Coup de cœur Le rhinocéros d’or, Histoires du Moyen Age africain,
de François Xavier Fauvelle-Aymar Par Emmanuel GOUJON
C’est un peu comme ouvrir un vieux grimoire poussiéreux et épais, à la luxueuse reliure de cuir. C’est un peu comme se lancer dans un voyage, non seulement dans l’espace, mais dans le temps du continent africain. Ouvrir le « Rhinocéros d’or » de François Xavier Fauvelle-Aymar, c’est prendre le risque de la surprise et du dépaysement. L’auteur nous entraine avec allant et souffle d’un bout à l’autre de l’Afrique au Moyen Age : d’Axoum à Sijilmasa, de Berbera à Grand Zimbabwe. Et pour nous guider, des personnages célèbres qui ont marqué leur époque : Ibn Battuta, Vasco de Gama, ou Théodore Monod nous accompagnent tout au long de l’ouvrage. Les chapitres sont courts et haletants, chacun racontant une histoire, dévoilant un mystère, retraçant un évènement formidable comme l’entrée à Marrakech au cours d’une cérémonie digne des Mille et Une Nuits, d’un souverain mystérieux venus du lointain royaume de Zafûn. Fauvelle-Aymar démontre s’il en était besoin que l’Afrique est ancrée dans l’Histoire depuis des millénaires et qu’elle n’a pas été, en dépit de la rareté des sources écrites, à la marge du monde, mais au contraire toujours source de richesses et de fascination. L’historien, spécialiste de l’Afrique et directeur de recherches au CNRS, retrace la vie de l’Afrique médiévale du VIIIème au XVème siècle. Les vies des marchands et des rois, des guerriers et des esclaves, des voyageurs et des aventuriers nous sont racontées, dépeintes à partir de quelques perles retrouvées dans un tumulus, d’une épave de caravane dans le désert ou grâce à la lettre manuscrite sur vélin d’un marchand juif. La force de ce travail est en effet de se baser sur les trouvailles archéologiques comme sur les quelques textes écrits, sources directes ou indirectes, pour retrouver et retranscrire ce paysage médiéval africain méconnu. Fauvelle-Aymar retrace les routes du sel et de l’or, des esclaves et de l’ambre de cachalot. Certaines existent encore, d’autres se sont perdues à jamais dans les sables mouvants du Sahara. La construction de villes, leur rayonnement et leur chute soudaine ne laissent pas indifférents, de même que le périple de deux Chinois – déjà ! – à plusieurs siècles d’intervalle ne peut que nous surprendre. Loin d’être un aride ouvrage universitaire, le « Rhinocéros d’or » est au contraire une sorte de jeu de rôle qui permet au lecteur de se lancer à la recherche de la capitale introuvable de Ghâna, pourtant décrite en 1068 par un géographe de Cordoue. Ou bien de comprendre pourquoi l’Afrique du Sud a fait du Rhinocéros d’or, une statuette couverte d’or du XIIème siècle découverte en 1932 à Mapungubwe dans une tombe mystérieuse, sa plus haute distinction. Ou enfin de visiter sur les hauts plateaux éthiopiens aux temps du roi Lalibela une église creusée dans le granit rose avec l’aide des anges…
François Xavier Fauvelle-Aymar, Le Rhinocéros d’or, Histoires du Moyen Age africain
Alma éditeur, 322 pages, 1ère parution Février 2013Un article d'Emmanuel Goujon, écrivain-journaliste.