Soixante années d’ère post-stalinienne.
Après, les avis divergent sur la réalité intrinsèque. Après l’absence de mouvement, on a dû le retrouver dans
l’une de ses chambres le 1er ou le 2 mars, inanimé. Il venait d’avoir une attaque cérébrale. Lavrenti Beria (54 ans), le redoutable chef de la police, Viatcheslav Molotov (63 ans), le
complice des basses œuvres, Gueorgui Malenkov (51 ans), le dauphin désigné, tous se réunirent dans la datcha et attendirent sa mort. Beria avait retardé au maximum l’arrivée d’un médecin mais de
toute façon, les médecins personnels étaient en prison en attendant la purge. Les autres avaient de toute façon peur de lui faire mal en lui commandant des soins. Car il pouvait être encore assez
vivant pour décréter arbitrairement l’exécution de l’un ou l’autre.
Staline est mort le
5 mars 1953 à 74 ans et la planète entière a fait semblant d’avoir des larmes. Non, il y a eu des larmes sincères de gens qui idéalisaient un "père des peuples" de petite envergure qui a fait
partie des plus cruels bourreaux de l’humanité (on disait d’ailleurs qu’avec ses purges d’avant-guerre, il fut celui qui avait tué le plus de communistes au monde !). Beria, lui, était
heureux et soulagé car il se savait sur la liste de la prochaine purge (il venait d’achever son programme nucléaire). Il a pris le pouvoir pendant trois mois mais il inquiétait trop, il fut
rapidement liquidé (arrêté le 26 juin 1953, exécuté le 23 décembre 1953) et finalement, Nikita Khrouchtchev a pris la relève (à partir du 7 septembre 1953).
Pourtant, Beria, l’opérateur des purges staliniennes, fut d’une étonnante ouverture pendant les quelques
semaines où il a détenu le pouvoir, et il a même voulu déstaliniser bien plus profondément que Khrouchtchev. C’est cela qui faisait peur à ses camarades : avoir une popularité naissante
auprès des masses par des mesures de clémence, comme la libération d’un million de prisonniers du goulag, qui lui permettrait d’imposer ses décisions. Beria avait même le projet de "libérer"
l’Allemagne de l’Est et de laisser faire la Réunification avec l’Allemagne de l’Ouest.
Édouard Herriot (80 ans) qui présidait la chambre des députés en France a quand même fait une minute de
silence, et presque tous les députés se sont levés. C’est dire l’emprise qu’il y avait dans les esprits. Mars 1953 était encore très proche de mai 1945 et la Libération. Imaginez mai 2005. Le
référendum sur le traité constitutionnel européen. Ce n’est pas si ancien que cela. Comment avoir une idée entre celui qui avait combattu les forces nazies avec succès et celui qui a été le
responsable d’une vingtaine de millions de morts dont la moitié par famine provoquée ?
Beaucoup d’artistes, à l’instar d’un Yves Montand, ont mis du temps avant de s’interroger sérieusement, et même des intellectuels de l’envergure d’un Albert Camus ou d’un Edgar
Morin s’y sont fait piéger.
Dans le trio de tête, c’est difficile de donner l’ordre du tiercé gagnant : Hitler, Staline, Mao ? ou l’inverse ? Sans compter les Pol Pot et autres roitelets sanguinaires qui ont jalonné l’histoire de l’humanité. L’histoire a déjà jugé et la
cruauté a eu ses limites. Écartés du pouvoir, Molotov et Malenkov n’ont pas été, au contraire de Beria, exécutés. Ils ont été éloignés et sont morts naturellement le 8 novembre 1986 et le 14
janvier 1988, respectivement à 96 ans et à 86 ans. Ils étaient pourtant de la même farine que leur maître puisqu’ils avaient cosignés tous les ordres des purges.
Les Russes n’avaient pas mérité ça !
Aussi sur le
blog.
Sylvain Rakotoarison (5 mars
2013)
http://www.rakotoarison.eu
Pour aller plus loin :
Hitler.
Pol Pot.
Che Guevera.
Un prédécesseur et successeur de Pol
Pot.
Le lointain
successeur de Staline dans une Russie moins cruelle.
Le lointain successeur de Mao dans une Chine moins cruelle.