Nous pourrions nous féliciter qu'enfin le Sénat ait voté la proposition de loi d'amnistie des syndicalistes. Et que la gauche parlementaire ait été unie pour voter un texte de gauche qui protège l'intérêt général, c'est-à-dire celui des salariés, de leurs représentants, et des citoyens en lutte...
Sauf que ce ne fut pas évident.
Il a fallu que le Front de gauche jette toutes ses forces pour que la mobilisation oblige le parti socialiste à bouger.
Sauf que c'est une victoire à la pyrrhus.
Le texte présenté par les parlementaires communistes et du Front de gauche a été fortement amendé. Autant dire que le PS a fait le minimum du minimum syndical !
Ne sont concernés par ce texte - qui reste à être voté dans les mêmes termes par l'Assemblée nationale et appliqué par décret - que les actions sur le logement et lors de conflits du travail, d'activités syndicales de salariés et d'agents publics, y compris lors de manifestations.
Tous les camarades poursuivis en justice et condamnés pour des actions concernant l'éducation, la santé, l'environnement et les droits des migrants ne sont pas amnistiés... Le champ d'application du texte a donc été considérablement réduit.
On ne peut qu'en déduire que pour le Parti socialiste et le gouvernement et son président, les domaines précités qu'ils ont ôté du texte ne peuvent faire légitimement l'objet d'actions citoyennes. Et qu'ils sont exclusivement de la compétence de spécialistes et d'une espèce d'aristocratie ou de noblesse...
Circulez, y' a rien à voir !
Votée le jour du décès de Stéphane Hessel, cette proposition de loi permet de mesurer combien la résistance du parti socialiste au pouvoir de l'argent, du MEDEF et de l'oligarchie est très très relative.
Alors oui, on ne peut que se féliciter que le Front de gauche existe. Que sa présence au Parlement gène la politique de collaboration du PS dans l'œuvre de destruction sociale engagée par le MEDEF.
Qu'effectivement de manière générale, un sénateur ou un député du Front de gauche est bien plus utile à l'intérêt général qu'un socialiste godillot aux convictions sociales tièdes, fadasses, voire inexistantes dont le plan carrière n'est pas forcément compatible avec les intérêts des travailleurs, surtout en vue d'une reconversion professionnelle dans une multinationale à un poste élevé ou d'une nomination dans un conseil d'administration d'une firme du CAC 40...
On ne peut que regretter la faiblesse parlementaire du Front de gauche. Nul doute que si ce dernier possédait une minorité de blocage à l'assemblée nationale, la politique de Hollande serait soit différente, soit identique mais avec une majorité PS-UMP comme en Grèce.
Toutefois, malgré l'enfumage médiatique et certaines mesures purement symboliques, les masques commencent à tomber.
Les femmes et les hommes de gauche, les syndicalistes et les citoyen-ne-s frappées par l'injustice se satisfont de moins en moins de ce mieux que rien... qui ressemble tant à la droite et à la régression sociale.