"Dimanches de cons" ou "quand on pose un lapin à Verlaine"

Par Absolut'lit @absolute_lit

Allez, c'était trop beau ! Ça m'énerve ! Si j'l'intéressais pas du départ, l'avait qu'à l'dire, au lieu de me donner son numéro, après qu'j lui ai fait le mien. J'lui ai fait pitié oué, ça doit être ça. "Oh le pauv'garçon qui s'est donné du mal, on dirait qu'il a appris son texte par cœur, qu'il prépare ça depuis des semaines, comme un vieux rêve d'acteur jamais réalisé".  J'suis sûr que c'est un numéro bidon en plus... ma foi ça aura au moins fait rire quelqu'un... ou encore mieux, elle organise des « dimanches de cons », comme les dîners, sauf que là, y a que le con qui ronge son os... C'est bien la dernière fois que j'participe à c'genre de truc.. le speed-dating, c'est comme un CV, plus t'es original, moins tu plais...

Tu es là, assis à la table du café d'en face, sirotant ta rancoeur et sa mousse d'amertume, café où tu lui as donné rendez-vous, à la fin du message que tu lui as laissé, hier, sur son répondeur. Tu gribouilles quelques phrases, s'en t'en rendre compte, sur la nappe en papier, absorbé par l'échec présumé :


Et je t'attends en ce café,
Comme je le fis en tant d'autres,
Comme je le ferais, en outre,
Pour tout le bien que tu me fais.

Tu sais, parbleu ! que cela m'est
Egal aussi bien que possible :
Car, mon coeur, il n'est de telles cibles...
Témoin les belles que j'aimais...
Et ce ne m'est plus un lapin
Que tu me poses, sale rosse
C'est un civet que tu opposes
Vers midi à mes goûts sans frein.*

Blasé comme il se doit, tu demandes l'addition, que tu estimes avoir pourtant déjà assez payée.. Et, alors que tu te lèves, pour mettre ta veste (l'une de celles que tu as prises aujourd'hui), une jeune femme, s, ni tout à fait la même, ni tout à fait une autre que celle que tu aimes, entre, et s'avance vers toi. Tu demandes au serveur une autre nappe.

(*: Minuit, extrait de Chair)