Un voyage en Inde, de Gonçalo M. Tavares, citations

(…) si un visage a deux moitiés
– l’une belle, l’autre effrayante –,
les ennemis ne voient que la peur
et les amants que la beauté.
Ce sont dans le fond deux cécités
particulières,
des spécialisations qui apparaissent (spontanément)
à certains moments. (Chant I – 17)

(…) dans le monde des idées
l’infini est à notre portée
dès demain matin. (Chant II – 3)

On distingue ensuite parmi les humains
ceux qui connaissent mieux leurs poches
et ceux qui connaissent mieux leurs mains.
Dans les habits, les poches sont la partie qui conserve
et qui est dotée de mémoire,
tandis que les mains sont la partie du corps qui a le plus tendance
à tourner les boutons de porte. Ce n’est pas pareil, on le voit, mais mieux vaut ne rien expliquer. (Chant III – 43)

(…) La haine unit des générations plus dissemblables
que l’amour – et il en fut toujours ainsi. (Chant III – 51)

(…) Les maîtres complets
sont très dangereux : après eux, on n’a plus de route à suivre. (Chant VII – 59)

On dit qu’au retour il n’y a jamais de surprises
– les aventures se produisent toujours à l’aller,
dans la première partie du trajet. (Chant IX – 16)

Des arbres attentifs (comme des prédateurs) attaquent le début
de la lumière, la mâchent lentement ;
personne ne le voit, mais ils grandissent. (Chant IX – 57)