Le jeu vidéo tue des bébés pandas.

Par Lecrewstillant

Il est beau, il est chaud ! Et oui, un énième article qui affirme que les jeux vidéo rendent violent et sont sans doute à la base de la haine humaine, et ça depuis la nuit des temps (parce qu’il faut pas déconner non plus). Signé Claire Gallois : le lien de l’article.

Alors oui, l’article a une semaine, je suis en retard.. Mais mieux vaut tard que jamais !

Donc, que nous propose cet article ? Et bien Mme Gallois nous propose une espèce de critique, presque complotiste,  du fait que pendant que « les marionnettistes de l’UMP offrent un spectacle lamentable », la vente de jeu vidéo augmente de façon exponentielle, tel Skynet grandissant dans l’ombre. Mais où est le mal ?

Entre deux piques anti-système, Mme Gallois nous balance à la face que le jeu vidéo apporte « une dépendance grandissante à la violence » (après avoir préalablement cité des jeux comme GTA, Manhunt ou Assassin’s Creed, sinon c’est pas drôle). Bien sûr, « a côté de ces jeux, le cannabis, c’est « la santé par les plantes ». Ben oui, si j’ai pas ma dose de violence virtuelle je tremble, je bave, je suis en manque et je veux tuer des bébés pandas tous mignons. Je vous épargne la tentative d’humour subtil avec James Bond et le « Permis de tuer ».

Mais venant-en à la partie marrante, rigolote, drôle, à base de lol (appelez ça comme vous voulez) : la relation tueur de masse-jeu vidéo. Car oui, un article réactionnaire sur les jeux vidéo n’est pas digne de ce nom s’il n’est pas parsemé de références à des relations douteuses tueur-jeux vidéo. Mme Gallois commence par le cas de Andy, le gamin qui a tué parents et frères à coups de fusil. Premièrement, les experts n’en n’ont jamais déduit que « les jeux vidéo habituent à l’excès » : il faut rappeler que l’affaire fut médiatisée autour des jeux vidéo car Andy était un joueur invétéré. Mais oui, c’est tellement plus cool de faire des supers raccourcis à coup de :

« Ils [les jeux vidéo] font croire que la mort est une solution et qu’on peut recommencer indéfiniment puisqu’on a plusieurs vies. On a beau colorer le sang en vert, il y a une répétition de la destruction délibérée qui maintient le joueur dans une fascination parfois sans borne. »

Aberrant, n’est-il pas ? D’où sortent ces affirmations ? Y’a-t-il eu des études le prouvant ? Merde quoi, c’est vrai que les joueurs de jeux violents sont persuadés d’être immortels, d’avoir neuf vies et d’entretenir une fascination malsaine et sans limite pour la mort, la destruction et la torture d’animaux (que le sang soit rouge, cyan ou caca d’oie). Plus sérieusement, ceux à qui il faudrait clouer le bec, c’est bien aux  rédacteurs ignorants et méprisables : au final, c’est vous, Mme Gallois,  qui ne faites pas la différence entre réalité et virtuel, en « argumentant » le fait qu’un individu ne puisse plus différencier le réel du virtuel, le concret de l’imaginaire dès lors qu’il joue à des jeux violents. Non seulement vous faites passer ça pour une logique fiable et universelle mais vous prenez les joueurs pour des demeurés,  des êtres incapables de faire la part du réel et du virtuel.

Puis vient le paragraphe suivant, apogée de la bêtise de cet « article » : faire la relation tuerie de Breivik (72 morts, en Norvège) et le jeu vidéo (ici, Call of Duty) mais aussi la relation Merah et jeu vidéo (sinon c’est pas drôle). Dans un premier temps, oui il est vrai que Brevik s’est dit s’être formé sur Call of Duty, entre autres. Génial, Breivik (un fanatique notoire qui pourrait avoir des problèmes d’ordre psychiatriques) a utilisé un jeu vidéo pour s’entraîner à tuer, alors cela fait de tous les gamers des tueurs potentiels ? C’est marrant quand même, je suis presque sûr que s’il avait utilisé des vidéos de close combat, des magazines ou même des films violents, les médias n’en auraient rien dit.

Et pour Merah, c’est le comble : « Mohamed Merah aussi y consacrait un temps considérable. » Voila, c’est tout. MAIS OU SONT LES ARGUMENTS, LA LOGIQUE ? Il n’y en a pas : c’est de la démagogie, du sophisme, c’est-à-dire une bouillie ignoble de propos non-argumentés que veulent entendre les détracteurs du jeu vidéo, et d’exemples qui n’ont d’autre but que d’attiser la haine envers l’industrie vidéo-ludique et ses consommateurs avec des figures tels que Merah, Breivik et même Vinogradov. Ce dernier est un type qui a tué ses collègues de travail et qui jouait à Warcraft, ce qui veut dire que par extension tout joueur de Warcraft peut potentiellement massacrer ses collègues de travail comme planter des fleurs ou manger du chocolat. Dingue. Mme Gallois nous informe aussi « qu’il jouait à Warcraft [jeu de stratégie], dans lequel les héros sont uniquement des tueurs. » Si tu le savais pas, cadeau. Je t’informe aussi que Scarface est un film où le héros est explicitement tueur et cocaïnomane. Film qui est d’ailleurs classé dans les « 100 plus grands films de tous les temps ». Je ne vous inflige le passage ridicule où la rédactrice dénonce le fait que les adeptes aient un argot. Buzz, clash, sensation, Morandini.

La dernière partie est un espèce de commentaire pseudo anti-bienpensant (si si, ça existe !) où elle nous balance à la gueule que l’argument « Vingt millions de personnes jouent à Warcraft et il n’y a pas vingt millions de serial killers » n’est pas recevable avec une seconde tentative d’humour : « Une gentille maman ajoute : « J’ai quand même dit à mon fils qu’écraser les gens pour le plaisir, cela ne se fait pas dans la vraie vie. » Quel bon sens ! » Parler de bon sens quand on a absolument aucun argument, je trouve ça drôle personnellement. Est-ce pour combler un vide que vous employez un humour pseudo-subversif dans cet article ? Ou c’est purement démagogue ? Ou même les deux ! C’est donc encore une fois prendre les gamers pour des demeurés qui ne savent pas faire la différence entre réel et virtuel. Et heureusement qu’une mère dit à son gosse de pas écraser des piétons au plaisir. Ça s’appelle l’éducation, l’apprentissage de la morale : la différence entre le bien et le mal. Après, si vous vous ne le faites pas vous, c’est tout à votre honneur mais attention : dans « Mme De Bovary » il y a une scène où une femme s’empoisonne à l’arsenic et c’est tout pas beau. Alors dites à vos enfants de pas prendre de l’arsenic (et de ne pas lire du Flaubert par la même occasion).

Après ces commentaires aussi marrants qu’argumentés, la rédactrice nous balance à la poire que « de l’avis unanime des psys et des éducateurs, la plupart des enfants qui abusent de leur console sont plus agressifs et renfermés que les autres. » Hahahaha hohohoho hihihih ! Mais, ce n’est pas une blague ? Mince alors. Ben oui, c’est bien connu que les psys ne sont absolument pas partagés et que les jeux vidéo ne sont pas étudiés pour soigner les dépressions ! Plus sérieusement, les jeux vidéo favorisent l’enferment social, dans certains cas, mais avant c’était les films et encore avant les livres. Puis de nos jours, le gamer est connecté à des tas d’autres personnes avec qui il peut se nouer d’amitié ou dans de moindre mesure, faire des rencontres (je connais des amis par le biais des jeux vidéo, personnellement). Pour ce qui est de l’agressivité, je crois au pouvoir canalisateur du jeu vidéo et, au delà de ça, les experts sont encore très partagés mais ne peuvent incriminer le jeu vidéo directement (de la même façon qu’un film violent).

La fin est une énième pique envoyée au gouvernement en se moquant de la taxe Nutella et en indiquant que Call of Duty a généré 1 milliard de dollars de bénéfices et que ça serait cool de les taxer encore plus parce que 70€ le jeu neuf, c’est sans doute pas assez cher. Et une pique incompréhensible à Filippeti, mais on n’en est plus à une absurdité près. Et le plus drôle dans tout ça, c’est que Mme Gallois a réduit les jeux vidéo aux jeux vidéo violents. Étroitesse d’esprit, quand tu nous tiens !

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