Je commencerais d’abord par rassurer les parents: votre tâche n’est pas facile. Savoir gérer un enfant qui fait un sport de compétition n’est pas une chose aisée. Que vous ayez été vous même sportif ou non, le moment de la défaite est toujours difficile à vivre, pour lui, comme (bien souvent) pour vous, parce que vous ne savez pas toujours comment «bien» réagir. La pratique sportive de compétition demande souvent aux parents (ou plus fréquemment à un parent en particulier) de s’organiser, de trouver des solutions pour conduire votre enfant à une compétition, de participer financièrement à ses entraînements et ses compétitions. Je rencontre plus souvent des parents qui essayent de faire de leur mieux, qui tentent de gérer les aspects émotionnels, qui se posent de bonnes questions mais parfois sans même s’en rendre compte, certains basculent dans des comportements qui deviennent néfastes pour leur enfant.
A vous, parents de sportifs, j’aimerais donc apporter mon éclairage, sans donner de leçon, car on ne peut pas parler de normes en matière d’éducation et que je n’aime pas cliver le comportement en «bon» ou «mauvais», mais je vous propose plutôt des questionnements sur vos comportements et votre vécu de parent avec votre enfant sportif.
Quelles sont les motivations de votre enfant?
La première question à se poser est d’abord celle de la motivation de votre enfant. Pourquoi votre enfant a t-il envie de faire un sport? Pourquoi le pratique t-il en compétition? Quelles sont ses motivations réelles? C’est une chose essentielle à savoir car bon nombre d’enfants jouent souvent pour le plaisir de la pratique, prennent goût à un sport, à s’entraîner, à progresser aussi, et puis parfois le sport est simplement un prétexte pour passer de bons moments avec les copains. La socialisation est une des raisons principales qui pousse un enfant à continuer dans son sport. Il faut donc chercher à savoir si votre enfant joue pour son propre plaisir ou pour le vôtre et savoir comprendre (et entendre) que même si votre enfant est doué pour son sport, qu’il n’ait pas forcément envie de s’investir dans la compétition de haut niveau.
Quelles sont vos attentes?
Est-ce que la compétition est centrale dans votre famille?
Cette question est aussi cruciale à se poser, car parfois dans une fratrie, un seul enfant peut faire du sport de compétition et la famille entière se retrouve souvent impliquée dans le projet: les frères et soeurs aussi ont peut être d’autres intérêts, passions et peuvent se sentir négligés dans le projet sportif de leur frère/soeur qui fait un sport de compétition. Sans compter le temps passé par un parent avec l’enfant dans les déplacements, l’enfant sportif peut souvent porter le poids des attentes d’une famille entière et se sentir ainsi le centre de la famille. Quand il perd, et que le parent est de mauvaise humeur ensuite, cela a des répercussions sur toute la famille et peut être une source potentielle de déséquilibre au niveau familial. L’enfant se sent aussi uniquement perçu comme sportif, compétiteur aux yeux de ses parents. Ceci est particulièrement délicat, car il ne faut pas oublier que c’est avant tout un enfant et qu’il a aussi envie que l’on parle d’autres choses que de son sport (surtout quand il n’est pas en réussite). Une des choses qui est souvent frappantes est la première question que vous posez à votre enfant quand il vous appelle après une compétition: «Alors, Est-ce que tu as gagné?». Cette question induit implicitement pour lui que seul le résultat compte. En demandant par exemple «Comment cela s’est passé pour toi?», la démarche est différente, cela démontre que vous vous intéressez à lui, à comment il se sent plutôt que d’être centré sur le résultat.Enfin, par rapport à la famille, l’enfant ressent parfois aussi dans votre déception, le fait que vous investissiez beaucoup de temps et surtout de l’argent pour sa pratique. L’enfant ressent souvent les sacrifices que font ses parents d’une manière inconsciente et cela pèse également sur sa pratique.
Est-ce que vous vivez à travers la réussite de votre enfant?
Il y a parfois une tendance chez certains parents à vivre à travers le projet de leur enfant. Le parent a envie de rattraper son propre passé, car il n’a pas réussi lui même dans le sport ou qu’il rêve de gloire qui pourrait combler sa propre existence. Le bonheur du parent devient ainsi intimement lié à la réussite de l’enfant. Il est donc important de vous questionner sur votre investissement et si votre enfant vient ainsi combler un vide ou une projection de votre propre désir. L’enfant a sa propre histoire et ne doit pas être une substitution. Il est important de prendre du recul quant à votre implication dans le projet de votre enfant et qu’il sente que votre vie ne tourne pas uniquement autour de ses entraînements et de ses compétitions. Certains parents aussi rêvent de fortune que l’on peut retrouver chez des sportifs professionnels (tennis, football, golf principalement) tout en oubliant que seul quelques sportifs arrivent à vivre de manière luxueuse de leur sport. L’aspect financier ne doit pas être un objectif en soi car il sera de toute manière toujours une source de frustration, car l’apprentissage vers le très haut niveau peut prendre beaucoup de temps et est surtout basé sur de nombreuses incertitudes sur la réussite future. Votre enfant peut être très bon dans les catégories juniors mais ne jamais arriver à vivre son sport de manière professionnelle.
Qui est votre enfant?
Dans l’euphorie de la réussite sportive, le parent a tendance à oublier aussi le bien être de son enfant. Il pense aux entraînements, à l’organisation, aux compétitions, aux résultats mais oublie parfois de demander à l’enfant ce qu’il ressent, ses doutes, ses difficultés. Par exemple, la période de l’adolescence est déjà en soi un passage compliqué à vivre et le parent doit savoir accompagner son enfant dans son développement psychologique global. L’enfant qui ressent trop de pression aura tendance à se renfermer et à ne pas vouloir communiquer avec le parent par crainte de rejet ou de ne pas être à la hauteur des attentes. Connaître la psychologie de votre enfant peut être importante pour savoir comment réagir face à lui, face à ses déceptions et aussi être un soutien indéfectible quelque soit l’issue des résultats.
Est-ce que vous faites confiance à l’entraîneur?
Pour finir, le parent a une place à part dans l’univers du sportif. Il a même la première place. Mais dans le projet sportif, le parent doit aussi savoir laisser sa place aux autres et faire confiance notamment à l’entraîneur. Quand un parent vient assister à tous les entraînements de son enfant, il n’aide pas à développer cette relation de confiance avec l’entraîneur qui se sent scruté, jugé et désinvesti de sa mission. Savoir se mettre en retrait aussi bien dans les entraînements que dans les compétitions est souvent très bénéfique pour l’enfant et pour l’apprentissage de son autonomie, qui est primordiale pour son développement psychologique. Savoir privilégier une bonne communication avec l’entraîneur est toujours un atout dans la pratique compétitive de votre enfant. De plus l’entraîneur a l’expérience du sport et peut aussi être un soutien pour vous et une source d’information concernant la pratique sportive de votre enfant.
En conclusion, votre vision du projet sportif de votre enfant doit être au coeur de vos questionnements. Il faut apprendre à s’analyser, écouter aussi parfois ce que l’enfant n’exprime pas uniquement par les mots, savoir détecter quand votre investissement a des répercussions négatives dans le développement sportif. Le sport ne doit pas être central dans votre vie car il sera source de déséquilibre pour l’enfant. Enfin, l’enfant apprend de ses parents, interprète ses commentaires, et à mon sens, le parent doit déjà commencer à contrôler ses propres émotions, rester positif pour que le centre du projet soit accès sur le bien être de l’enfant et non pas les résultats uniquement.
Ce mois de Février, je vous propose un dossier spécial sur la psychologie des parents dans le sport, avec ce premier article qui tente d’aborder la question dans un réflexion de fond, puis paraîtra dans quelques jours un entretien avec un parent d’une nageuse qui a accepté de témoigner sur son expérience (A paraître le 17 Février). Enfin, j’ai interrogé un spécialiste de coaching qui travaille avec des parents dans le tennis (A paraître le 23 Février). Puis je vais proposer des séances de suivi psychologique spécifiques pour les parents de sportifs (A paraître le 27 Février). Vous pouvez me contacter sur ma page CONTACT pour faire part de votre intérêt et avoir plus de renseignements.