Ballad of the Absent Mare

Publié le 23 février 2013 par Polyphrene

Say a prayer for the cowboyHis mare's run awayAnd he'll walk till he finds herHis darling, his strayBut the river's in floodAnd the roads are awashAnd the bridges break upIn the panic of loss.And there's nothing to followThere's nowhere to goShe's gone like the summerGone like the snowAnd the crickets are breakingHis heart with their songAs the day caves inAnd the night is all wrong[]Now the clasp of this unionWho fastens it tight?Who snaps it asunderThe very next nightSome say the riderSome say the mareOr that love's like the smokeBeyond all repairBut my darling says"Leonard, just let it go byThat old silhouetteOn the great western sky"So I pick out a tuneAnd they move right alongAnd they're gone like the smokeAnd they're gone like this songEst-ce bien le même Léonard Cohen qui, dans “The Captain”, évoquait sur le ton de la dérision les chansons de “Western Country”, et qui nous offre ici une ballade sur le thème on ne peut plus classique du cowboy et de son cheval ?Plus qu’une chanson, c’est un véritable film, dont il décrit avec minutie le décor et les scènes, jusqu’au plan final du cowboy solitaire qui s’éloigne et disparaît…Si l’ironie est présente, elle ne se déclare que dans les dernières lignes, citant les mots de sa compagne qui se moque gentiment de « ses vieux clichés ».Mais pourquoi donc cette chanson ? Est-ce un hommage de Léonard Cohen à ce genre et ses auteurs (de la même façon qu’il évoquait avec respect Hank Williams dans « Towerof Song ») ? Est-ce un essai, lui permettant d’apporter au genre son propre style, et de jouer, au delà des clichés, sur la nature et l’ambivalence des liens entre le cavalier et sa monture, pour disserter sur l’amour, la domination, et la liberté ?La version française chantée par Nana Mouskouri (« La Ballade du Chien-Loup », adaptation de Pierre Delanoë et Claude Lemesle) est, comme cela est souvent le cas avec les adaptations, résolument distincte de l’original, au point de mettre en scène non plus un cowboy et son cheval, mais un chien-loup et sa louve. Néanmoins, cette version française évoque les mêmes « grandes questions » et apporte quelques belles formules :« Qui leur a mis la laisse ? D'où vient leur servitude ?L'amour ou la faiblesse,le maître ou l'habitude ? » On y reconnaitrait presque Jean de La Fontaine(« Le loup et le chien »), « … Attaché ? dit le Loup : vous ne courez donc pas Où vous voulez ?- Pas toujours ; mais qu'importe ! »On entendrait aussi Gilles Marchal chantant « Je suis né sous une étoile filante » :« … Car un loup qui meurt de faim ira toujours plus loinQu'un cabot qui dort devant son vieil os »Et pourtant, que ce soit dans la version française ou dans toutes ces chansons confrontant amour et liberté, aussi belles soient elles, il manque « un petit quelque chose », une nuance, un ton, une dimension…Il suffit de revenir à l’original et relire :“… That love's like the smokeBeyond all repair”pour comprendre que ce “petit quelque chose”, qui nous emmène au delà de la raison et au delà des sentiments, n’est autre que la vision poétique de Léonard Cohen.Ballade de la Jument AbsenteDites une prière pour le cowboySa jument a fuiEt il marche à la rechercheDe l’errante chérieMais la rivière débordeSur les routes désertesEt les ponts sont brisésDans l’effroi de la perteIl n’y a pas de piste à suivreNulle part où allerDisparue comme la neigeQuand vient l’étéLes grillons brisent son cœurAvec leur chansonQuand le jour s’en vaLa nuit n’a rien de bonRêva t’il, n’a t’elle pasAu galop, sous ses fersEcrasé l’herbe, etPlié les fougères,Imprimant sur la boueLa marque d’or qu’il aClouée sous ses sabotsQuand il était roiEt, alors même qu’elle pâtureDans les alentoursIl piste de nuitIl piste de jourAveugle à sa présenceSauf pour comparerIci sa blessureLà, sa peine méritéeDe l’arbre le plus hautSi subitementUn oiseau perchéLance son chantLe soleil réchauffeLa brise légèreQui caresse les saulesPrès de la rivièreOh, le monde est douxLe monde est vaseEt elle se tientOù l’ombre et la clarté contrastentDe la vapeur aux naseauxImmense, farouche, elleMonte sur la lune quandElle rue vers le cielEt elle vient vers sa mainMais pas vraiment docileElle rêve d’évasionAinsi l’espère t’ilEt elle jaillira parLe premier passageLibre pour brouterL’herbe des grands alpagesFera-t-elle une pauseSur le haut plateauOù il n’y a rien plus basEt il n’y a rien plus hautEt voici le temps du faixEt de la cravacheTraverse-t-elle la flamme ?Fait-il feu de la hanche ?A cette jumentAu galop, il s’attacheA ce cavalierElle aussi s’attacheAvec droite et gauchePour unique espaceNuit et jour montrantSeuls que le temps passeEt, penché sur son couIl lui dit tout bas« Où tu vas, je vaisAvec toi »Comme un seul, ils tournentEt ils vont vers la plaineNul besoin de fouetAh, nul besoin de rênesMais qui donc serre les liensD’une telle union ?Et qui donc, le soir mêmeBrusquement les rompt ?Est-ce la jument ouLe cavalierOu l’amour sans espoirComme la fumée ?Mais ma chérie dit :« Léonard, laisse tomberTous ces vieux clichésDe Westerns surannés »Je mets donc en musiqueEt voilà qu’ils s’en vontPartent comme la fuméePartent comme cette chanson(Traduction – Adaptation : Polyphrène)