Le lendemain matin, toujours au fin fond de l’Allemagne profonde
9h05 : je me pointe dans un bureau déjà plein d’employés ponctuels. Ben quoi ? D’abord, je vous rappelle que là d’où je viens, il n’est que 8 heures – autant dire l’aube.
L’une de mes collègues, une jeune mère qui ne travaille que le matin (ce qui en Allemagne fait déjà d’elle une mauvaise mère) me demande, l’air apitoyé, si ma fille ne m’a pas trop manqué la veille. Je repense à ma délicieuse soirée vautrée sur Internet. « Non, ça allait, merci. Enfin, heureusement que je la retrouve ce soir », ajouté-je précipitamment. Ou pas.
13h30 : départ pour l’aéroport. Je promets de revenir vite (du moment qu’on me loge au même hôtel).
14h06 : pas de scanner à la sécurité. Une boîte de Lindt duty free sous le bras, je me dirige prestement vers le stand de massage. Pas de camarades de voyage, pas d’obligation de faire semblant de travailler.
14h30 : sereine et détendue, je dégaine vivement ordinateur portable et blackberry. Le portable, pour rédiger le compte-rendu de mon déplacement, à envoyer à la terre entière avec mon chef en copie pour bien prouver que ce déplacement était tout à fait indispensable et que je n’ai pas fait que manger des truffes au resto ; le blackberry, pour bien montrer que moi aussi je suis une voyageuse d’affaire, même si je ne voyage pas en business parce que les temps sont durs dans le secteur bancaire en ce moment et qu’il vaut mieux faire profil bas.
Je saisis la première occasion pour passer un coup de fil, me mettant soudainement à murmurer pour faire comprendre à mes compagnons de voyage que non seulement je suis importante, mais qu’en plus je traite des sujets top secrets (ils n’ont pas besoin de savoir que je suis en réalité en ligne avec le service informatique).
15h10 : « En prévision de notre décollage, nous vous prions de bien vouloir observer les consignes de sécurité, et ce même si vous êtes un voyageur fréquent ». Personne ne lève le nez de son British Airways magazine. Prise de pitié, je regarde les pauvres hôtesses de l’air nous montrer comment boucler notre ceinture (au cas où on n’aurait pas compris)
15h15 : décollage de l’avion.
15h21 : extinction du signal lumineux « Attachez votre ceinture ». Je sors mon ordinateur personnel : 53 minutes tout compris pour pondre un article pour mon blog. Eh oui, désormais, le seul endroit où j’ai la paix (ni chef, ni MiniPrincesse, ni téléphone), c’est 10 000 mètres au-dessus du sol.
18h10 : émouvantes retrouvailles avec MiniPrincesse.
- Que tu m’as manqué, ma chérie !
- Gaga !
- Tu t’es bien amusée pendant que Maman allait faire le guignol en Allemagne ?
- GAGA !
Et de s’éloigner en titubant avec bonheur vers son trotteur.
19h45 : émouvantes retrouvailles avec Prince
- Que tu m’as manqué, mon chéri !
- Hmmm ? Oui, oui, toi aussi. C’était comment, ce déplacement ?
- E-PUI-SANT. Je n’ai pas arrêté.
- Oh, ma pauvre… si tu veux, cette nuit, c’est moi qui me lève.
Les voyages d’affaires, ça a du bon.