"Attendu, selon l'arrêt attaqué (Aix-en-Provence, 6 septembre 2011), que, par acte du 2 juillet 1982, rectifié le 21 décembre 1982, M. et Mme X... ont conclu avec M. et Mme Y...une convention de cour commune sur le fondement de l'article L. 451-1 devenu L. 471-1 du code de l'urbanisme par laquelle M. et Mme Y...s'interdisaient, à titre perpétuel, d'édifier toute construction en élévation sur une bande de terrain longeant la propriété de leurs voisins ; que la SCI Atys, venant aux droits de M. et Mme Y..., ayant entrepris de construire une terrasse sur l'assiette de la servitude, Mme X... l'a assignée en démolition de l'ouvrage et en dommages-intérêts ;
Attendu que la SCI Atys fait grief à l'arrêt d'accueillir cette demande alors, selon le moyen :
1°/ que la servitude conventionnelle de cour commune établie même à titre perpétuel, sur le fondement des dispositions de l'article L. 471-1 du code de l'urbanisme (anciennement L. 451-1 du même code), pour tenir compte des exigences de l'administration qui a subordonné la délivrance du permis de construire en ce qui concerne les distances qui doivent séparer les constructions, à la création, sur un terrain voisin d'une servitude de ne pas bâtir ou de ne pas dépasser une certaine hauteur en construisant, s'éteint dès lors que la création de cette servitude conventionnelle a été exclusivement motivée par des règles d'urbanisme, que ces règles ont disparu et qu'il n'y a plus de restriction d'urbanisme au droit de construire sur la cour commune ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 1134 et 703 du code civil ;
2°/ que toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens ; que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; que constitue une atteinte incompatible avec ces principes, la restriction perpétuelle du droit de construire par une convention de cour commune qui n'a été conclue qu'à raison d'une obligation réglementaire devenue caduque ; qu'en décidant le contraire, la cour d'appel a violé les articles 544, 545 du code civil, 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen ;
Mais attendu, d'une part, que la SCI Atys n'ayant pas soutenu dans ses conclusions que la convention de servitude portait une atteinte disproportionnée à son droit de propriété, le moyen, mélangé de fait et de droit est, de ce chef, nouveau ;
Attendu, d'autre part, qu'ayant exactement retenu que la cause d'une servitude s'appréciait au moment où elle était consentie et ne disparaissait pas en raison d'une modification ultérieure des règles d'urbanisme et relevé que la servitude, expressément qualifiée de perpétuelle, interdisait à M. et Mme Y...de procéder à toute construction en élévation sur l'assiette de la cour commune, la cour d'appel en a déduit, à bon droit, que cette servitude, qui ne se heurtait à aucune impossibilité d'usage, n'était pas éteinte et que les constructions entreprises en violation de la convention constitutive, qui faisait toujours la loi des parties, devaient être démolies ;
D'où il suit que le moyen, pour partie irrecevable, n'est pas fondé pour le surplus ;
PAR CES MOTIFS :
REJETTE le pourvoi ;
Condamne la SCI Atys aux dépens ;
Vu l'article 700 du code de procédure civile, rejette les demandes ;
Ainsi fait et jugé par la Cour de cassation, troisième chambre civile, et prononcé par le président en son audience publique du vingt-trois janvier deux mille treize.
MOYEN ANNEXE au présent arrêt
Moyen produit par la SCP Waquet, Farge et Hazan, avocat aux Conseils pour la société Atys
Il est fait grief à l'arrêt infirmatif attaqué d'avoir dit que la servitude de cour commune instituée par les conventions des 2 juillet et 21 décembre 1982 n'est pas éteinte et d'avoir ordonné à la société Atys de démolir tous les ouvrages réalisés sur l'assiette de cette servitude dans les huit mois de la signification de l'arrêt, faute de quoi il sera dû une astreinte de 150 euros par jour de retard pendant trois mois, après quoi il devra à nouveau être statué ;
Aux motifs que la convention de servitude dite de cour commune, résultant des actes des 2 juillet 1982 et 21 décembre 1982 rappelle qu'elle est instituée pour assurer la délivrance d'un permis de construire aux époux X..., délivrance subordonnée au respect des règles de prospects applicables ; que ce type de servitude est expressément prévu par les articles L. 471-1 et suivants du Code de l'urbanisme et peut être instituée soit de manière amiable comme en l'espèce, soit judiciairement ; que dès lors c'est par une dénaturation des termes de la convention conclue entre les parties que le premier juge a pu estimer que la servitude était relative à l'usage commun d'une cour et a pu en déduire qu'elle était éteinte ; que l'acte constitutif de la servitude des 2 juillet et 21 décembre 1982 énonce qu'elle a pour « conséquence d'interdire sur l'ensemble de l'assiette de cette servitude toute construction quelconque en élévation par M. et Mme Y...propriétaires actuels ou par leurs futurs ayants droits » et que « cette prohibition expressément acceptée par M. et Mme Y...à titre de servitude perpétuelle constitue la seule restriction qu'auront à supporter les droits de propriété et jouissance des propriétaires de l'emplacement de cette cour commune ; qu'en conséquence, ces derniers conserveront pour le cas où ils construiraient sur le surplus du terrain, la faculté d'utiliser l'assiette de cette cour commune pour toute autre destination que celle prohibée et notamment d'y implanter des constructions annexes en sous-sol tels que garages, remises ou cellier » ; qu'une indemnité a été fixée entre les parties et réglée par les époux X... ; que la cause de l'existence d'une servitude s'apprécie au moment où elle est consentie et cette cause ne disparaît pas en raison d'une modification des règles du PLU applicable à la zone ; que les parties ont expressément qualifié cette servitude de perpétuelle et elle ne peut en conséquence être déclarée éteinte ; que les permis de construire sont toujours délivrés sous réserve du droit des tiers et notamment de l'application de servitudes de droit privé, comme en l'espèce ; que le permis de construire a été accordé pour une « extension ou surélévation d'un bâtiment existant » et la création d'un garage couvert clos ; que la note de Michel A...et les photographies montrent l'existence d'une aile récente en extension de la façade sud se prolongeant jusqu'en limite du fonds X... ainsi que d'une terrasse récente venant en prolongement de cette aile et l'existence d'un volume clos sous la terrasse équipée d'une porte fenêtre vitrée en façade sud ; que ces constructions ne sont aucunement des constructions en sous-sol, seules autorisées par la convention de cour commune et doivent être démolies ;
Alors d'une part, que la servitude conventionnelle de cour commune établie même à titre perpétuel, sur le fondement des dispositions de l'article L. 471-1 du Code de l'urbanisme (anciennement L. 451-1 du même Code), pour tenir compte des exigences de l'administration qui a subordonné la délivrance du permis de construire en ce qui concerne les distances qui doivent séparer les constructions, à la création, sur un terrain voisin d'une servitude de ne pas bâtir ou de ne pas dépasser une certaine hauteur en construisant, s'éteint dès lors que la création de cette servitude conventionnelle a été exclusivement motivée par des règles d'urbanisme, que ces règles ont disparu et qu'il n'y a plus de restriction d'urbanisme au droit de construire sur la cour commune ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 1134 et 703 du Code civil ;
Alors d'autre part, que toute personne physique ou morale a droit au respect de ses biens ; que nul ne peut être privé de sa propriété que pour cause d'utilité publique et dans les conditions prévues par la loi et les principes généraux du droit international ; que constitue une atteinte incompatible avec ces principes, la restriction perpétuelle du droit de construire par une convention de cour commune qui n'a été conclue qu'à raison d'une obligation réglementaire devenue caduque ; qu'en décidant le contraire, la Cour d'appel a violé les articles 544, 545 du Code civil, 1er du Premier Protocole additionnel à la Convention de sauvegarde des droits de l'homme et des libertés fondamentales et 2 et 17 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen."