LA MORT PAR PROCEDURE...
"Vous souvenez-vous de la tuerie de la Chevaline?
(sans jeu de mots de circonstance n.d.c/.) On découvre le massacre d'une famille d'Anglais en pleine forêt française. On fait venir des experts de Paris et l'on s'aperçoit après plusieurs heures qu'une petite fille survivante est restée prostrée entre les jambes de sa maman morte dans la voiture. On se dit, c'est dingue, il y a une cinquantaine de gendarmes présents et personne n'a eu l'idée de regarder s'il y avait de la vie? Bah non! C'est normal, nous explique-t-on. "La scène de crime a été gelée." Puis vient la phrase qui tue le fonctionnaire: "La procédure a été respectée". Sous-entendu: "Nous sommes couverts, nous n'avons pas fait d'erreur.". Pas d'erreur! Cette semaine, il y avait le procès des policiers responsables de la mort d'Hakim Ajimi à Grasse en 2008. Ce jeune homme, très fragile psychologiquement, est interpellé dans la rue après avoir giflé son banquier. Les policiers le plaquent au sol, le menottent puis sans autres raisons que la colère et l'énervement le maintiennent immobile par une clef au cou et une pression dans le dos. Hakim meurt asphyxié. Pour se défendre les policiers impliqués clament le respect de la procédure. Ils s'en tirent avec du sursis...Il n'y a pas eu d'erreur! "S'il faut changer quelque chose, c'est la procédure, je ne suis pas responsable de l'appliquer." dira l'un des prévenus à juste titre.Eh oui, partout la procédure a remplacé l'intelligence, la clairvoyance, la sensibilité, l'humanité.
Ne prenez pas cet air dégoûté! Dans le travail social et éducatif aussi nous sommes devenus les princes de la procédure. Plus personne ne se mouille, ne dépasse ses prérogatives, ne va plus loin avec un gamin ou un jeune en difficulté que les limites fixées par les textes. Si c'est une demi-heure, ce n'est pas quarante-cinq minutes, on pourrait me le reprocher! S'il ne rentre pas dans le créneau strict des conditions d'accueil, on ne peut prendre le risque, je joue ma carrière! La "process story" a bouffé le monde de la santé, le monde de l'hôpital, le monde de l'école. il bouffe chaque jour un peu plus le monde du socio-éducatif. Partout des crânes d'oeufs pensent la norme, la sécurité, la rentabilité et partout on se réfugie derrière les procédures pour ne plus avoir à penser.
Attention, un jour des robots sans failles pourraient nous remplacer...
Nous aurions creusé notre propre tombe. Mais en sécurité.
Sans erreur!"
-Etienne Liébig- chronique-Le Lien Social-n°1094-
Lectrices. Lecteurs , passagers de cet espace improbable...
-"On devrait toujours être légèrement improbable" -Oscar Wilde-
Les "Couleurs d'Aencre" s'en vont taquiner - pour quelques jours- d'autre humeurs, d'autres sentiers z'et rivages.
Plein de douceurs à vous
See you très bientôt
Jean-Jacques
"La proximité installe, à la longue, une étrange distance."
-Nathalie Petrowski-
Mais, n'allez pas vous imaginer je ne sais quoi!
Pas de traversée des mers en vue, juste un ptit saut de côté
;-)