10 chansons… pour le redressement productif français

Publié le 20 février 2013 par Storiagiovanna @StoriaGiovanna

La loi Toubon (passée en 1994) impose aux radios généralistes de passer au moins 40 % de productions francophones dans les temps d’antenne depuis le 1er janvier 1996. Certaines radios ont donc pris le parti de faire dans le 100 % (MFM, Chantefrance) tandis que d’autres galèrent carrément. Ou alors, ils contournent la loi en exposant des artistes français chantant en langue anglaise. Je ne parle pas de Radio Latina, de Lusitania ou de Beur FM, dont la spécificité est de passer de la variété en langue espagnole, portugaise ou arabe.

Ce n’est pas que je sois contre cette loi – après tout, je trouve cela normal qu’on puisse écouter des productions de qualité dans la langue dans laquelle on a été élevé –, mais au regard de cette loi, on fait quand même passer des choses assez abominables à la radio. Car c’est bien beau de vouloir promouvoir la langue française, mais ce serait bien aussi que les textes ne soient pas en français appauvri :

… Par exemple. Mais comme je le dis, avec Sefyu, les bègues reprennent espoir.

Mais, telle notre ministre du redressement productif, je m’en vais chiner pour vous dix chansons pour vous prouver que non, la langue française n’est pas forcément ringarde.

O Safari, Taxi

J’ai croisé ce petit duo rennais sympa non pas lors d’un retour au pays (je n’aurais pas le temps !), mais au 104 ce 1er décembre 2012. Et j’ai beaucoup aimé leur petit son exprès dans la mouvance d’un retour de la new wave à la Taxi Girl. Bref, je leur souhaite de se faire récupérer très vite par les radios généralistes nationales pour qu’ils puissent se faire un nom.

Lescop, La forêt

Je sais que vous commencez déjà à en avoir marre, de cette chanson-là (marre de cette chanson… Patrick, tu sors !), mais trouvez-moi une chanson qui parle de meurtre sans le nommer explicitement et dont le texte soit aussi bien écrit. Ensuite, je vous lâcherai la grappe avec Lescop, promis.

Indochine, Memoria

Alors oui, Nicola Sirkis et son band écrivent le même album depuis 15 ans, mais cela n’empêche pas que je trouve ce premier extrait de Black City Parade retourne à des basiques plus simplistes et plus agréables selon moi que La république des météores. Et puis il paraît que l’album entier est meilleur que le précédent. Gotta listen. Puis finalement, j’aime bien Indochine. C’est comme Depeche Mode : j’ai l’impression que le groupe me poursuivra toute ma vie.

Eiffel, Libre

Depuis que j’ai découvert ce titre, je suis hystérique. Déjà, la mélodie est très élaborée – limite difficile à chanter, mais j’aime les défis –, mais en plus, les paroles cognent bien. Le groupe avait également prouvé avec Place de mon cœur cette même qualité d’écriture qui pouvait aussi s’accorder avec une mélodie et une harmonisation plus basique. Au final, je pense que Foule monstre va s’ajouter à ma déjà très longue to buy-list de 2013.

Dominique A, Rendez-nous la lumière

Mais quelle jolie chanson, vraiment ! Je suis au-delà du bonheur quand j’entends ce genre de texte qui s’attache réellement à la musicalité des mots tout en en respectant le sens. Et puis sa voix particulière me fait penser que je ne fais pas assez l’effort de l’apprécier, juste une fois de temps en temps, par petites doses. En vérité, cette voix est tellement pénétrante que même une écoute limitée permet d’élever l’âme de l’auditeur vers d’autres mondes.

Arthur H, Le jardin des délices

Autre voix non formatée qui chante de belles choses en français, le fils de Jacques H. fait partie de ces artistes que, finalement, je n’écoute pas assez au regard de leur talent. Alors bien sûr, sa voix peut apparaître comme du papier de verre à certaines oreilles chagrines, mais avouez que c’est quand même super classe d’avoir un artiste de ce calibre, capable d’aller jusqu’au blues et au jazz en langue française, non ?

Ridan, Partie de golf

Si aujourd’hui, ses textes sont plus friendly (Ce matin, un lutin m’a dit : « Tout est possible… »), je resterai à jamais scotchée par cette phrase d’accroche avec laquelle Ridan se fit connaître en solo : Le monde est une petite putain qui roule sa bosse pour le pétrole. Le tout dit avec un riddim de guitare très down tempo, le genre de truc bien improbable. Alors bien sûr, on retrouve déjà le tort de Ridan, à savoir faire du sentimentalisme, voire du populisme à bas prix. Mais pour dire vrai, j’aime bien l’état d’esprit dans lequel il compose ses chansons.

Mustang, Anne-Sophie

Je les aime bien, ces petits Auvergnats qui se prennent pour Dick Rivers et les Chaussettes Noires. En pleine mode du revival 80’s dans la chanson underground française – cf Lescop –, ce petit retour inopiné aux 60’s et aux yéyés est tout à fait rafraîchissant. C’est vrai, quoi, on reproche parfois à la chanson française de qualité de ne pas aborder de textes légers…

Oxmo Puccino, Perdre et gagner

Monsieur Oxmo fait du rap tellement classe qu’il en ferait presque du slam et qu’il se fait surnommer le Black Brel. Je le respecte autant pour la qualité de ses textes que pour son flow et son timbre puissants, mais surtout pour avoir la bonne idée de s’entourer régulièrement de musiciens live, comme l’excellent trompettiste Ibrahim Maalouf et la batucada Zalindê. Et pour l’avoir vu aux Solidays en 2010, je peux dire que Monsieur envoie du lourd. Je t’aime d’amour, Oxmo.

IAM, Elle donne son corps avant son nom

Alors oui, Messieurs B2O, Rohff et tout le tremblement à la voile, on peut parler de biatches en criant sur tous les toits comment défoncer leurs trois trous. On peut aussi, à la manière des vétérans sudistes au meilleur de leur art, en parler sans employer de termes insultants, et même avoir une vraie moralité à l’histoire : Traitez les filles avec respect mais attention, prenez garde à celles qui ne donnent pas leur nom…

Oui, oui, oui, je le déclame : je trouve encore la langue française très belle quand elle n’est pas hurlée par des chanteuses à voix ou massacrée par des incultes. Oui, la loi Toubon peut être respectée si chacun se donnait la peine d’un redressement qualitatif. Apparemment, pour certaines personnes, c’est trop demander…