Le disquaire Other Music, avec ses jolis bacs à vinyles d’Animal Collective et ses showcases de Julia Holter, pourrait être le décor tout mignon d’une sitcom parfaitement générique et consensuelle consacrée à la culture branchée/underground/hype/tête-à-claque new-yorkaise (à quand un épisode de Girls là-bas, avec un cameo de Mac DeMarco ?). En effet, situé en plein milieu de NoHo, entre deux bâtiments de NYU et en face d’une salle de fitness pour traders buveurs de smoothie et executive women façon « hard bodies » d’American Psycho, Other Music ressemble à la cible parfaite pour nos amis les haters. Mais laissons les haineux haïr et intéressons-nous plutôt au versant label dont la boutique s’est dotée l’an passé.
Première signature de Other Music Recording Corporation, les rockers brooklynois psyché-pop et rétro-modernes d’Ex Cops viennent de sortir True Hallucination, un recueil de belles chansons positivistes qui respirent l’artisanat d’excellente facture. Rempli d’influences ensoleillées, ce premier album est un hommage guilleret aux grands de la pop qui grignotent des acides. Néanmoins, grâce à leur inventivité, Ex Cops réussissent à éviter le pastiche et la révérence.
Certes, Ex Cops peut faire penser à encore tellement d’autres choses (XTC, les compiles Nuggets, The Stone Roses, The Beta Band, Sonic Youth, The Chills, Nick Lowe…) qu’on pourrait se demander à quoi sert tout ce beau bruit. On pourrait aussi décider de s’en foutre et d’être bien content d’avoir de nouvelles bonnes choses à écouter pour se rappeler, en plein hiver, que le printemps reviendra. L’écueil du beau gratuit et poli, c’est en effet le problème de l’artisanat, du savoir-faire et des belles productions de studio (derrière les manettes, c’est John Siket, producteur, entre autres, de Dirty de Sonic Youth et de pas mal de Yo La Tengo et de Blonde Redhead). Mais entre deux albums de revival synth/goth/cold wave comme il en sort dix par semaine depuis trois ans, sourire à l’écoute de belles guitares, de batteries 100% humaines et de synthés analogiques épais et, surtout, chaleureux, ça fait drôlement du bien.
En une demi-heure de fuzz et de réverb’ à la Beach Boys, Ex Cops construit un édifice solide dédié au pouvoir médicinal de la pop à papa. Aussi, pour guérir votre apathie citadine, vous prendrez un bonne dose de Ken, single galopant, construit selon le modèle classique couplet à la coule/refrain tête dans le guidon ; quelques gouttes de James, chanson aérienne, fantaisiste, généreuse au possible et dotée d’un pont que les Kinks auraient pu composer s’ils s’étaient formés en 1989 ; deux-trois cuillères de Spring Break, malicieux duo masculin-féminin avançant les pieds dans l’eau et le sourire/le blunt aux lèvres ; et vous complèterez le tout avec quelques granules de The Millionaire, mélopée opiacée menée par un synthé tellement océanique qu’on pourrait s’y noyer.
Allez, bande de relous, laissez tomber votre posture de mec torturé, trouvez-vous un(e) amoureux(se) pour le retour du soleil et partez en balade en écoutant Ex Cops.
Vidéo
Tracklist
Ex Cops – True Hallucination (Other Music, 2013)
1. S&HSXX (Intro)
2. Ken
3. James
4. You Are a Lion, I am a Lamb
5. Separator
6. Spring Break (Birthday Song)
7. Jazz & Information
8. The Millionaire
9. Billy Pressly
10. Nico Beast
11. Broken Chinese Chairz