Magazine Journal intime

Mémoire

Par Kasey

... C'est quelque chose d'étrange la mémoire.

Par exemple, je suis incapable de retenir quoique ce soit par coeur. La traumato est par exemple une matière que j'exècre : des dates, juste des dates et pas assez souvent de raisonnement logique pour les justifier. Du coup, cela fait beaucoup de données à seulement apprendre par coeur quand en fait, le kinésithérapeute n'a qu'à se fier à sa conscience professionnelle et les ordres du chirurgien. Ce qu'il fait à moins d'avoir de l'expérience comme cela se voit dans certains hopitaux.

Y a deux ans, je crois, mon père parlait avec ses frères d'un fait qui avait eu lieu y a plusieurs années de cela. J'étais une toute petite fille, moins de 7 ans. Et ils ont été surpris, que je leur dise tout ce que je me souvenais de ce jour dans le moindre détail. Tout comme je me souviens dans le moindre détail du corps de mon grand père que j'ai retranscris pour un devoir de francais.

Les souvenirs appartenant à la mémoire épisodique, je ne les oublie que rarement.

J'ai juste à fermer les yeux, et je vois les évênements revenir, parfois au compte goutte, parfois comme un film.

Avec mon ex, on en avait parlé, quand je cherchais à savoir ce dont il se souvenait avant son kidnapping, et même après. Mais, il n'avait aucun passé. Aucune mémoire. Rien de cette époque. Aucun souvenir.

Quand j'écris un roman, un texte... l'histoire, elle se déroule sous mes yeux, comme si elle existait vraiment. Comme si elle était en train de se produire pour de vrai. Parfois, je marche dans la rue et des images me viennent. Des images qui finalement n'ont jamais existées et qui m'indiquent la suite de l'histoire à écrire...

Bones m'a demandée si j'avais des carnets pour me souvenir de tous les détails.

Mais il y a pas de triche là dedans.

Je mentirais si je disais que je me défoule jamais dans des carnets... Sur mes histoires, y a trois carnets. Ca a commencé comme un jeu avec une amie de l'IFMK. On avait dit qu'on ferait comme un roman qu'on avait lu. On écrirait chacun notre stage... et on s'échangerait les carnets.

Il s'est trouvé que pendant ce stage, j'ai fait une rencontre...

Alors, c'était amusant de retranscrire des bouts de vie dedans...

Pour Bones c'est différent. Au début de notre relation, j'ai pété un cable un nombre incalculable de fois. Et un jour, j'ai écris un mail que j'aurai pas du écrire. Et il a menti délibéremment en disant ne jamais l'avoir lu.

Ce jour là, je me souviens pas de ce qu'il m'a envoyée comme réponse. Je me souviens juste que j'étais au bord des larmes. Et que je me suis pelotonnée en haut des escaliers en relisant son texto encore et encore, comme si j'avais besoin de le lire pour voir que j'avais dépassé les bornes.

Ma meilleure amie m'a dit d'arrêter. Et que si je voulais vraiment lui parler, d'écrire mais de pas lui montrer ce que j'écrivais. Et au final, cela s'avère une bonne solution. Je me défoule bien. Ca fait sas de décompression.

Et étrangement, cela m'aide.

Il suffit que j'écrive avant ce que je pense, ce que je digère pas... pour avoir le courage, ou les idées plus calmes pour lui en parler après de visu.

Pourtant, y a pas de détails dans ce carnet... Les détails, j'ai juste à fermer les yeux, pour revoir des images... des émotions... 

Depuis que je suis petite, les choses trop heureuses ou trop tristes, je suis incapable de les écrire. J'y arrive pas. C'est comme si je faisais des blocages. Par contre, je les revois dans ma tête.

Ces derniers temps, je fais beaucoup de cauchemars, éveillés ou la nuit... Ils augmentent dès que mon ex revient... Je voudrais qu'il sorte de nos vies à moi et Crap. Je voudrais vivre dans une bulle où je me sentirais en sécurité, ou je pourrais protéger mon fils. De lui. De sa famille. De son milieu. De sa folie.

Binome dit que ca se voit en cours quand je vais pas bien lorsqu'on aborde les handicaps psychiques. Mais comment un professionnel de santé est censé agir vis à vis de choses qui déclenchent juste la peur, la panique, la colère...

En tant que professionnel de santé, je devrais être neutre.

Ne rien ressentir.

Les considérer comme des êtres humains.

Des gens biens.

J'en suis incapable.

Quand j'entends le mot " skizophrène " je revois deux images. Ma meilleure amie changée après son aggression me raconter, voir sur son visage... Ces souvenirs.

Et je me revois enceinte de sept mois poussée dans l'escalier. Je revois combien j'ai du prendre sur moi pour ne pas réagir. Pour réfléchir à mes actes en retour alors que j'avais peur. J'ai vraiment eu peur de mourir ce jour là. Avec mon bébé. Pendant ces 4 jours, je me suis sentie impuissante. Violée dans mon milieu de vie. Dans ma vie. Dans mon espace de sécurité.

Je me suis sentie tellement minable, tellement impuissante pour protéger ma vie et celle de mon fils.

Je me revois plaquée contre le mur alors qu'il essayait encore de m'embrasser et que je disais " non " que je disais " sors de chez moi "... Je me revois à essayer de le tirer, le pousser de mes 70kg et même pas y arriver.

Je revois les jours qui ont suivi, les coups de fils en pleine nuit, les sms sur le portable... tout cela... c'était horrible. Je revois la peur, les tremblements...

Et ma psy qui disait " vous êtes courageuse ".

Tout cela... je le vois chaque fois que mon ex m'envoit un message. Chaque fois qu'on prononce son nom. Chaque fois qu'on me parle du père de mon enfant. Chaque fois que sa soeur me traite de salope. Et que moi, je me retiens de lui dire que son frère chéri m'a plaquée contre un lit pour m'embrasser de force alors que je pleurais, que je disais " non "...

Et qu'il m'a menacée de mort dans les vingts minutes qui suivent quand j'ai réussi à me dégager.

Qu'il a menacée de se tuer et de me faire porter le chapeau.

... Quand je ferme les yeux, si je le voulais, je pourrais me rappeler les bons moments... Quand j'ai appris que j'étais enceinte, j'y ai pas cru. Je comprenais pas. Le test de grossesse était négatif et mon ex était impuissant. Mais cela, est ce que cela se dit ? Alors, quand j'ai fait les calculs... au fond c'était pas trop dur de voir quelles étaient les dates possibles pour que Crap soit concu.

Ce qui me rend peut être encore plus en colère.

Parce que tous ces souvenirs, il les a détruit. Par son comportement. Par sa maladie. Par sa famille. Par la peur qui m'assaille chaque fois qu'il me demande des nouvelles du " petit ". Chaque fois que sa soeur m'appelle avec toujours le même refrain aggressif que je suis une salope, que je suis la méchante, que je suis celle qui est responsable que son frère chéri soit interné en hopital psychiatrique.

Mais y a aucun des deux, qui n'a songé à moi.

A ce que je ressens en tant que mère, à me dire que mon fils pourrait devenir comme son père et son grand père...

Ce que cela fait de voir son fils grandir... et se dire que tous ces bons moments... c'est peut être que " du vent ". Qu'un jour, il finira comme son géniteur.

Que je devrais faire face à la même situation.

Avoir tous ces souvenirs heureux ou plutôt joyeux, et les voir remplacer par des souvenirs hideux.


Parce que la journée où Crap a probablement " vu le jour "... cette période là, j'étais heureuse. Je me souviens qu'on était chez son meilleur ami. Je me souviens que j'avais une jupe courte. Je me souviens qu'on déconnait sur les fantasmes qu'il avait. Je me souviens qu'il me parlait d'une jupe en cuir rouge. Je me souviens de mon rire. Je me souviens de m'être mise entre ses genoux pour l'embrasser. Je me souviens qu'il m'est dit vouloir venir chez moi. Je me souviens avoir pris mon téléphone pour demander à ma mère si c'était possible. Je me souviens sa joie quand il a dit à son pote qu'il dormait pas chez lui cette nuit. Je me souviens qu'il était allé dans sa chambre récupérer des affaires. je me souviens qu'avant qu'on porte, il est soulevé mon tshirt, ses lèvres se posant sur mon ventre, alors que je le repoussais en riant. Parce qu'il était juste ingérable. Et son pote revenir, et dire " je vous dérange ". Je me souviens qu'on riait bien tous les trois.

Et pourtant... à cause de tout ce qui s'est passé après...  la seule chose que je peux me rappeller à chaque SMS, c'est la peur.

La peur qui s'engouffre, qui forme comme une chappe de plomb.

Et qui me rappelle qu'il est malade.

Qu'il est responsable de sa maladie.

Mais que la part génétique de ce cauchemar fait que mon fils peut subir le même sort.

Qui me rappelle toutes les fois où il a pris des risques avec sa vie. Qui me rappelle tous les actes de délinquances qu'il a commis après notre relation, et qui font que il n'est pas digne de confiance. Que mon fils est en danger.

... je voudrais dire à mon fils que j'ai aimé son père.

Je trouverais cela plus juste.

Pour lui.

De ne pas être juste un accident.

Je voudrais pouvoir le protéger.

Parce que c'est la chose la plus importante de ma vie.

Et pourtant, je suis impuissante.

Impuissante à le protéger. Parce que je sais que je pourrais me le dire, encore et encore... C'est une illusion. C'est quelque chose que je ne peux lui promettre. Tant que mon ex sera vivant. Tant que sa famille sera vivante. Je ne pourrais pas le protéger. Pas vraiment. Je pourrais faire ce que je peux à mon échelle. Mais cela reste là.

Le plus drôle, c'est que la raison qui fait que mon père refuse de me parler depuis deux ans.

La raison qui fait que je n'ai plus le droit de voir mon frère, c'est que mon père a estimé que j'étais un danger pour son fils car ce dernier ne pourrait comprendre qu'un enfant est pu avoir lieu loin des clichés de famille heureuse et parfaite avec un papa et une maman qui s'aiment.

Sachant que j'ai grandi dans une famille, où j'ai toujours douté de l'amour liant mes parents... c'est comique.

Et pourtant, je sais que je mentirais si je disais que j'aimais mon ex.

Parce que quand je vois l'état dans lequel je suis chaque fois que je pense à rompre avec Bones... J'ai jamais eu à faire face à ce genre d'émotions. Je me sens tellement perdue. J'ai jamais eu ce genre d'émotions aussi fortes pour un homme avec qui j'ai pu sortir. De même que quand une partie de moi se sent dépendante de Bones. Et quelque part, est vraiment heureuse avec lui. Quand elle entend sa voix, quand elle a des nouvelles, quand elle le voit...  Toutes ces émotions contre lesquelles je me bats parce que je sais que cela n'a pas d'avenir et que cela fera mal à la fin... c'est cela que j'appelle aimer.

C'est une émotion similaire à celle que je ressens pour mon fils.

En moins puissant.

Mais qui entraine les mêmes détresses. Les mêmes joies. Les mêmes gestes.

Et tout cela, je l'ai jamais ressenti pour mon ex.

La mémoire c'est quelque chose qui fait... que les émotions ne s'éffacent jamais.

Alors que ce qui s'est passé quand j'étais enceinte, je voudrais juste l'oublier. L'effacer.

Effacer la peur. Effacer la colère. Effacer les images, les sons de sa voix... Parce que je me souviens d'avoir été désemparée qu'il ne soit plus " comme avant ". Que j'avais peur de lui. Que je n'avais plus confiance. Que j'avais peur pour moi. Et pour lui.

Que la prochaine tentative de suicide soit la bonne.

Et le pire, c'est que cette menace qui plane quelque part toujours... c'est une manipulation de plus.

Et j'ai horreur qu'on me manipule.

Cass.


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