Un petit jouet mécanique de Marie Neuser

Par Sylvie

ROMAN NOIR

 

Editions de l'Ecailler, 2012

Voici le deuxième opus d'une jeune professeur d'italien marseillaise qui avait fait parler d'elle avec son premier roman Je tue les enfants français dans les jardins, un roman politiquement incorrect où une enseignante perd pied devant sa classe d'ados ultraviolente....)

 

Il s'agit ici d'un drame intimiste sous la chaleur torride d'un petite village corse, Acquargento. Anna revient dans la maison familiale abandonnée, accompagnée de son mari et de son fils. Il faut épousseter, réparer, assainir...Lorsqu'en ouvrant un placard, elle aperçoit le petit canard mécanique rouillé, le passé ressurgit soudain, l'été de ses 16 ans. ...

 

16 ans, le baladeur sur les oreilles à écouter les tubes de Nick Cave, à rêver de passer ses vacances dans une capitale telle Londres ou New-York. Au lieu de cela, Anna est condamnée à rester avec ses parents dans la vieille bicoque familiale délabrée au fin fond des collines corses. Alors, elle se réfugie dans le "Cosmos", autrement dit le grenier, pour dessiner ses croquis...pendant que son père picole et que sa mère joue du piano pour oublier.

 

Le morne quotidien va être bouleversé lorsque la soeur aînée, Hélène, va débarquer avec Léa, son bébé d'1 an. Ce débarquement, Anna le voit d'un mauvais oeil. Car la soeur aînée, plus de 10 ans plus âgée, est tout le conraire d'Anna.

Hélène est la bimbo maquillée, inculte. Anna est l'artiste intello incomprise, gothique à ses heures. Hélène est la préférée. Mais Anna se prend tout d'un coup d'affection  pour sa petite nièce.

 

Et surtout, elle remarque un comportement suspect de sa soeur : celle-ci expose le bébé au soleil, elle la laisse courir jusqu'à un précipice...Mais Anna est la seule à saisir ces petits détails. Alors elle va tout faire pour éviter le pire...

 

En un peu plus de 100 pages, Marie Neuser réussit un tour de force psychologique : l'auteur excelle à décrire les états d'âme d'une adolescente de  16 ans, mal dans sa peau, qui va découvrir peu à peu le sens des responsabilités face à un drame familial.

 

Elle arrive à mettre une distance avec son double adolescent en utilisant le "Vous". Il en ressort une puissante acuité visuelle (magnifique description des paysages corses) et une tension psychologique haletante ; la description des soupçons envers sa soeur est entrecoupée des premiers émois de l'adolescente sur la plage.

Le "Vous" se répétant sonne comme une mélopée bien rythmée, mettant à distance ces événements funestes que l'on tentait d'oublier, en vain...

 

Un jeune auteur à suivre.