Oui, je commence mon article en m’auto-citant, tout simplement parce que je n’ai rien trouvé de mieux pour introduire mon sujet. Donc voilà voilà! Un article où je vais vous raconter ma découverte pour ce qu’on aime appeler aujourd’hui le « community management » ou « marketing communautaire » et « marketing tribal » pour les académiques! Bref, comment je suis tombée dans la marmite!
Quand j’étais ado, j’étais une gotho-métalleuse-rebelle, et j’étais dans un fan-club
Oui, c’est vrai. Adolescente, ma vie se résumait à ces groupes de métal symphonique (métal à chanteuses lyriques) dont j’étais absolument et complètement fan-hystérique, mon trio de tête étant composé de Nightwish, Within Temptation et Epica.
Etre fan pour moi (et outre les collections de posters/magazines et éditions en tout genre) c’était être active sur les forums, les chats IRC de fans, et faire le tour de l’Europe avec d’autres membres de la communauté. Bref, vivre ma passion à fond.
Tellement à fond, qu’à force d’investissement et de dévouement, je suis devenue un jour présidente du Fan-Club officiel de l’un de ces groupes: la meilleure reconnaissance possible pour une fan. Je faisais en sorte de partager l’amour de ce groupe pour qu’ils soient mieux connus – mais plus loin encore, et via ce fan-club, nous les aidions à organiser des concerts, nous gérions le site officiel et les premiers réseaux sociaux francophones (vous vous souvenez de MySpace? ^_^) – et tout ça avec la « collaboration » du dit groupe. (Eh wais, je les avaient sur MSN!)
Et alors, qu’est ce que ça m’a appris? Que les fans, c’est p’tet des rageux, mais s’pa des pigons!
1. Les communautés sont un excellent relais d’information (surtout en cas de manque de médiatisation)
Il faut déjà savoir qu’en France, le métal vit à travers les communautés et ses fans et n’a pas une réelle place au sein des médias (les raisons sont nombreuses – mais le manque de professionnalisme du milieu joue pour beaucoup – mais ceci est un autre débat ). Les groupes doivent passer par cette phase de « séduction communautaire » pour être accepté, et être connu en francophonie – et c’est aussi pour ça que le rôle de fan-club était extrêmement important, à la fois pour les fans (source directe d’information, conseils, animation, etc.) et pour les groupes (partage d’infos via des influenceurs, la possibilité de toucher les cibles directement, etc.). Ainsi, pour ces passions qui ne sont pas/peuvent pas être relayées par les médias, le marketing communautaire est un excellent (le seul?) moyen de se faire connaître et gagner en légitimité. Et c’est en grande partie grâce à ce travail de fans dévoués que ces groupes là arrivent à remplir Bercy aujourd’hui, et non pas grâce à leur médiatisation.
2. Ne jamais prendre les fans pour acquis
Même si cette histoire avec ce fameux groupe a débuté sous des airs de conte de fées, la fin est malheureusement moins joyeuse. Cette association était devenue mon activité principale pendant une de mon années sabbatique, et ma principale source de dépenses (déplacements, gestion du site, etc.). En parallèle, le groupe a heureusement bien réussi à développer sa notoriété dans nos contrées, et multipliait les concerts et festivals en France, et avait moins en moins besoin de nous – ou alors prenait moins le temps pour entretenir nos relations ? Les déceptions s’accumulaient, refus d’invitations pour leurs concerts, ils nous demandaient de payer des lots, privilégiaient d’autres contacts pour certaines informations, etc, etc – jusqu’à clairement nous ignorer. Certes, en l’écrivant ainsi, ça ne semble pas grand chose, mais l’amertume était là. Je ne demandais pas la lune, je demandais de la reconnaissance. Car la reconnaissance est la seule « monnaie » dont a besoin un fan/leader d’opinion pour continuer à s’investir pour sa passion, il n’a pas besoin d’argent, ni de cadeaux. Sans ça, il ne se battra pas longtemps. Et à force de lutter dans le vent, j’ai baissé les bras et tendu le flambeau à une amie qui a repris le relais. Les membres de la communauté m’ont remercié pour mon travail et mon investissement. Mais jamais le groupe. D’ailleurs dans une interview récente, le groupe a affirmé qu’ils « avaient eu un fan-club francophone » – pourtant il existe toujours, et est tout aussi actif. Awch…
Et maintenant, je suis une adulte – mais je n’oublie pas ce que c’est d’être un fan!
Une adulte avec un travail qui découle directement de cette expérience. Je ne suis pas community manager (responsable relations clients), mais le côté marketing social/communautaire est clé, voire fondamental, pour toutes les actions qui sont entreprises dans mon travail quotidien (chez un éditeur de jeux-vidéos) - et fait aujourd’hui de plus en plus partie intégrante de nos stratégies de communication/marketing au sens global (ce qui est en soi déjà une petite victoire pour notre équipe ^_^).
Je ne suis effectivement plus la fan hystérique de mes 18 ans, mais je tire encore aujourd’hui énormément de choses de cette expérience en tant que fan, et avant tout membre investie d’une communauté. Car oui, je connais les opportunités qu’offrent une communauté investie, mais également les dégâts que peuvent découler d’une communauté déçue ou flouée.
Et la conclusion à cette histoire? J’écoute toujours ce groupe, de loin. Je ne vais plus à leurs concerts, et j’écoute leur CD sur Spotify. L’impact que ça a eu? Peut-être pas énormément pour eux en termes de chiffres d’affaires pour le groupe car ils avaient atteint leur seuil critique de notoriété à ce moment là. Mais en terme d’image…?