Teddy Riner, champion olympique à Londres cet été, est de retour devant le public français. Le colosse de 2,04 m et 135 kg devrait éclabousser le Tournoi de Paris, ce week-end au Palais omnisports de Paris-Bercy, de toute sa puissance. Le judoka, âgé seulement de 23 ans et déjà quintuple champion du monde, domine son sport de la tête et des épaules. Une réussite qu’il doit évidemment à son travail acharné à l’entraînement mais aussi en partie à sa collaboration avec Meriem Salmi, psychologue à l’Institut national du sport, de l’expertise et de la performance (Insep).
UN ACCOMPAGNEMENT PSYCHOLOGIQUE RÉGULIER POUR TEDDY RINER
Depuis presque 9 ans, Teddy Riner bénéficie d’un accompagnement psychologique régulier, comme tous les sportifs de l’Insep qui doivent faire au moins un bilan annuel pour les majeurs et deux fois par an pour les mineurs. Ensuite, les athlètes peuvent consulter toute l’année en fonction de leurs besoins ou parfois encouragés par leur environnement sportif au sens large. « Je note une nette évolution dans la reconnaissance de l’apport de la psychologie pour les sportifs, explique Meriem Salmi, à l’Insep depuis quatorze ans. Ce n’est plus une activité liée à une quelconque folie, il y a beaucoup moins de confusion. Elle est mieux acceptée dans le monde des champions où évoquer des fragilités n’était pas vraiment à l’ordre du jour. »
Progressivement, les athlètes de haut niveau ont mieux mesuré l’importance de cet aspect dans l’optimisation de leur performance. Ils ont appréhendé ce que l’aide psychologique pourrait leur apporter pour vivre leur carrière de champion et atteindre leurs objectifs. Car dans l’univers de l’élite sportive, ils connaissent des rythmes très exigeants, avec des entraînements quotidiens, de nombreuses compétitions de plus en plus médiatisées, des déplacements très fréquents dans le monde entier et une nécessité d’être toujours performant.
Le propre de la psychologie du sport est de permettre à l’athlète d’apprendre à réguler ses émotions et lui permettre d’atteindre un équilibre. Il existe ainsi toute une série de domaines où le sportif peut trouver une aide précieuse dans un accompagnement par un psychologue. « La problématique la plus fréquente est la gestion du stress, notamment avant une grande compétition, explique Julien Bois, enseignant chercheur à l’université de Pau et secrétaire général de la Société française des psychologues du sport. Si le stress est tout à fait nécessaire comme mobilisateur d’énergie, toute la question est de le moduler. Il existe des méthodes de relaxation respiratoire ou d’imagerie mentale pour apprendre à retrouver des sensations en se remémorant des situations où l’athlète a été performant. »
SOUTIEN SALUTAIRE EN CAS D’ÉCHEC
La psychologie peut s’avérer un soutien salutaire en cas de perte de confiance d’un athlète après une série de contre-performance, en cas de perte de motivation ou encore pour gérer la notoriété parfois soudaine. « Il faut aider le sportif à se comprendre, explique Hubert Ripoll, psychologue du sport et auteur d’ouvrage sur la préparation mentale (1). Il convient de savoir à qui on s’adresse, de saisir pourquoi il fait de tels sacrifices pour réussir. On peut ainsi distinguer deux grands moteurs chez les athlètes : la satisfaction de l’ego et le plaisir de s’améliorer. » L’aide psychologique est également privilégié après des échecs, notamment dans des compétitions qui peuvent changer une vie comme les Jeux olympiques.
Ces spécialistes de la psychologie, au contact des athlètes de haut niveau, peuvent ainsi dresser un portrait de ces derniers et tenter de définir ce qui fait qu’ils sont ou deviennent des champions. Hubert Ripoll résume cela en une formule : « la capacité d’endurer pour durer ».
« Les champions sont pourvus d’une intelligence d’exception, ajoute Meriem Salmi. Plusieurs formes d’intelligence s’articulent – émotionnelle, psychomotrice – pour leur permettre notamment l’apprentissage et l’exécution de mouvements extrêmement complexes produisant ainsi une expertise de très haut niveau. Il s’agit de personnes hors norme principalement dans leur capacité d’adaptation aux événements. »
(1) Le Mental des coachs, manager la réussite sportive, Ed. Payot, 2012.
ARNAUD BEVILACQUA