Des blagues embarrassantes (sur la ministre, qu'on l'aime ou pas), une année de trop pour le maître de
cérémonie (qu'on appréciait jadis), une vaste blague de trois heures où des comiques télé et des comédiens de stand up "jouent au cinéma", se donnent l'illusion d'en faire partie (du Cinéma) et
contraignent les vrais comédiens (qu'on les aime ou pas) à s'abaisser, à jouer eux aussi des sketches qu'ils n'ont même pas écrits (Isabelle Carré, Lambert
Wilson...).
Logique télévisuelle, inversion totale des valeurs, où le Cinéma est bouffé, vampirisé, tout le temps absent (comme, physiquement et assez significativement, Carax ou Haneke), où même les plutôt
"bons films de cinéma pour la télé" (désignons là les films dignement "populaires" comme Cloclo ou Populaire) sont rejetés au profit d'un énième vaudeville qui avait, lui, bien
sa place dans ce théâtre de faux-semblants du Châtelet. Et surtout, la morgue et le mépris affichés par les organisateurs quand un technicien (un gueux, donc, à leurs yeux) tente de faire
entendre des préoccupations professionnelles ; préoccupations singulièrement absentes, tues ou auxquelles on fait allusion au fil de blagues sous contrôle (sur Maraval, sur Depardieu).
Cela quand toute l'équipe d'un cinéma municipal réputé et exemplaire (le Méliès à Montreuil) est en grève depuis un mois, quand un fonds d'aide régional (en Franche-Comté) est brutalement
supprimé (celui qui soutint Louise Wimmer, César du premier long métrage, dont le réalisateur aurait pu profiter de sa tribune pour rappeler cette décision alarmante), quand une
convention collective menace la diversité culturelle et tout un pan de la production (les films indépendants à petit budget, ceux que l'on ne voit pas ou peu aux César).
Et puis une "remettante" qui assène bêtement, sans sourciller, qu'"on fait des courts pour faire des longs". Et puis une "standing ovation" obscène car télécommandée (parce que l'actrice est
octogénaire). Et puis soudain un peu d'amour du Cinéma qui se glisse dans les propos très pros mais apparemment humbles et sincères d'un acteur hollywoodien un peu has been mais toujours aussi
attachant. Ils ont Costner, on a Debbouze, ça résume pas mal, non ? D'ailleurs, De Caunes et Hazanavicius ont loué "la classe" de l'acteur, comme si sa simple présence - opportune : il tournait
en France - renvoyait, par opposition, à ce cinéma français en pathétique représentation hier soir un reflet bien cruel...