No, la belle leçon d’histoire

Publié le 07 mars 2013 par Unionstreet

No

de Pablo Larrain (2013)

En 1988, le dictateur chilien Augusto Pinochet se voit contraint d’organiser un référendum sur sa présidence face aux pressions internationales.
L’opposition aura donc la chance, pendant un peu moins d’un mois de bénéficier de 15 minutes par jour sur les chaînes du pays.
Un jeune publicitaire ancien exilé se voit proposer, par un ami de longue date membre de l’opposition un poste de consultant sur les propagandes télévisées du « No », visant à faire tomber le dictateur.
Commence alors une bataille sur le champ des médias ou s’affrontent les leaders, partisans du « Yes » et les opposants.

Le publicitaire en question, René Saavedra interprété avec application par Gael Garci Bernal (également producteur du film) finit par prendre en charge la campagne. Jugeant que celle proposée par les opposants n’est pas assez vendeuse il décide de prendre un ton tout à fait différent, se basant sur ses qualités de publiciste, il « vend » une idée. Plutôt que de montrer un peuple oppressé, et souffrant, il filme un peuple libéré, il offre la vision d’une démocratie heureuse et épanouie (qui ressemble parfois à une publicité pour lessive) celle qui aura voté non à la réélection de Pinochet.

Ce combat de David contre Goliath est passionnant tant il semble perdu d’avance même si on connait la suite de l’histoire. La stratégie de Saavedra n’hésitant pas à glisser de l’humour et prônant la joie dans ses campagnes télévisées parait totalement inconsciente face à ce géant qu’est Pinochet. Et si ils disposent chacun de 15 minutes par jour, il est important de rappeler que les chaînes restent contrôlées par le pouvoir qui est en place.

On est absorbés par cette œuvre politique qui nous offre une vision extrêmement intéressante et rare d’un combat à coups de spots télévisés. Les difficultés subies par les opposants, les menaces et la censure dont ils sont victimes nous irritent. Les chiliens de l’autre camp, souhaitant voir Pinochet réélu souvent par peur de perdre leur situation, ou d’une crise économique nous posent dans une situation d’incompréhension et de colère. Tous ces facteurs font de « No » un film palpitant et absorbant.

Le film prend également un parti pris esthétique fortement intéressant, il a été tourné avec d’anciennes caméras datant des années 80 qui donnent un grain unique à celui-ci et rendent le mélange avec les images d’archives étonnamment homogène. Car les spots et autres jingles que nous voyons ici sont, pour la plupart ceux de 1988. L’image vieillie et crasseuse donne au film un grain unique, magnifique et s’ancre parfaitement à l’époque.

Un dernier mot sur Gael Garcia Bernal qui est d’une rigueur et d’une justesse sans faille, comme souvent.

« No » est un film riche, captivant et par la même occasion un beau cours d’histoire.

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