Un code « caché » lié à l'ADN des plantes leur permet de développer et de transmettre des caractéristiques biologiques bien plus rapidement que nous le pensions, d’après une étude révolutionnaire de chercheurs du Salk Institute for Biological Studies.
Bien que l’étude se limita à une unique plante nommée Arabidopsis Thaliana, l’équivalent du rat de laboratoire dans le monde végétal, les résultats laissent à penser que les traits d’autres organismes, dont les humains, puissent être aussi influencés de manière spectaculaire par des phénomènes biologiques que les scientifiques commencent à peine à comprendre.
« Notre étude montre que tout n’est pas dans les gènes », dit Joseph Ecker, un professeur du Salk’s Plant Molecular and Cellular Biology Laboratory, qui dirigea l’équipe de chercheurs. « Nous avons trouvé que ces plantes ont un code épigénétique qui est plus flexible et ayant plus d’influence que nous le pensions. Il existe clairement une composant d’hérédité que nous ne comprenons pas entièrement. Il est possible que nous, les humains, avons un mécanisme épigénétique actif similaire qui contrôle nos caractéristiques et qui est transmis à nos enfants.
En fait, la plupart des découvertes majeures qui conduirent à ces conclusions furent basées sur l ‘étude des plantes. Il existe des traits comme la forme d’une fleur et la pigmentation des fruits dans certaines plantes qui sont sous le contrôle de ce code épigénétique. De pareils traits, qui défient la génétique classique –dite Mendélienne, sont aussi présents chez les mammifères. Dans certaines espèces de souris, par exemple, une tendance à l’obésité peut se transmettre de génération en génération, mais aucune différence entre le code génétique d’une souris grasse et celui d’une souris mince ne peut expliquer cette différence de poids. Les scientifiques ont même trouvé que des véritables jumeaux véritables humains peuvent afficher des traits biologiques différents, malgré leurs séquences identiques d’ADN. Ils ont théorisé que de telles disparités non expliquées pouvaient être le résultat de variation épigénétique.
« Dès lors qu’aucune de ces patterns de variation et d’héritage ne correspond avec ce que la séquence génétique dit qu’il devait se produire, il y a clairement un composant de l’héritage « génétique » qui manque » rapporte Ecker.
Bien que les scientifiques ont identifié un certain nombre de traits épigénétiques, très peu est encore connu sur comment ils apparaissent spontanément, comment il peuvent se propager rapidement à travers une population et à quel point ils peuvent influencer le développement et la fonction biologique.
« La perception de l’importance de la variation épigénétique des plantes d’une génération à l’autre varie grandement au sein de la communauté scientifique », précise Robert Schmitz, chercheur postdoctoral dans le laboratoire d’Ecker et auteur principal de la publication. « Nous avons effectivement fait l’expérience et avons trouvé dans l’ensemble qu’il y avait très peu de changement entre chaque génération mais que des épimutations spontanées existent dans les populations et augmente avec un taux bien supérieur à celui du taux de mutation de l’ADN, et à certains moments elles possèdent une forte influence sur la manière qu’ont les gènes de s ‘exprimer. »
Dans leur étude, les chercheurs de Salk ainsi que leurs collaborateurs du Scripps Research Institute mappèrent l’épigénome d’une population de plantes Arabidopsis puis ont observé comment le paysage biochimique avait changé au cours de 30 générations. Ce mappage consista à rapporter l’état de chaque emplacement sur la molécule d’ADN qui pouvait subir une modification chimique connue sous le terme de méthylation, un changement épigénétique clef qui peut altérer la manière dont certains gènes sous-jacents sont exprimés. Ils ont ensuite regardé comment les états de méthylation de ces sites évoluèrent au cours des générations.
Les plantes étaient toutes des clones d’un ancêtre commun, de manière à ce que leurs séquences d’ADN soient essentiellement identiques à travers les générations. De manière à ce que les changements dans la manière que les plantes avaient d’exprimer certains de leurs traits génétiques étaient probablement le résultat de changements spontanés dans leur code épigénétique –variations dans la méthylation de leurs sites d’ADN- et non le résultat de variations dans les séquences d’ADN sous-jacentes.
Les chercheurs ont découvert qu’il existe plusieurs milliers de sites de méthylation dans l’ADN des plantes qui étaient altérés à chaque génération. Bien que ceci représente une faible proportion des six million de sites potentiels de méthylation estimés exister sur l’ADN de l’Arabidopsis, cela éclipse le taux de changement spontanés observé dans la séquence d’ADN par à peu près cinq ordres de magnitude.
Cela suggère que le code épigénétique des plantes –ainsi que ceux d’autres organismes, par extension - est bien plus fluide que leur code génétique. Encore plus surprenant est la mesure avec laquelle certains de ces changements activent ou désactivent les gènes. Un certain nombre de ces plantes qui subirent des changements héritables par méthylation ont aussi connu des altérations substantielles dans leur expression –le process par lequel les gènes contrôlent la fonction cellulaire à travers la production de protéines. (…)
Vous pouvez trouver l’article original complet ici.
Vous trouverez des explications sur la méthylation et sur l’épigénétique sur cette pagede l’Inserm.
F.M.