Flammarion (2012)
Franck n'a pas revu ses parents depuis plusieurs années et n'a pas donné de nouvelles. Le jour où il se décide enfin à retourner au village de son enfance, il téléphone pour annoncer son arrivée et a la surprise d'entendre la voix d'un enfant, qui s'appelle Alexandre, comme son frère mort accidentellement dix ans auparavant.
Louise vit seule à Clermont, où elle travaille à temps partiel dans une entreprise en attente d'un repreneur. Elle est la mère d'Alexandre, cinq ans, et la veuve d'Alexandre, le frère mort il y a si longtemps. Elle a confié l'enfant aux parents d'Alexandre et de Franck. Ce jour-là, c'est son dernier jour de travail avant une semaine de vacances, à la campagne, près de son fils.
Le coeur de ce livre, c'est la réunion de ces trois personnages, Franck, Louise et Alexandre, l'enfant. C'est une rencontre par hasard qui va changer le cours de leurs vies, les placer dans une situation banale, mais inhabituelle pour eux, leur faire vivre des expériences nouvelles et recréer pour un temps au moins une sorte de cellule familiale.
Mais cette rencontre n'intervient qu'à la page 199 du livre. Il y a d'abord une alternance de courts chapitres, qui replacent chaque adulte dans cette histoire. Franck, caméra à la main depuis ses douze ans, n'avait qu'une envie, quitter la ferme pour parcourir le monde et filmer l'ailleurs. Il est devenu cadreur et ses rêves de grands espaces ne se sont pas réalisés. Louise, elle, a cessé de vivre depuis la mort d'Alexandre et tout ce qui s'est passé depuis, même la venue de son fils, a comme glissé sur elle sans l'atteindre. L'émotion, la tristesse et l'amertume pointent tour à tour au fil des chapitres. J'ai trouvé leur enchainement assez frustrant, car à peine perçoit-on un caractère ou un évènement passé que l'auteur abandonne l'un pour passer à l'autre adulte. Mais cette alternance dans le récit donne évidemment envie de poursuivre pour comprendre ce qui les a menés là.
Ensuite, lorsque les trois personnages sont réunis dans la ferme, le rythme change, s'adapte à la situation, comme ralenti par la chaleur étouffante de l'été, sous le soleil écrasant. Les chapitres s'allongent et laisse le temps à l'histoire commune de se développer.
Pas de happy end, néanmoins, mais une fin très ouverte, des projets qui s'ébauchent, des préjugés et des malentendus qui s'effacent. Une belle histoire émouvante et une découverte de l'auteur pour moi.
Extrait page 38 :
A l'automne, il arrive qu'une oie lève soudain la tête, signe qu'elle a repéré quelque chose très haut dans le ciel, et là au lieu de continuer à piétiner bêtement la cour, elle se met à battre follement des ailes comme elle ne l'a jamais fait, pour une fois elle brasse jusqu'à se soulever dans une grâce inédite, et en amplifiant le mouvement elle s'envole carrément de l'enclos. C'est qu'elle va rejoindre ce groupe d'oies cendrées qui passent sous les nuages à ce moment-là, des migratrices qui partent plein sud prendre leurs quartiers d'hiver en direction de l'Espagne. De cette oie-là en général, on dit qu'elle ne reviendra pas. Alors que les autres, les vraies migratrices, dans six mois elles seront de retour. Pas la nôtre. Est-ce qu'elle s'est perdue, est-ce qu'elle ne veut plus revenir, on ne le saura jamais. Ce n'est jamais facile de revenir, plus les années passent et plus c'est compliqué.
D'autres avis chez Fransoaz, Estelle, Papillon, Clara et sur Babelio.