Tromperies sur la viande, une longue histoire

Publié le 02 mars 2013 par Eldon

Le scandale de la viande actuel n’est qu’un épisode de plus de la grande histoire des tromperies d’industriels peu scrupuleux. Jean-Louis E, que nous remercions, rappelle à notre souvenir le trafic des hormones de années 80/90, interdit par l’Union européenne et qui avait donné lieu d’ailleurs à une guerre commerciale avec les Etats-Unis, qui s’est juste terminée en 2012.

Ce trafic avait mis en lumière l’existence d’une véritable « mafia des hormones » en Europe, qui n’avait pas hésité à  commanditer en 1995, le meurtre en Belgique de Karel van Noppen, un inspecteur chargé du contrôle anti-hormones.

« La Belgique sera végétarienne, aujourd’hui, à l’occasion de l’enterrement du vétérinaire Karel van Noppen, un inspecteur chargé du contrôle antihormone, que des inconnus ont abattu la semaine dernière près de son domicile.

C’est en signe de protestation contre cet assassinat attribué à la «mafia des hormones» belge que la plupart des boucheries seront fermées ou arboreront un drapeau noir à leur devanture. Ces derniers jours, les initiatives se sont multipliées de toutes parts afin que, symboliquement, la Belgique réduise au maximum, ce mardi, sa consommation de viande. Ainsi, la plupart des cantines et restaurants du Parlement, des ministères, universités et hôpitaux du pays ont évacué toute chair animale de leurs menus à l’exception de celle de poisson.

Une réputation d’incorruptible Karel van Noppen était l’un des seize contrôleurs de l’institut d’expertise vétérinaire du ministère de la Santé, dont l’équipe antihormone a été créée en 1989. Il effectuait des contrôles dans les étables et dans les abattoirs de Flandre afin de dépister les animaux dont la croissance est artificiellement stimulée par des hormones ou des anabolisants. Il s’était bâti une réputation d’incorruptible et avait été menacé à plusieurs reprises par les trafiquants de ces produits interdits. Le 20 février, vers 19h30, alors qu’il venait de quitter son domicile, le vétérinaire a été contraint par des inconnus d’abandonner son véhicule et, à une dizaine de mètres de celui-çi, il a été froidement exécuté de trois balles. Pour la première fois depuis le début de la campagne d’intimidation lancée au début des années 90, la «mafia des hormones», comme on l’appelle en Belgique, n’a pas hésité à tuer.

Ces dernières années, on ne compte plus les incidents lors desquels des contrôleurs ont été tabassés ou ont essuyé des coups de feu. Ainsi, en septembre 1993, la maison d’un inspecteur vétérinaire a été prise pour cible, plusieurs balles transperçant les fenêtres. «Nous sommes régulièrement menacés et nous avons tous peur. Nous retrouvons nos voitures endommagées presque à chaque mission ou bien, dans les abattoirs, on bourre les poches de nos manteaux de liasses de billets pour nous corrompre», explique un vétérinaire.

Une mafia de cinquante personnes Selon plusieurs études, la Belgique est en Europe le pays où la viande est la plus spoliée par des hormones de croissance. On estime ainsi que de 25 à 50% de la marchandise vendue au détail a été piquée. Un phénomène qui s’est amplifié au cours des années 80, lorsque les trafiquants ont pu se procurer avec plus de facilité des produits prohibés sur le nouveau marché constitué par les pays de l’Est. Ce commerce est en effet entre les mains d’organisations clandestines, structurées sur le modèle de celles qui s’occupent du trafic de stupéfiants. Selon les enquêteurs, cette mafia belge des hormones ne comprendrait pas plus d’une cinquantaine de personnes, gros importateurs, distributeurs, revendeurs et détaillants. On trouve parmi eux des professionnels proches des agriculteurs: vétérinaires, pharmaciens ou vendeurs d’aliments pour bétail.

Législation très sévère Pour lutter contre ce trafic, le ministère de la Santé s’est doté, en octobre 1994, d’une nouvelle législation qui compte parmi les plus sévères en Europe. Ainsi, la peine maximum encourue par les trafiquants est passée de trois mois à cinq ans de prison et les amendes sont également bien plus lourdes. C’est sans doute sous la pression de cette nouvelle loi que les trafiquants ont intensifié menaces et intimidations, sacrifiant la vie de Karel van Noppen à titre d’exemple.

«Il faut frapper là où cela fait le plus mal», a déclaré le ministre de la Santé, Jacques Santkin, après l’assassinat du vétérinaire. La découverte d’un seul animal déclaré positif pourra désormais conduire à l’abattage de toutes les bêtes d’un propriétaire de bétail. Quant aux vétérinaires, ils seront mieux protégés et accompagnés de gendarmes durant leurs contrôles.

Sylvain EPHIMENCO »

Source: Libération - LaLibre.be 

Nota bene: le trafic d’hormones  et l’affaire Van Noppen ont  inspiré un excellent film « Bullhead« , sélectionné pour l’Oscar du meilleur film étranger en 2012 dont voici un extrait.

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