Au travers de ses 11 pistes, Home réussit le pari d'amener l'auditeur dans un voyage aux frontières insondables et dont la cohérence générale ne peut qu'être honorée. A cet effet Home ne manque pas d'identité, mais il lui arrive au demeurant, de s'égarer dans des nappes sonores enveloppées d'une certaine litanie, évitant de peu le piège de la répétition. C'est dès lors que le bas blesse après plusieurs écoutes de ce disque. En effet certaines compositions ne sont clairement présentes que par une volonté de donner du liant à un univers qui au final n'en manque pas, certes. Mais à défaut de prendre des risques pouvant précipiter le schisme esthétique entre telles et telles pistes, la musique de Jason Chung peine par moment à se montrer véritablement surprenante.
Une première fausse note qui comme une lame de fond, reste latente tout au long de l'album, et qui à terme laisse quelques regrets quant au potentiel de certaines compositions. Heureusement le travail effectué sur l'arrangement du son témoigne d'un grand savoir faire, et constitue l'atout majeur de cette création. Frémir sur une lente progression commandée par des rythmiques dissonantes dont l'alchimie ne laisse guère de place au hasard, "Snap", suffit à faire émerger l'oreille de sa torpeur, induite il est vrai par l'humeur cotonneuse du disque.
En effet les premières notes de Home définissent une ambiance qui tend inexorablement vers une promiscuité avec l'oreille de l'auditeur, de part qu'écouter ce disque autrement qu'au casque, ne pourrait révéler que partiellement la multitude de détails constituant la polyphonie des morceaux. En outre le mixage sonore effectué sur l'ensemble du disque revendique une sensation proche du confinement, tel qu'on pourrait l'envisager à bord d'un submersible parcourant les abysses. Ainsi le titre "Distance" se charge de nous emmener dans des profondeurs sources d'une ivresse inattendue, en s'appuyant sur une basse dévastatrice, dont la profondeur achève ce qu'il reste de raison.
A l'instar de Drift il faudra creuser l'écoute des morceaux pour que se révèle le nacre de certains arrangements. Bien que la présence du Eclipse/Blue portée par la voie plaintive de Kazu Makino des Blonde Redhead, marque instantanément par sa puissance rythmique, dopée par l'impulsion d'un beat minimal et crucial à l'élan dévastateur. D'un featuring à un autre Toro y Moi s'invite également à la fête en accompagnant de sa voix fuyante la lente remontée de cette plongée en eaux troubles dont l'esprit semble s'être suffisamment enivré et c'est bien là l'essentiel.
En bref : un deuxième disque au final moins barré que son prédécesseur mais qui s'en démarque aussi grâce à une emprunte musicale différente, dont la tonalité apparait plus apaisée. On regrettera malgré quelques instants de grâce, une prise de risque parfois bridée par l'envie de créer un objet trop structuré, à qui il manque au final, cette once de folie, capable de transgresser le beau pour le sublime.
Le clip "Eclipse/Blue" :