Rien ne m'arrête, je peux parler des heures et des heures, je peux vous dire les plus belles choses que j'ai vécues, je peux vous raconter la lune que je ne réussis pas à saisir, je peux vous décrire les après-midi de pierre que je passais à regarder le ciel, je peux retourner en arrière, vite, vite, défier l'instant et retrouver mon émoi, je peux vous imaginer sans moi et vous marquer dans mon coeur, je peux regretter mes mélodies et regratter ma guitare.
J'existe parce que je voyage. Parce que je m'échappe. Je fuis mon propre miroir. Je refuse de m'y voir dedans. Je cours jusqu'à en perdre haleine, jusqu'à m'en faire mal, jusqu'à en pourrir de rire. Je cours pour oublier, me fatiguer, vibrer, me désinquiéter. Je cours comme un imbécile qui ne sait pas s'arrêter. Je cours sans souffler jamais. Je vais dans les rues, je croise des regards hagards, des pauvres hères qui savent ce que souffrir veut dire, je croise des regards effrayés et des corps broyés, je pleure et je prie pour que ce ne soit jamais moi, je prie pour que ce ne soit plus jamais eux, j'ai mal à mes yeux. Et à leurs yeux, qui suis-je? Depuis ma prime jeunesse, je prie, je prends, j'attends.
Un jour, je ne courrai plus, je serai à l'arrêt.