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Il y a eu le prix Point de Mire, dont je fus proche, il y a maintenant le prix Première, avec de nombreux points communs puisque l'ancien comme le nouveau sont attribués par un jury d'auditeurs de la première chaîne radio de la RTBF - radio-télévision belge francophone, pour les non autochtones. La Foire du Livre de Bruxelles est aussi le cadre de la remise du prix, aujourd'hui comme hier. Aujourd'hui, c'était précisément l'ouverture de la Foire et l'attribution du prix qui, en changeant de nom, est aussi devenu une récompense réservée à un premier roman.
Cela tombe bien, Hoai Huong Nguyen en a écrit un qui est excellent. L'ombre douce succède ainsi à Léna, de Virginie Deloffre, qui avait été couronné l'an dernier.
L'ombre douce est une histoire d'amour. Une belle histoire d'amour tragique, située à une époque tout aussi tragique dans un pays en guerre, le Viêt Nam, une partie de la colonie française que l'on appelait alors l'Indochine. Yann est un soldat français qui se trouve pris dans la cuvette de Diên Biên Phu en 1954, qui survit mais est fait prisonnier et qui sera libéré grâce au sacrifice de Mai, la jeune Annamite rencontrée à l'hôpital où il se remettait de ses blessures avant la bataille de Diên Biên Phu. Ils avaient eu le temps de se marier et de passer quelques heures dans l'intimité...
Le destin des deux jeunes gens ressemble au conflit. Il est absurde. Mais cela donne, sous la plume de Hoai Huong Nguyen, un livre empli de poésie, où l'usage du tiret (peut-être le signe de ponctuation le plus utilisé dans ces pages) rythme d'étrange manière les moments les plus intenses - ils sont nombreux, ces moments-là, dans l'ardeur d'une jeunesse à la vie menacée.
Je ne sais pas si, parmi les dix-neuf autres livres sélectionnés pour le prix Première (je n'en ai lu que quelques-uns), l'un ou l'autre aurait pu, par ses qualités, mériter mieux que celui-ci une récompense que Hoai Huong Nguyen mérite absolument.