L’État français, plus proche que jamais de la faillite, cherche à limiter la fraude fiscale et l'optimisation fiscale. Il ne s'agit plus tant de faire croire aux Français que l'enjeu est plus la fraude que la dépense publique que d'éviter que le moindre centime lui échappe alors que le budget sera difficile à boucler et de surveiller les citoyens.
Par Baptiste Créteur.
L’État français est en faillite. Ça ne surprendra pas les lecteurs de Contrepoints, et ça ne devrait pas surprendre les Français. Surtout, si le budget est déjà assez serré pour qu'un ministre l'admette, les conséquences du départs de nombreux Français, de la fermeture de nombreuses usines et de la montée du chômage sur les recettes fiscales porteront le coup fatal à un équilibre déjà aussi précaire que les contrats d'avenir.
Avec tout le courage qui caractérise les gouvernements successifs qui, depuis presque 40 ans, préparent des budgets déficitaires, les actuels représentants du peuple refusent de réduire la dépense publique de façon plus que cosmétique. Mathématiquement, difficile d'échapper à un déficit plus important que prévu, d'autant plus que la croissance sera plus faible qu'espéré. Alors, que faire ?
La fiscalité atteint déjà des sommets, et la mesure phare de taxation à 75% a été refusée par le Conseil Constitutionnel. Inutile d'espérer mettre en place de nouvelles recettes. Il ne reste donc plus au gouvernement qu'à espérer que ses zélés percepteurs, qui n'hésitent pas à harceler les contribuables jusqu'à la mort et à mettre des bâtons dans les roues de ceux qui veulent investir dans les petites entreprises, redoublent d'effort. Les mesures en préparation pour pourchasser les Français où qu'ils soient – impôt sur la nationalité et percepteurs sans frontières – ne seront pas effectives avant quelques temps ; il faut trouver des solutions.
À défaut d'être une solution, le gouvernement a un espoir : que les Français, malgré les contrôles omniprésents et le suivi des transactions réalisées, fraudent encore le fisc lorsqu'ils paient en liquide, et surtout qu'ils acceptent l'idée qu'un meilleur suivi par l’État des transactions vise uniquement à lutter contre la fraude.
Les paiements en liquide seront donc limités à 1000 euros au lieu de 3000 aujourd'hui, et le suivi des comptes bancaires et contrats d'assurance-vie sera renforcé. Certes, des fraudes ont sans doute lieu, et on voit mal aussi bien comment les Français pourraient survivre sans et comme l’État pourrait les en empêcher – l'URSS, modèle actuel de la France, n'y parvenait pas. Mais rien n'indique qu'elles seraient assez massives pour que leur identification renfloue les caisses de l’État.
C'est donc sur un tout autre registre que se situent les objectifs des vaillants défenseurs de l'intérêt général : la surveillance des citoyens et de la richesse qu'ils ont jusque-là réussi à préserver de l'appétit dévorant de l’État.
«Cette consultation va être engagée très rapidement afin qu’un décret et des mesures législatives soient prises d’ici la fin 2013 pour abaisser le seuil en espèces à 1 000 euros pour les résidents contre 3 000 euros par achat aujourd’hui», souligne le dossier de presse. [...] Jean-Marc Ayrault a par ailleurs rappelé qu’une autre consultation allait être engagée «sur la création d’un fichier des souscripteurs de contrats d’assurance-vie». Ce fichier «pourra s’inspirer du fichier déjà existant, le Ficoba», précise le dossier de presse. Le Ficoba – Fichier national des comptes bancaires et assimilés – recense les comptes de toute nature et peut fournir des informations sur les comptes détenus par une personne ou une société. Le Premier ministre a par ailleurs annoncé, au plan local, un «renforcement de la coordination entre tous les services compétents».
Une fois les informations collectées et partagées entre les nombreux services, certaines fraudes pourront être évitées – fiscales notamment, mais également fraudes aux diverses prestations offertes par les contribuables français, sans leur consentement, aux autres Français – et l’État disposera de toute l'information dont il a besoin pour savoir où piocher et comment orienter ses prochaines mesures fiscales.
Les Français sont plus que jamais désarmés face à un État qui dispose d'un arsenal minutieusement constitué et qui compte sur leur argent pour financer ses largesses. Évidemment, il s'agit uniquement de faire remplir aux Français leur devoir de solidarité nationale - solidarité qui justifie difficilement les privilèges et avantages des serviteurs de l’État et les subventions massivement accordées sans qu'on comprenne bien leur légitimité. La légitimité de l'action de étatique est un présupposé pour ceux qui la dirigent ; ce n'est plus l’État qui est au service des Français, mais les Français qui sont au service de l’État.
L'intérêt général si bien identifié par ses soins vaut bien une minutieuse surveillance des faits et gestes - et surtout de la richesse - des citoyens par un État à qui rien n'échappe, et surtout pas les Français.