Près de cent ans après, le naufrage du paquebot britannique Lusitania le 7 mai 1915 à proximité des côtes irlandaises reste un mystère non résolu. On connaît la manière : un sous-marin allemand – l’U-20 – l’a torpillé et coulé. On connaît les conséquences : la catastrophe humaine – sans doute plus de 1400 victimes – va faire prendre conscience aux civils américains de la barbarie allemande et accélérer l’entrée des États-Unis dans la guerre. Mais quels sont les raisons et dessous de cette affaire ? Les écrivains Patrice Ordas et Patrick Cothias proposent leur version de cette énigme, une version romancée, appuyée par une solide documentation et mise en valeur par Jack Manini.
Les auteurs suivent une série de protagonistes, tous passagers à des niveaux divers du célèbre transatlantique à partir du 20 avril 1915. Un jeune gallois déterminé, Michaël Morisson, a débarqué à New York pour s’engager dans la marine marchande. Il dispose d’une recommandation auprès du capitaine William Turner, véritable légende des océans. Celui-ci vient d’être affecté au commandement d’un des plus beaux et des plus rapides paquebots du monde, le Lusitania, reconverti discrètement en croiseur auxiliaire et donc armé. L’ambassade britannique impose le transport vers l’Angleterre du prototype d’une locomotive révolutionnaire, issu des ateliers de Vanderbilt. L’héritier sulfureux de ce groupe, le dandy Alfred est aussi à bord. Ils ignorent tous la présence de trois espions à la solde de l’empire allemand dont un agent double, l’alsacien François Latour… Quels sont les véritables objectifs de tous ces acteurs ? Des mauvais signes ne présagent guère d’une traversée sans histoire.
Mais la meilleure surprise est l’arrivée de Jack Manini chez Bamboo, où il reprend crayons et pinceaux. Et avec quelle maestria ! Admirablement bien documenté sur cette époque et multipliant les clins d’œil graphiques, il enchaîne les planches dans un style véritablement cinématographique où les mouvements sont vivants et justes, où les plans sont judicieux et laissent toujours de la place pour les décors. Il rend chaque personnage particulièrement attachant. L’ensemble est mis en couleurs dans des tons harmonieux, une gamme chromatique limitée pour chaque planche et surtout un éclairage subtil.
En clair, c'est un coup de cœur !
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Chronique parue sous une forme légèrement différente dans Zoo n°46 que vous pouvez lire gratuitement en ligne en suivant ce lien.
Pour aller plus loin, voici un reportage sur ce mystère.