était là que les produits électroniques et les robots "domestiques", étaient testés en primeur avant qu'ils n'atteignent le marché de masse, peut-être dans 2 ans. Je ne savais pas ce que je cherchais. J'avais aussi oublié que mon guide, acheté en avril 2011, datait en fait de 2010. Et dans ce coin du monde, ça bouge. Trois ans, c'est long, ce qui était vrai alors ne l'est plus forcément actuellement. Je viens de découvrir que Akihabara n'est plus le centre du monde en ce qui concerne l'électronique, il s'est déplacé, dans d'autres quartiers de Tokyo, mais surtout, plus loin, la Corée, Taiwan et la Chine. D'ailleurs, même les appareils de photo sont souvent "made in China", même si leur programme à Tokyo ne parle que japonais.
La question qu'on est en droit de se poser est : Est-ce que Akihabara est alors tout déserté ou vide? Pas du tout, du tout. Dans cette ville où le m2 est l'un des plus chers au monde, rien n'est vide, rien n'est déserté. Depuis un certain temps (c'est bon de s'autoriser à rester vague), ce quartier est celui, avant tout, des mangas et autres produits dérivés.
Des bâtiments entiers leur sont consacrés. Comme je n'y connais absolument rien, je me suis baladée, presque jusqu'à lassitude, essayant de comprendre comment les livres étaient classés, certains qui me semblaient destinés à des enfants côtoyaient d'autres livres qui frisaient la gentille pornographie. Je n'ai rien compris, je l'avoue.
Mais dans ce quartier, je n'étais pas au bout de mes surprises. A chaque coin de rue, des jeunes filles en uniforme de domestique (maid, en anglais) distribuaient des dépliants vantant les mérites de leur maid-café.
Apparemment, ces cafés sont fréquentés par un public essentiellement otaku (quelqu'un qui consacre une certaine partie de son temps à une activité d'intérieur comme les mangas, animes, les idoles japonaises, ou encore les jeux vidéo). Les services de base qui y sont offerts sont les mêmes que dans les cafés traditionnels, auxquels il faut ajouter diverses interactions avec les maids, telles que la prise de photo ou divers jeux et animations. Allons-y, c'est typique, il faut voir.
Les photos sont interdites, donc difficile de bien cadrer
Ces jeunes filles qui s'expriment avec une voix de bébé, qui appellent les clients masculins "master", qui nous font souffler une bougie fictive et compter jusqu'à 3, qui vendent des nounours, qui trouvent tout cute (mignon), nous proposent de mettre des oreilles de lapins et autres petits jeux que je n'aurais plus osé proposer à mes enfants, au-delà de 5 ans, qu'en penser? Ambigu... Peut-être que j'étais déstabilisée après avoir vu des petites filles dessinées avec des énormes seins?
Heureusement que je viens de dénicher cette vidéo qui explique que les maid-cafés existaient pour sortir les clients de leur environnement et de leur solitude, les détendre, les faire retomber en enfance.
Dans les magasins, on trouve aussi des tenues de maids...
J'ai hésité à traiter ce sujet pour mon billet du 8 mars, journée de la femme. Mais quand on ne comprend pas, c'est difficile de savoir par quel bout commencer l'histoire. On trouve davantage d'informations sur Wikipedia.
C'est avec bonheur que j'ai découvert un quartier, plus au nord-est. Plus traditionnel, plus rassurant... Asakusa. Le Japon plus que Tokyo. Détruit lors du tremblement de terre de 1923, puis rasé à nouveau pendant la 2e guerre mondiale. Et reconstruit encore, toujours autour du temple Senso-ji, lui aussi détruit et reconstruit.
Les petits rideaux que l'on doit franchir pour entrer dans
un restaurant
Une sandale en paille longue de 4.5 m,
tressée par 800 villageois de la préfecture
de Yamagata (près de Fukushima, puisqu'on connaît)
En triant mes photos, en les organisant, je me dis que j'ai bien goûté Tokyo, que j'ai nourri mes attentes, que je n'ai pas encore tout digéré, mais que j'aimerais bien reprendre une tranche de Japon.