Matthieu Lucas : "En Australie, il y a quelque chose en plus !"

Par Titus @TitusFR
Bassiste résidant aujourd'hui à Angoulême, Matthieu Lucas n'en est pas moins l'un des pivots de la formation de rock australien The True Believers qui accompagne Carus Thompson en tournée dans le monde entier. Voilà qui en soi n'est déjà pas banal. Le musicien français qui a fait ses classes au prestigieux collège Berkeley de Boston explique la raison de sa présence au sein de ce groupe des antipodes, à laquelle une histoire d'amitié n'est pas tout à fait étrangère...

Titus - Matthieu Lucas, vous faites partie de l'ossature des True Believers, aux côtés de musiciens australiens. Pouvez-vous raconter les circonstances de votre rencontre avec Carus Thompson ?
J'ai rencontré Carus à l'occasion de ses premières tournées enropéennes, quand il était juste avec sa guitare et son sac à dos, à la roots. Mon cousin et lui sont amis depuis l'enfance à Fremantle, donc quand il est arrivé en Europe en 2003, j'ai organisé des concerts pour lui en Charente, et nous sommes restés en contact jusqu'à fin 2006, au moment où j'ai rejoint le groupe. Son ancien bassiste a quitté le groupe assez soudainement et je lui ai proposé de le remplacer. Cela paraissait un peu fou mais l'idée a germé et je suis parti en Australie pour ma première tournée en février 2007.
Titus - J'aimerais que l'on revienne un moment sur votre propre parcours de bassiste. Vous souvenez-vous de la première fois où une basse vous est tombée entre les mains ?
Je suis pianiste de formation. En 1993-94, j'ai tourné en France comme conférencier (avec un film documentaire). Etant tous les jours sur la route je n'ai pas pu prendre mon piano avec moi !... J'ai acheté ma première basse à Marseille, début 94, et j'ai immédiatement su que j'avais trouvé mon instrument. J'ai commencé à travailler tous les soirs à l'hôtel après les conférences, j'étais accro. J'avais juste un ampli casque, un lecteur CD portable et ma basse... Et des disques de Jaco Pastorius... J'ai toujours été sensible à la basse dans mes années de pianiste, jouant beaucoup de jazz et ayant deux de mes meilleurs amis qui étaient bassistes. Adolescent, mon professeur de piano (il était beaucoup plus que ça , je devrais dire mon mentor...) était un ancien contrebassiste.
Titus - Quel parcours avez-vous suivi pour devenir musicien ? Avez-vous toujours vécu à Angoulême ?
J'habite à Angoulême seulement depuis 2000. J'ai longtemps vécu sur la Côte d'Azur, à Nice, ainsi qu'à Paris et en Afrique, petit. J'ai commencé la musique par l'orgue à 10 ans et je suis passé au piano vers 16 ans. J'ai eu la chance d'étudier au prestigieux Berkeley college of music de Boston, en piano, puis à la basse...
Une vidéo de Carus Thompson & The True Believers filmée à Hanovre, en Allemagne, le 24 mai 2007, où l'on peut apprécier un excellent solo de Matthieu Lucas à la basse :

Titus - Qu'écoutiez-vous lorsque vous étiez jeune ? Etiez-vous déjà interessé par la musique australienne ? Avez-vous évolué au sein de différents groupes français avant de vous joindre aux True Believers ?
J'ai été formé (déformé ?) par le jazz dans toutes ses tendances. J'ai aussi beaucoup écouté (et écoute toujours) de musique latine (salsa et musique brésilienne). Je suis tombé dans le rock très tard, en 2002, à la création du groupe Kartel. J'écoute maintenant beaucoup de pop/rock anglais. J'adore également le gospel et le chant a cappella en général. J'ai chanté avec le groupe de gospel Sankofa de 1998 à 2007. J'arrange maintenant pour le groupe. Je découvre depuis un an la richesse de la musique australienne. Le pays fourmille d'auteurs-compositeurs-interprètes de talent. Je pense que cela doit être une des plus importantes concentrations au monde par habitant (ils sont seulement 20 millions) je suis devenu fan de beaucoup d'entre eux ! Carus, of course (oui, je joue avec lui et en plus j'aime sa musique...), Loren, Rob Sawyer, Jess McAvoy, Carolyn Oates, Neil Murray, John Butler Trio, The Waifs, etc.
Titus - A quand remonte votre premier voyage en Australie ?
Je suis allé pour la première fois en Australie en 1989, en vacances. Je n'y étais jamais retourné avant l'année dernière.
Titus - Quel regard portez-vous sur ce pays, le mode de vie à l'australienne ?
J'adore l'Australie. Le fait que je sois bilingue aide, bien sûr. j'ai toujours été à l'aise dans les pays anglo-saxons. Mais en Australie, il y a quelque chose en plus. En plus, j'y voyage maintenant comme musicien en tournée, ce qui est à peu près la meilleure vie du monde ! Et ce qui me permet de voir plein de coins que j'aurais probablement ratés comme touriste. Puis je suis tous les jours avec des Australiens, donc l'expérience est complète... A chaque fois que je reviens en France, je trouve les gens stressés et cela me donne envie de retourner là-bas de suite... J'y retournerai probablement de manière quasi permanente, dans le futur.
La vidéo de "Broken song", de Carus & The True Believers :

Titus - Lorsque vous décidez d'écrire à Carus pour lui proposer de remplacer le bassiste qui venait de quitter la formation, quel était votre état d'esprit ? Pensiez-vous que Carus allait répondre favorablement ?
J'avais envie de bouger. J'étais un peu miné par mes expériences de groupe en France, avec des gens très difficiles à motiver. En plus, comme je l'ai dit, j'aime vraiment beaucoup la musique de Carus, ainsi que le personnage lui-même. Beaucoup de musiciens français devraient prendre des leçons sur les Australiens sur la manière de gérer leur business et leur présence scénique !
Titus - Comment cela s'est-il passé ? Etes-vous allé en Australie pour faire un bout d'essai ?
Non, j'avais déjà joué avec Carus en France, donc il me connaissait musicalement. Il m'a juste demandé si j'étais prêt à m'adapter à son optique de "less is more", c'est à dire de ne pas surjouer la musique et d'aller à l'essentiel. Ca s'est très bien passé, même si nous ne sommes pas d'accord sur tout, mais nous sommes assez grands pour savoir accepter nos différences.
Titus - Qui sont les autres membres du groupe et quelles sont vos relations avec eux ? Notamment durant vos tournées, qui sont plutôt nombreuses ?
En Australie, le batteur est Jason McGannet; le violoniste - mandoliniste - pianiste est John Bedggood, dit "Bedge". Ils sont vraiment cools en plus d'être d'excellents musiciens. Jason est le premier batteur du John Butler Trio et Bedge joue avec à peu près tout ce qui se fait de mieux sur la scène folk-rock australienne. Nous avons passé beaucoup de temps ensemble en tournée en 2007 - environ six mois - et ça a été une expérience incroyable. Tout le monde a, bien sûr, des hauts et des bas mais, dans l'ensemble, nous n'avons jamais eu de gros problème. J'ai beaucoup traîné avec Jason (basse-batterie...) et c'est quelqu'un que j'adore. Pour cette tournée européenne, la formation va être différente. Carus amène son frère, Christian, pour officier à la deuxième guitare et aux choeurs et le batteur sera Christophe Baillet. Christophe est le batteur de mon ancien groupe de rock, Kartel et compte parmi mes meileurs amis. J'en ai peu. C'est la raison pour laquelle je lui ai proposé de se joindre à nous pour cette tournée. En plus c'est un excellent batteur ! Nous avons enregistré vite fait basse/batterie pour Carus et il a dit ok !
Titus - Lorsque vous regardez en arrière, êtes-vous satisfait du chemin parcouru avec Carus et les True Believers ?
Cela fait seulement un an que je suis dans le groupe. C'est passé très vite et, en même temps, le fait de bouger en permanence rend le temps élastique. J'ai tellement parcouru de kilomètres en 2007 que j'ai l'impression de faire partie du groupe depuis beaucoup plus longtemps ! Mais le plaisir est intact, j'ai hâte de repartir en tournée !
Titus - Avez-vous participé à l'enregistrement du dernier album de Carus, "Three Boxes" ? Pour moi, cet album est celui de la maturité. Une unité de ton est perceptible. Quel est votre sentiment sur ce disque et sur l'évolution de l'écriture de Carus ?
Non, je suis arrivé après la fin de l'enregistrement de l'album. Il est certain que cet album est beaucoup plus abouti que les précédents. Surtout au niveau production. Les morceaux ont été pré-produits à Melbourne, surtout chez Jason qui a un home studio, pour ensuite être enregistrés dans un bon studio avec Greg Arnold comme réalisateur artistique. le mixage a été réalisé à Nashville, ce qui a apporté une couleur différente. L'ingé son du mixage a aussi amené 2 ou 3 petites choses qui font vraiment la différence. Carus arrive à écrire des choses très simples mais intéressantes. Il ne faut pas oublier son background. il vient du folk, influencé par Dylan ou Springsteen. Souvent l'accent est mis sur le texte, et la musique se doit de rester assez simple harmoniquement et mélodiquement.
Titus - Lors de son premier passage en Bretagne, l'an dernier, Carus était seul sur scène. Cette fois, le 26 avril, les True Believers l'accompagneront. Comment vous sentez-vous à quelques jours du lancement de cette tournée européenne qui s'annonce comme la plus fournie dans l'histoire du groupe ?
J'ai hâte d'y être! Cela va être différent de ce que nous avons fait jusque là de par le changement de musiciens. ce sera peut-être plus rock avec deux guitares, quoique Carus a acheté une mandoline et compte bien s'en servir! Je suis très heureux de faire cette tournée avec Christophe, cela va rétablir l'équilibre. Deux Français contre deux Australiens; on va bien se marrer !
Titus - Dans une première interview, l'an passé, Carus nous avait dit que le fait d'avoir un Français dans son équipe était un bel atout pour tenter de percer dans l'Hexagone. Quel accueil le public français vous a-t-il réservé jusqu'ici ?
Pour l'instant, nous jouons très peu en France. Je n'ai pas vraiment eu le temps de démarcher ici, étant beaucoup en tournée mais je compte m'y mettre à l'automne, pour 2009. Le problème, en France, c'est que beaucoup de festivals et salles sont verrouillées par les tourneurs, donc il faut batailler ferme...
Titus - Quels sont vos projets personnels ? Avez-vous l'intention, a priori, de poursuivre votre bout de chemin avec les True Believers ?
J'ai appris récemment que je vais être papa à la fin de l'année, donc c'est un projet qui risque de me prendre un peu de temps ! Mais j'espère pouvoir continuer à jouer avec Carus ! Je n'ai plus de projet personnel ici en France pour l'instant, si ce n'est la musique que j'écris régulièrement pour France 3.
Autre performance "live" de Carus, sur la chanson "Last days of winter" :
PRATIQUE
En concert à CAST (près de Châteaulin, à 10 mn de Quimper) le samedi 26 avril 2008, à 21h.
Infos complémentaires sur le site MySpace des Vaches folk.
Tarifs : 13 € / 15 € (+ frais de location);
Points de location : Brest : Dialogues Musiques (+1 €); Quimper : Harmonia Mundi (+0 €); Cast : Mairie (+0 €), bar-presse « le Toon’s » (+0 €). Réseau Ticketnet (utilisez le mot-clef "Carus" dans votre recherche) (+1,7 €)