C’est son heure de vérité. De plus en plus seul, Vincent Peillon a du mal à faire passer sa réforme des rythmes scolaires. Passer à la semaine de quatre jours et demi et ajouter des activités péri-scolaires, beaucoup d’établissements craignent de ne pas avoir le personnel nécessaire. Une réforme des rythmes scolaires et, plus largement, de l’école, qui figure pourtant au coeur des priorités présidentielles.
Gérard Collomb, le sénateur-maire de Lyon, a annoncé mardi 19 janvier qu’il n’appliquera cette réforme qu’en 2014 et pas en 2013 comme prévu par Vincent Peillon. Et il n’est pas le premier à caresser le Ministre à rebrousse poil. Les communes ont jusqu’au 31 mars pour donner leur réponse mais plus le temps passe, plus le nombre de villes qui appliqueront la réforme dès 2013 se réduit. Le maire de Paris a quant à lui annoncé qu’il ne s’était pas encore décidé. Aujourd’hui, seule une vingtaine de grandes villes devrait être concernée dès la première année. Vincent Peillon a donc affirmé qu’il ne passerait pas en forme mais que « tous, nous devons nous rassembler, collectivités locales, professeurs, animateurs, parents, autour de l’intérêt des élèves, et là, personne ne le conteste, il faut bien revenir aux 4,5 jours ». Et d’affirmer qu’aucun des syndicats ne se dit fermement opposé à la réforme. Les reproches sont plutôt sur la forme : « certains me reprochent de ne pas la faire comme ils le souhaiteraient. Or, il faut avancer, et personne n’est en mesure de propose une réforme alternative ». Pourtant, les syndicats redoutent que le nombre trop faible d’animateurs formés avant septembre pour gérer les activités périscolaires n’accroisse les inégalités entre les écoles et les activités. Ce qui n’empêche pas le Ministre de souhaiter voir la moitié des élèves passer à la semaine de quatre jours et demi dès 2013, soit trois millions d’élèves.
Infographie de l’application des rythmes scolaires, par Le Figaro.
Les élèves fatigués par la coupure du mercredi
Pourtant, le but de cette réforme semble noble : rééquilibrer les rythmes de l’enfant après la mise en place contestée de la semaine de quatre jours de Xavier Darcos en 2008. Une semaine plus courte qui fatiguerait les enfants tout en défavorisant les apprentissages. Il est avéré que les journées de classes des enfants Français sont plus longues que celle de leurs camarades européens. Depuis 2008, les enseignants se plaignent de la mise en place des deux heures par semaine d’aide personnalisée, entre midi et deux, facteur de fatigue pour les enseignants, sans effet jusqu’à présent sur l’échec scolaire en primaire. Mais alors que Vincent Peillon a déjà renoncé raccourcir les vacances d’été, pourquoi est-ce que le retour à la semaine de quatre jours et demi coince-t-il ?
Tout d’abord pour des questions financières. Les familles vont devoir changer leur mode de garde ; les collectivités devront organiser leurs finances pour occuper le temps scolaire gagné en activités périscolaires. Sans oublier que cette réforme, qui modifie le temps de travail des enseignants, n’inclut aucune contrepartie financière pour les professionnels. Pas étonnant quand on se penche sur les dépenses publiques de l’Etat. Mais il n’empêche, les fonctionnaires sont mécontents. Et les parents doutent, notamment de « la capacité de leur commune à mettre en place la réforme » à cause du manque d’infrastructures et de personnel qualifié, selon un sondage Harris Interactive publié ce mercredi par le principal syndicat du primaire. Les plus sceptiques sont, sans surprise, les habitants des communes de moins de 2 000 habitants.
Quel prix pour les activités ?
La France est l’un des pays d’Europe où les enfants ont les journées les plus longues.
Autre point chaud de cette réforme : le prix des activités. Pour 62% des sondés, elles doivent être « gratuites pour tous ». Pour 24%, leur prix « devrait varier selon le niveau de revenus des parents » et pour 7%, « elles devraient être payantes et au même prix pour tous les élèves ». Logique, dès lors, que la plupart des parents d’élèves du primaire (92%) déclarent qu’ils n’inscriront leurs enfants aux activités périscolaires qu’à la condition qu’elles soient gratuites. Contrairement à ce qu’on pourrait penser, la priorité pour la majorité des parents est l’autorité et la discipline, avant l’aide aux élèves en grande difficulté. Pour beaucoup, cette réforme doit donc être mise en place progressivement.
Une réforme qui fait polémique, donc, et qui n’en est qu’à ses débuts. Vincent Peillon affirme vouloir se pencher sur le collège et le lycée, l’alternance entre les semaines de cours et les vacances ainsi que sur la place des examens et ce, dès 2014. A noter également que la loi sur l’école sera présentée le 11 mars au Parlement. Elle prévoit la mise en place d’un Conseil supérieur des programmes pour que « tous les élèves bénéficient d’ici la fin du quinquennat d’enseignements rénovés, articulant socle et programmes de la maternelle au lycée ». Rien de précis n’a été diffusé à ce stade. Au cours d’un déplacement la semaine dernière, Vincent Peillon a démenti vouloir alléger les programmes, tout en indiquant que les programmes de 2008 n’étaient pas les « bons ».
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