Je la regardais sourire et comprenais qu’elle me donnait la clef d’une vie heureuse. Malgré les épreuves, ma mère souriait. Nous partagions déjà des goûts similaires pour l’art, les voyages et les accords de guitare. Enfant, je regardais souvent mon globe terrestre. Je rêvassais et m’imaginais la beauté des îles Vierges, l’immensité de l’Arctique et la profondeur du Grand Canyon. Je voulais comprendre mes origines et connaître l’histoire de ma province : le Québec.
Nous délaissions le Lac-Saint-Jean pour quelques jours, à la rencontre de nouveaux horizons. Au volant de sa voiture sport, ma mère écoutait les Gipsy Kings. Cette musique de gitans me procure encore un sentiment de liberté. Elle m’enflamme, me donne l’envie de partir à l’aventure et d’aboutir là où maman nous emmenait : Charlevoix.
Charmées par l’ampleur des montagnes, nous traversions le parc des Grands-Jardins avec fébrilité. Les rivières tortueuses et les lacs en plein dégel donnaient de la transparence au tableau. À mi-chemin, le décor changeait brusquement : un paysage lunaire se dessinait. La foudre avait jadis allumé un incendie. Plusieurs hectares de forêt s’étaient envolés en fumée. Tels des soldats, prêts au combat, les chicots dénudés, toujours debout, me donnaient l’espoir que la nature reprendrait ses droits. Malgré cette scène désolante, il y avait cette lumière qui atteignait le sol.
Au bout du chemin, une fenêtre s’ouvrait sur le fleuve, entre vents et marées. La vue portait loin. Il y avait là un port destiné à accueillir les marins, les habitants et les voyageurs. Un endroit où nous pouvions jeter l’ancre et respirer l’air salin.
Je m’attachais à ces gens qui, enracinés à leur canton, étaient empressés de nous tendre la main. Ils portaient en eux ce gène du bonheur que l’on retrouve au Lac-Saint-Jean.
Une promenade sur le quai me permit d’admirer le relief côtier escarpé et la splendeur du Fleuve. Chez moi, quand les eaux sont tourmentées et que la crête des vagues devient blanche, on dit qu’il y a des moutons. Sur le fleuve Saint-Laurent, quand il y a orage, là aussi des moutons se forment, se confondant aux bélugas qui se pointent pour respirer.
À Port-au-Persil, la petite chapelle qui fait face au Fleuve résume bien le charme du village et nous permet d’apprécier le silence : un havre de paix, des rochers, des foins salés… À mon tour, j’y mènerai mes enfants.
Virginie Tanguay
Notice biographique
Virginie Tanguay vit à Roberval, à proximité du lac Saint-Jean. Elle peint depuis une vingtaine d’années. Elle est près de la nature, de tout ce qui est vivant et elle est très à l’écoute de ses émotions qu’elle sait nous transmettre par les couleurs et les formes. Elle a une prédilection pour l’aquarelle qui lui permet d’exprimer la douceur et la transparence, tout en demeurant énergique. Rendre l’ambiance d’un lieu dans toute sa pureté est son objectif. Ses œuvres laissent une grande place à la réflexion. Les détails sont suggérés. Son but est de faire rêver l’observateur, de le transporter dans un monde de vivacité et de fraîcheur, et elle l’atteint bien.
Pour ceux qui veulent en voir ou en savoir davantage : son adresse courrielle : [email protected] et son blogue : virginietanguayaquarelle.space-blogs.com. Vous pouvez vous procurer des œuvres originales, des reproductions, des œuvres sur commande, des cartes postales.