Point of (inter)view X Pierrick Moulès

Publié le 16 février 2013 par Pointofview @ptofvw

Cela faisait longtemps que le projet était en tête. Nous aimons son travail, ses photos. Aujourd’hui c’est l’Interview de Pierrick Moulès.

POV/ Bonjour mon petit Peter comment vas-tu aujourd’hui ?

PM/ Eh bien ça va très bien, un peu stressé mais honoré de faire cet inter!

Que fais tu de beau en répondant digitalement à mes questions qui t’emmerdent ?

J’allume ma cent cinquante-septième cigarette de concentration tout en me resservant un verre de bourgogne… Histoire de me débrider… Je me suis aussi mis une petite playlist smoothy pour l’occasion. En revanche ce qui m’emmerde là ce serait plus tôt le fil d’actualité Facebook ahah.

 

Bon, passons aux choses sérieuses, peux-tu te présenter brièvement ?

Je suis né il y  a 25 ans dans le Lot, j’ai grandi à la campagne au milieu d’animaux, dans un isolement parfois étouffant. Le cinéma, les magazines, les bouquins étaient pour moi un moyen d’évasion et de rêves. J’avais déjà, autant que je me souvienne, cette passion pour l’image. Je voulais être ornithologue puis j’ai découvert les femmes, l’argent, le sexe, la drogue et les notions de pouvoir. Arrivé en seconde je suis parti dans un lycée généraliste option cinéma puis en cours de cycle j’ai découvert la photographie c’est alors que suis parti dans une école de photographie pendant 4 ans, puis commencé une licence en histoire de l’art.

 

Comment définirais-tu ton travail photographique? Quelle est ta façon de procéder ?

Je ne saurais définir mon travail photographique pour l’instant, je laisse ça aux autres. Je ne sais moi même pas où j’en suis avec la photographie… De plus mon travail photographique est en perpétuelle évolution, du moins je le crois.

Ma façon de procéder est très simple. En ce qui me concerne, il y a deux types d’images, celles qui sont réfléchies, mises en scène. Celles-ci, quand j’en ai une idée, je les note dans mes carnets (car j’ai une mémoire de poisson rouge), j’y réfléchi, je cherche un lieu, les accessoires, avec quoi je pourrais les faire puis on passe à l’action quand le bon moment se présente. Puis il y a les images spontanées, celles que tu prends quand tu te balades, en soirée, etc. J’aime bien les surprises.

Dans les phases où je prends beaucoup de photos mon cerveau marche en deux temps, je vis ma vie de tous les jours, comme tout le monde mais en même temps j’analyse tout ce que tu vois, à savoir si je peux photographier ce que je vois ou non.

La photographie, c’est mon medium pour m’exprimer. Je fais ça car je sais pas peindre, écrire des romans, dessiner. Si j’avais pas mal d’argent et plus de couilles je ferais de la vidéo. Beaucoup de mes photos ne sont que pour moi à la base, parce que je voulais m’approprier et garder un instant de ma vie. Que ce soit une vision, une personne, une atmosphère, un objet. Et puis tu sais, c’est plus facile de photographier quelqu’un que de lui dire qu’on l’aime.

Je n’essaye pas forcément de raconter des histoires mais j’aime bien que la personne qui regarde mes images se pose des questions, j’aime bien brouiller les pistes. C’est tellement con une image au final, tu peux faire imaginer ce que tu veux.

 

Avec quel matos travailles-tu ?

Avec de vieilles rognes! Je suis très système D. Je travaille assez à l’arrache… Disons aussi que je n’investis jamais mon fric dans les bonnes choses comme du matos photo. Pour l’instant, enfin j’espère. Donc j’ai maltraité beaucoup de vieux boîtiers argentiques du Praktica BC1 au Nikkormat en passant par un petit Minolta télémétrique et tant d’autres. J’ai fait pas mal de jetables aussi. J’ai également des polaroids, un 600 en close up et  un Fuji instax 100. Pour l’instant mes photographies sont à 98% faites à l’argentique. Quand c’est numérique c’est avec un modeste et cheap 350d! Je me chauffe à me payer d’ici peu un bon boitier numérique quand même.

Cela m’a toujours fait marrer ces gars qui se payent des boîtiers hors de prix en pensant qu’ils vont faire les photos du siècle grâce à lui.

Que penses tu de la photo aujourd’hui ? Je veux dire de tous ces filtres Instagram à la con, de ce connard de Terry Richardson, des photos de merdes publiées partout etc…

Ah je l’attendais celle là! Il y a tellement de chose à dire. Je suis tenté de te dire un truc tout fait du genre que la photographie est à l’image du monde dans lequel on vit, c’est à dire que c’est un vaste bordel… C’est toujours pareil, tout dépend d’où tu t’y situes. Entre le mec qui bosse à la Fnac, celui qui est photojournaliste, celui qui tient un magasin et le galeriste, le discours ne sera quasiment pas le même. Ce qui me fait marrer c’est que tout le monde gueule ou a gueulé avec l’avènement du numérique et des nouveaux moyens généralisés de faire de la photographie, du fait que des milliards d’images soient produites chaque jour, mais au final, quand on regarde le marché de la photographie, il s’est justement jamais aussi bien porté et surtout sur le marché de l’Art!

Certains ont peur du progrès ou veulent juste sauver leur peau, enfin, leur pognon. Moi j’en ai rien à foutre d’Instagram ou quoi que ce soit, il faut savoir vivre avec son temps! Que ces cons se rassurent, on ne va pas leur piquer leurs vieilles places! Ils peuvent continuer à aller photographier le mariage de leur cousine sereinement. Les gens n’ont pas Instagram pour faire des photos sérieusement non plus! Et puis pour moi, de toute façon, il n’y a que le résultat qui compte! Ce que je veux dire par là, c’est que j’ai aucun problème à aller voir une expo dite “photo’ d’un mec qui a réalisé tout son travail avec Photobooth ou Instagram ou je sais pas quoi! A partir du moment où son discours et le résultat est bon, me parle, je n’y vois vraiment aucun problème.

Après oui, bien sûr, j’ai envie de tout casser, de tout faire péter quand je vois sur internet que n’importe quel petit trou du cul à qui son papa a offert un reflex numérique pour son entrée à la fac se dit “photographe”. Mais bon, ça fait partie du jeu. Personnellement, je prétendrai être photographe le jour où mes photos me payeront mon loyer.

Pour en revenir à Terry Richardson, moi je le respecte à fond. Le type est devenu une institution! Aujourd’hui dès qu’un type est un peu en place il a son passage obligé chez lui! Et puis ne crachons pas dans la soupe, tous les gens de mon âge, à l’époque de la fac, on acheté son putain de bouquin photo Taschen à 15 euros “Terry’s World”! Qui n’a pas passé des fins de soirées en appart bourré à regarder à plusieurs ce livre? Ce livre à marquer toute une génération je pense. C’était une porte ouverte à la liberté, à la réalité.

 

Qui sont les gens qui t’inspirent et pour qui tu as un minimum d’estime aujourd’hui ?

Les choses ont beaucoup évolué en peu de temps avec notre amour d’internet. Il y a encore peu de temps, en bon étudiant  je t’aurais cité des maîtres comme Wilman, Di Corcia, Shore, Goldin, Eggleston et beaucoup d’autres. Mais voilà, depuis, internet a explosé, avec les réseaux sociaux, etc… De ce fait je découvre de jour en jour de nouveaux artistes, de nouveaux projets, des nouveaux genres, des trucs géniaux. Chaque jour se créé des fanzines magnifiques aux 4 coins du monde. Et je connais des mecs ou des nanas qui, à mon sens, méritent vraiment d’être mondialement connus. Aujourd’hui des Nan Goldin, j’en connais pleins, et parfois des meilleurs. Le Nan Kebab c’est bon aussi…

Je ne suis personne en particulier mais plutôt des mouvances générales. Je me retrouve pas mal dans certains mondes de Tumblr. Ensuite bien sûr, je supporte à fond le boulot de mes potes ou de connaissances!

Si je dois vraiment citer des noms je sais que dernièrement, par exemple, j’ai découvert une artiste qui s’appelle Rita Lino et son travail m’a beaucoup parlé. Ou encore hier, j’ai découvert un Tumblr, c’est un collectif je crois, qui se nomme Lvdovic Magno et leur monde et leur visuel m’ont beaucoup parlé.

Avant de finir je voulais quand même parler de Ryan McGinley… Putain… Le jour où j’ai découvert ce type…J’étais fou! J’étais à la foi émerveillé et rempli de haine. Ses images m’avaient transcendées, je n’avais pas vu quelque chose d’aussi beau à l’époque. J’étais rempli de haine car son travail sonnait comme une évidence à mes yeux! J’avais sous les yeux ce à quoi j’aspirais. Comme si toutes mes questions, ma quête photographique, tenaient à ce résultat là. Du moins, à l’époque, les temps changent.

 

Il n’y a pas longtemps en regardant tes photos je me suis demandé pourquoi tu n’étais pas encore connu je veux dire par là, être gay et amis avec pleins de mannequins aigris et publier tes photos dans des blogs ou sites ayant 5000 fois notre audience ?

Ahahah et bien peut-être que la réponse est dans ta question! Non, plus sérieusement, je ne sais pas trop. Simplement parce que je ne suis pas encore assez bon et que je ne me suis jamais assez bougé le cul pour l’être.

Le mot de la fin ?

J’ai plus de bourgogne! Sinon n’oublions pas que la Vie n’est qu’une vaste blague!!!

Informations:

http://pierrickmoules.tumblr.com/

G.R.

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