On peut se poser la question, non ? Moi, je me pose la question, alors que j'avoue l'avoir fait. Mais qu'est-ce qui peut bien pousser les gens à photographier leur nourriture ? C'est un article du site des inrocks qui m'a incité à m'interroger ("Et si on prenait en photos ceux qui prennent leur nourriture en photos?"), invoquant une page de Tumblr ("Pictures of hipsters taking pictures of food"). On sait que les enfants s'intéressent de près à leurs productions ventrales, mais 1. Ils ne les prennent pas en photo, 2. Ces productions ont un caractère éminemment créatif, ce qui n'est le cas ni des bagels ni des pizzas immortalisés à table par des passionnés de l'ingurgitation. Quel Lévi-Strauss de social network saura approcher l'antropologie de ces phénomènes étranges illustrant la fuite des cerveaux au risque du narcissisme stomacal, et nous restituera la pensée sauvage de (certains de) nos contemporains ? Tristes topiques qui se sont pris les pieds dans l'ancéphalogramme plat.
Cependant, Twitter peut être autre chose qu'un outil de promotion via instagram pour Moi, Ma crème de jour, Mon gloss, Mon huile régénératrice : la preuve, il y bruisse depuis quelque temps les échos d'un débat que je trouve assez passionnant, disons aussi passionnant que vain : en substance, quiel est le propriétaire légitime d'une oeuvre d'art, ou encore, qui, étant propriétaire d'une oeuvre, est juridiquement (moralement ?) fondé à l'aliéner. Oui, vous avez deviné, finauds lecteurs, je vais à mon tour vous bassiner avec l'affaire Banksy (voir le hashtag #saveourbanksy). Je cite, pour faire rapide. "Un enfant penché sur une machine à coudre, en train de fabriquer des fanions aux couleurs du drapeau anglais : l'œuvre de Banksy, qui dénonce clairement le travail des enfants mais aussi la commercialisation du Jubilé de la Reine, avait fait grand bruit à sa création en mai dernier. Connue sous le nom de Slave Labor, elle a disparu la semaine dernière du mur du magasin londonien sur lequel elle avait été réalisée".
Le plus gênant dans cette affaire de vol pour revente d'un mur comportant une oeuvre par nature volatile, en fait, c'est la valorisation monétaire, parfois vertigineuse, d'un art dit et issu de la rue. Et les artistes n'en
Mais l'habitant du quartier Bastille que je suis sait très bien que la menace d'une marchandisation sournoise de l'art de la rue est terriblement présente. Une promenade dans le quartier peut être en cela édifiante, compte-tenu du nombre de boutiquiers qui ont demandé à des manipulateurs de bombes peinturlurantes de leur refaire la façade façon tag chic.
Dans l'affaire Banksy/FAAM, je retiens les mots de l'élu conservateur et membre du gouvernement anglais Alan Strickland, qui me vont droit au coeur dans leur style "cessez de jouer avec nous, nous ne sommes pas des marionnettes people : "La communauté sent que Banksy lui a donné cette œuvre d'art gratuitement. Il se trouve qu'elle est réalisée sur ce mur en particulier mais elle aurait pu l'être autre part. Les habitants ont le sentiment que c'est leur œuvre d'art, qu'elle appartient au public. Ils sont en colère que cette œuvre soit vendue pour des profits privés. Même si elle n'a pas été volée, elle a été retirée à une communauté qui y est très attachée".
A proximité de ce sujet, j'avais aimé ce billet, sur un site proche. Et puis celui-là. Enfin, histoire de me citer moi-même, je me souviens de ce billet là, et même, je me souviens de ce coin de rue, aujourd'hui disparu.
Pour aller beaucoup plus loin, le Site de Banksy.