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Pour mes 20 ans, je suis allée dans un pub avec une de mes meilleures amies. Lorsque nous avions prévu cette sortie, j'avais prévu de me déchirer la tronche, de remplir mes veines de bière, de danser comme une malade toute la nuit, voire de pêcho un mec à qui rouler des mécaniques toute la soirée.
Quelques jours avant, j'ai rencontré mon petit-ami actuel. Et le jour-même, nous décidions que nous étions ensemble. Donc, il est évident que mes récentes envies de pêche au mec sont allées voir ailleurs si j'y étais, car je suis fidèle, moi ! Ne restaient plus que la bière et mes chorégraphies dignes d'un enfant de trois ans pour m'amuser. Et d'ailleurs, bah, ça me convenait parfaitement.
Sauf que. Voilà. Certains étaient là pour pêcho (j'aime bien le mot "pêcho", ne me retenez pas). Moi pas. Et si tu n'es pas là pour repartir les poches pleines de numéros de téléphone et jouer avec ta langue sur des musiques endiablées, et bien, tu n'as pas le droit d'être là. Tu ne veux pas rencontrer quelqu'un ? Pourquoi tu sors de chez toi, alors ?
Je vais vous expliquer un peu plus précisément ce qu'il s'est passé.
Je danse sur la piste pendant que ma pote tape la discussion drague sévère dans un coin. Je suis ivre, j'aime bien la musique, je danse d'une manière très aléatoire. Je me sens très bien. La soirée est parfaite. C'est la première fois que je fais ça, dans ma vie : être sur une piste, collée à des dizaines de personnes, et danser, juste pour danser. C'est con, mais je suis heureuse.
Et là. Un mec m'aborde. Il me demande comment je m'appelle. Il me dit que je suis jolie. Merci. Il me dit que j'ai de beaux yeux. Merci. Il me dit que j'ai un beau corps. Merci. Il me dit qu'il est là pour se trouver une chérie. Ah bah, ça tombe bien qu'il en parle, tiens. Je lui dis que moi non. Je ne suis pas là pour ça, je veux juste danser. Il comprend le français, il comprend ce que je dis, et pourtant, il tient à danser avec moi. Ok, danser en face de quelqu'un, ce n'est rien. Et puis, il est au courant qu'il ne me péchôra (non, ce mot n'existe pas) pas. Tout va bien.
Il propose de me payer à boire. Je ne sais pas comment refuser. On discute. Je ne sais pas comment m'en débarasser. Je lance des regards dignes d'un chien battu à mon amie. Elle est collée à son appollon. Soit. Comment recale-t-on un mec ? Merde, je n'ai jamais fait ça. Merde, je suis un thon, merde normalement personne ne m'aborde ! Merde merde merde.
Je pense qu'il ne faut pas sous-estimer le désespoir d'une nana qui découvre le monde de la nuit et à qui on n'a pas appris les bases élémentaires du râteau. Parce que, moi, j'ai dans la tête l'image des mecs qui te baffent et t'insultent de "salope" si tu leur dis clairement "t'es moche, tu me plais pas, casse-toi".
Il me demande mon numéro. Avec le sourire, car on ne sait jamais, je lui dis de manière agréable et polie : "J'ai quelqu'un, je ne recherche personne. Je suis ici pour danser. Tu n'auras pas mon numéro et on ne se reverra pas". Il hôche la tête. Il me demande si je le trouve beau. Je n'ose pas dire non, pourtant je le pense. Si je dis "non", il va m'insulter, me découper en rondelles, faire de moi un tapis de bain. Alors que punaise, j'ai dit dès le début qu'il avait autant de chances de m'emballer que d'apprendre à voler comme un oiseau. J'ai dit que c'était NON. ET IL INSISTE. Qu'est-ce que je fais, putain, qu'est-ce que je fais ? Je retourne danser, il me suit. J'ai peur. Qu'est-ce que je dois dire, faire ?
Il me demande un "kiss". Intérieurement, je soupire. Extérieurement, je dis que c'est non. Il me dit que c'est rien, un kiss. Je dis que c'est non. Je répète pour ce qui me semble être la 320ème fois que je n'en ai pas envie, que je ne cherche personne et que je suis juste là pour danser. Il finit par comprendre quand j'appelle ma copine pour sortir, vraiment fatiguée de ce jeu qui ne m'amuse pas.
Comme par hasard, Monsieur sort à peine deux minutes plus tard et écoute ma conversation avec ma pote. Je ne peux rien dire. Il me demande de venir le voir.
Et ce qui devait arriver arriva. Je n'ai pas voulu de lui et il a insisté et je n'ai toujours pas voulu, alors d'après vous, c'est à la faute à qui ? La faute à moi. Bah, oui. J'avoue que j'aurais peut-être dû dire "mais casse-toi pauvre con, tu m'emmerdes, va crever et me soule pas". Je pensais que prévenir que j'étais en couple, que je ne cherchais personne et qu'il n'aurait rien de moi était assez clair. Visiblement pas.
Il me reproche de ne pas être honnête, de mal me comporter. Il dit qu'il est sympa, qu'il ne va pas me traiter de pute. Mais en gros, il n'en pense pas moins. Un peu interloquée, je lui demande ce qu'il y a de malhonnête à lui avoir dit que je ne cherchais personne, que je n'étais pas là pour ça, que j'avais quelqu'un, qu'il n'aurait ni bisou ni numéro ni chance de me revoir. Il continue à dire que ce n'était pas honnête. Alors, c'est officiel. Pour recaler quelqu'un, il ne faut pas dire la douce vérité, comme je l'ai fait. Pour recaler quelqu'un, il faut prendre des risques et être très méchante. Sinon, à partir du moment où l'on est polie, c'est comme ouvrir les cuisses et lui dire "tu peux venir me baiser".
C'est comme ça que je le vois. J'étais tellement soulée de cet abruti que j'ai eu l'impression qu'il m'avait gâché la soirée. Je lui ai dit que je pensais que prévenir que je ne cherchais personne et qu'il n'aurait pas mon numéro était suffisant comme paroles honnêtes, mais que je n'étais pas habituée à sortir comme ça, et que si c'était autrement qu'il fallait s'y prendre, j'en étais désolée et que je le saurai à l'avenir. Il a continué à marmonner dans sa barbe.
Dans ma tête, j'ai pensé "Mais il m'énerve, qu'est-ce qu'il m'énerve !". Si vous voulez savoir, j'avais même été jusqu'à lui dire "Mais tu sais, moi je ne veux pas, mais il y a pleins de jolies filles ici, si tu veux je t'arrange un coup". Punaise, si c'est pas PUTAIN DE CLAIR ça ? Où est-ce qu'on s'est pas compris, mon petit bonhomme ?
Il a réussi à me faire culpabiliser, me faire me remettre en question. Ma pote m'a dit "mais il est con, te prend pas la tête, tu as été honnête et il a rien pigé, c'est pas ta faute". Moi, j'avais l'impression d'avoir fait quelque chose de très mal. Alors, qu'au fond, je n'aurais pas pu être plus honnête sans devenir méchante. Ma seule faute a été de lui plaire. A partir du moment où je lui ai plu et où je ne l'ai pas envoyé balader à coup de phrases bien senties et un peu violentes, j'aurais pu dire tout ce que je voulais, c'était comme dire que j'étais à sa disposition.
NON. NON. NOOOON.
Les mecs, il va falloir qu'ils se rendent un truc dans le crâne, à coups de marteau s'il le faut : nous ne sommes pas à eux. Ce n'est pas parce que nous partons une robe, que nous dansons, que nous sortons dans un pub, que nous leur laissons porte ouverte. Si un "non" n'est pas suffisament honnête, jusqu'où faudra-t-il aller pour se faire comprendre ? Si, en disant non pendant une heure, il ne retient que la fois où je lui ai dit que oui, il était pas mal (suivi d'un "mais je ne veux pas, va chercher quelqu'un d'autre, ne perds pas ton temps"), et qu'il me rebalance à la figure pour me faire passer pour une allumeuse, que cela signifie-t-il ? Que si je ne le trouve pas repoussant et con, je suis obligée de lui rouler une pelle et de baiser avec lui dans les chiottes ?
Je me rends compte à quel point il était tordu, ce mec. Peut-être un peu dégoûté qu'une fille accepte de lui parler, mais qu'elle ne veuille pas de lui (comprendre : qu'une fille ait peur de le recaler mais pas assez peur pour se laisser faire). Il a voulu insister. Il s'est dit qu'avec un peu de corps à corps, ça finirait par coller.
Je vais même vous en sortir une bien bonne : à 5h du mat, en partant, je l'ai recroisé dans la rue. Il m'a reprise à part pour me répéter à quel point ça ne se faisait pas. Pour finir sur un : "Allez, tu ne veux vraiment pas me donner ton numéro ?". Je lui aurais éclaté la tronche contre une vitre si je n'avais pas été morte de trouille de la situation, et aussi extrêmement gênée d'être face à quelqu'un d'aussi stupide et déséspéré. Il était parfaitement au courant de tout à ce moment-là. L'obstination n'a pas toujours du bon.
Quelques mètres plus loin, son pote emmerdait ma pote, insistait pour avoir son numéro.
Lorsque nous sommes enfin parties, elle m'a dit "Holala, je comprends qu'il t'ait gâché la soirée, trois minutes avec son pote et je suis déjà soulée".
Si des mecs passent par ici, soyons claires : Non, ce n'est pas oui. Oui, ce n'est pas non. Non, c'est non. Et un non prononcé par une femme en robe qui ne te traite pas de thon, c'est un non quand même. Nous n'avons aucune foutue obligation de vouloir de vous juste parce que nous avons eu l'audace de sortir dehors et d'être honnêtes avec courtoisie.
Si j'avais été méchamment honnête, il m'aurait sans doute insultée. En étant juste honnête, j'ai eu droit au "je t'insulte pas, mais j'en crève d'envie". Alors je pense qu'au fond, comme je l'ai dit plus haut, notre plus grande faute, c'est d'être dans leur champ de vision et de leur plaire. A partir de ce moment-là, si le mec est con, tu es foutue. Tu lui a plu, ça va forcément partir en cacahuètes.
J'en parle beaucoup, car c'est la première fois que ça m'arrivait, et ça m'a beaucoup perturbée. Les "Hé mademoiselle, t'es charmante" dans la rue, je ne prends pas ça pour des râteaux. Je ne me sens pas oppressée ni rien. Les mecs t'oublient en trois minutes et récitent la même phrase à la chaîne toute la journée. Lui, s'est accroché. Et je ne savais pas comment faire. Alors je me dis qu'il faut juste se renforcer un peu, et s'habituer, si l'on veut pouvoir sortir tranquillement dehors. Parce que ce ne sont pas eux qui changeront d'attitude.
Vous avez déjà rencontré un gros crampon comme le mien ?