Heureux qui comme pourrait faire figure de cassure dans le parcours artistique de Nicolas Presl, puisqu’il délaisse pour l’occasion le noir et blanc pour un travail sur la et en couleur, original et de toute beauté.
Heureux qui comme est également le premier livre de N. Presl à se dérouler dans le présent – mais l’on retrouve néanmoins dans ce nouvel ouvrage son intérêt pour les grands thèmes qui nourrissent l’Histoire de l’homme. Ici, l’auteur s’intéresse plus particulièrement aux relations tout à la fois passionnées et tumultueuses qui lient l’Afrique noire et l’Occident, à travers le parcours de deux êtres qu’à première vue tout oppose, et qui, contre toute attente, finiront pas se croiser. D’un côté, on suit l’envoyé d’une firme industrielle tentant d’amadouer une population locale pour mieux pouvoir la spolier. Sûr de son bon droit, enfermé dans sa bulle dorée et ses certitudes, il ne verra que trop tard la colère qui gronde…
De l’autre, les premiers pas d’une jeune femme, sans doute trop naïve et fragile, dans un endroit fantasmé, idéalisé, des premiers pas qui vont la laisser décontenancée et chancelante…
Ces deux êtres, tout aussi inadaptés l’un que l’autre aux situations qu’ils traversent, semblent incapables d’un regard objectif, distancié, et de ce manque de recul, mâtiné d’un certain paternalisme, de cette vision tronquée d’un monde qu’ils ne comprennent pas, ne naîtront alors qu’erreurs, faux pas et occasions manquées.
Un nouveau volume dans une bibliographie sans faute, alliant allègrement force narrative et beauté graphique.
Cette bande-dessinée sélectionné lors du 40ème Festival d’Angoulême nous transporte jusqu’en Afrique.
Loin d’être un récit mythologique (comme son nom pourrait le laisser penser), il a plutôt tendance à s’encrer dans la réalité du continent qui est loin d’être toute rose.
De planche en planche, on y suit deux histoires parallèles qui vont finir par se croiser. Celle d’une jeune touriste occidentale partie découvrir les charmes de l’Afrique (Burkina, Mali…) et celui d’un entrepreneur sans scrupule qui préfère faire fortune plutôt que de se soucier de la misère qui l’entoure.
Autour de ces deux aventures, il y a de l’amour, mais aussi aussi l’ombre d’une maladie qui plane. Si on aura tendance à penser au Sida, le paludisme n’est pas à ignorer.
Ah oui, j’oubliais, ce récit entièrement muet ne risque pas de vous donner les clefs pour obtenir des réponses claires et définitives. Chaque case vous invite au voyage et permet à votre esprit de se faire son propre récit.
A noter que l’auteur pour la première fois introduit la couleur dans son univers. Ce qui rend le tout encore plus fort car le traitement de la couleur y est minutieux et est l’une des clefs de son récit.
Le reste de son trait de crayon donne des visages anguleux presque difforme, ce qui vient rendre encore plus intense la présence, hautement symbolique, d’un singe, qui lui est dessiné de manière très réaliste.
S’il y a de la poésie dans ces dessins, le tout est loin d’être lisse. Le récit prenant vit est souvent dur et reflète une réalité qu’il n’est pas toujours agréable de constater.
Heureux qui comme est une BD à découvrir si vous aimer la liberté que vous laisse l’auteur. Les Bédéphiles plus classiques éviteront ici un achat qui risquerait de les décevoir, mais se priveront aussi d’un voyage intense.