Pour me surprendre ainsi, je le réalise, il nous faudrait être intimes. Il nous faudrait partager un petit déjeuner, passer une soirée à mon domicile, partir en vacances ensemble, ce qui, reconnaissons le, est fort peu probable.
Pour me voir ainsi, les cheveux lâchés, il nous faudrait être amies et non seulement copines, ou appartenir à la même famille, car jamais je ne sors sans les avoir attachés.
Madame mère me racontait qu’en une période lointaine, celle de l’après guerre, aucune femme ne se promenait « en cheveux ». Et de faire tailler ce qu’elle appelait TIGNASSE, pour laquelle elle n’avait que mépris, court, disait-elle, court, et que l’on n’en parle plus.
Elle a poussée, comme un acte de rebellion. Nous nous sommes déclarées la guerre. Je l’ai gagnée, et jamais plus je n’ai senti la lame du rasoir courir sur ma nuque.
Oui, mais voilà, moi qui me rêve femme libre, et suis faite de contradictions, que la moindre des contraintes exaspère, ne peux me résoudre à me laisser ennuyer par des cheveux. Des cheveux rebelles, toujours en bataille, que je leur laisse gagner, qui n’en font qu’à leur tête, que j’ai cessé de vouloir discipliner. L’hiver, je les sèche, vaguement, rapidement, et puis les attache en chignon, négligemment. Une mèche s’échappe, annonciatrice, éclaireur, de bien d’autres. M’en fiche, c’est le prix à payer pour mon affranchissement, pour leur emprisonnement.
Et puis, il me faut avouer quelques tentatives contre ma nature. Aucune ne fut couronnée de succès : invariablement j’ai dû essuyer des collibets, j’ai été assourdies par des hauts cris, répondre à « c’est quoi ce machin », expliquer que c’est ce que communément on nomme une chevelure, et que quelque part dessous se cache une petite personne, certes non dénuée d’humour mais qui pourrait à l’occasion se montrer susceptible …
NON MAIS !
Classé dans:humeur Tagged: cheveux, tignasse