Il y avait, d'un côté, de la dentelle, du sur-mesure. Une fragilité aussi. La délicatesse française.
De l'autre côté, le tout-venant, le massif. La puissance. La bestialité indienne.
Une fusion ; mais pas vraiment. Un dépassement par le rapprochement, plutôt.
Finalement, un processus amoureux. Lady Arcelor et Mittal, l'homme des bois.
Elie Cohen, irréductible romantique, ne s'y était pas trompé. Il déclamait, dès juin 2006 :
"On peut estimer qu’il n’y a pas de problème d’emploi majeur dans la fusion Arcelor-Mittal en Europe, pour la raison simple suivante : les actifs des deux entreprises en Europe sont complémentaires, Arcelor étant très présent dans les aciers de spécialité, Mittal étant plutôt présent, mais faiblement, dans les aciers de commodité. Il n’y a donc pas de problème de redondance, donc il y a une faible probabilité de rationalisation en Europe." suite
Alain Lambert, fiévreux :
"Compte tenu de la demande mondiale d'acier non satisfaite, nos emplois ne sont pas menacés, et c'est bien l'essentiel ! Et si c'était un avertissement sans frais susceptible de réveiller ceux qui rêvent encore d'un monde qui n'est plus ? Ce serait alors salutaire." suite
L'amour, c'est regarder ensemble dans la même direction, disait Saint-Exupéry.
Cette passion devait finalement, les premiers émois éteints, s'en remettre à la raison. Rationaliser.
Gandrange. Après les langoureux effeuillages, les fermetures éclair.
"J'aime les usines, j'aime l'industrie et je crois en la sidérurgie.
Je ne lâcherai pas sur le sujet !" lança le Priape élyséen aux syndicats, mauvais coucheurs.
« Les déclarations de Nicolas Sarkozy à Gandrange, le 4 février, avaient pourtant suscité l’espoir. «Au plus haut niveau de l’Etat, on s’engage à ne pas vous laisser tomber», avait-il déclaré sous les applaudissements, quitte à «mettre de l’argent, s’il le faut, dans l’outil de production». Il l’avait promis : il reviendrait dans l’usine «annoncer la solution qu’on aura trouvée». Source Libération du 31/03/08
Ensuite, les volte-face d'une Christine Lagarde migraineuse, au bord de la démission ; elle condamne dans un premier temps l’ingérence du président dans une société privée puis accorde son discours à celui du chef de l’Etat : «La Ministre de l'Economie Christine Lagarde a affirmé dimanche que "l'objectif principal du gouvernement" pour l'avenir de l'usine Arcelor Mittal de Gandrange (Moselle) était de "sauvegarder les emplois" en évoquant des "partenaires privés extérieurs". Afp journal Internet.
De nouveaux partenaires, c'était l'idée. Hélas, le viagra présidentiel n'y fit rien ; c'était du dentifrice.
La suite est connue. Mittal découche. Les syndicats d’Arcelor Mittal ne se laissent pas embarquer par les promesses de Sarkozy englouties avec les régions perdues lors des dernières municipales.
Le pire reste à venir pour les futurs chômeurs d’Arcelor Mittal : La tolérance zéro sera appliquée pour ces futurs assistés, contrôles renforcés (radiations à gogo), le nouveau programme présidentiel des Assedics. Le chef de l'Etat annonce une loi pour sanctionner les chômeurs qui refusent deux offres d'emploi. Liberation.fr (avec source AFP) – 8/04/08
Dans un même temps, le dynamique Président lance une bouée en visant la tête.
Et l’amour dans tout ça ?
« Réinventer l’amour (point de Rimbaud). Rappelons que Théodore Zeldin affirme lui aussi que l’aventure du XXIe siècle, l’objet même de l’Histoire, sera le dialogue entre l’homme et la femme, dialogue aimant si possible, amical nécessairement… Or, l’amour est menacé de toutes parts : sur sa droite par les libertins ; sur sa gauche par les libéraux. Oui, l’amour n’est pas qu’un "contrat entre deux individus libres et égaux". Oui, rappelle Alain Badiou, "c’est ce qui commence au-delà du désir et de la demande". En somme, l’amour ou la nouvelle cause du peuple. »
Alain Badiou.
Sources
là
ou là
Agathe