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[anthologie permanente] Roberto Juarroz

Par Florence Trocmé

Les éditions Corti ont récemment publié dixième poésie verticale, de Roberto Juarroz, dans une traduction de François-Michel Durazzo (édition bilingue). 
Calquer l’infini 
sur la vitre de la fenêtre, 
comme on calque une branche ou une plume, 
avec le papier de soie de notre fugacité. 
Calquer ensuite une branche ou une plume 
sur cette même vitre, 
comme on calque l’infini, 
avec le papier de soie de nos yeux grands ouverts. 
superposer ensuite les deux calques 
jusqu’à ce que tous deux coïncident parfaitement. 
Si nous continuions à calquer,  
sur la même vitre, de nos yeux grands ouverts, 
peut-être tout coïnciderait-il avec tout,  
la pleine lune et la décroissante,  
la page blanche et l’écrit,  
le fugace et l’éternel 
Calcar el infinito 
contra el cristal de la ventana, 
como se calca una rama o una pluma, 
con el papel de seda de nuestra fugacidad. 
  
Calcar después una rama o una pluma 
contra el mismo cristal, 
como se calca el infinito, 
con el papel de seda de nuestros ojos más abiertos. 
  
Superponer luego los dos calcos 
hasta que ambos coincidan totalmente. 
  
Si siguiéramos calcando, 
sobre el mismo cristal y con los ojos más abiertos, 
tal vez todo coincidiera con todo, 
la luna llena y la menguante, 
el papel en blanco y el escrito, 
lo fugaz y lo eterno. 
 
• 
Les noms ne désignent pas les choses : 
ils les enveloppent, ils les étouffent. 
Mais les choses brisent 
leurs enveloppes de mots 
et de nouveau sont là, nues, 
en attendant un peu plus que les noms.  
Seule peut les dire 
leur propre voix de chose, 
la voix que nous ne savons ni elles ni nous, 
dans cette neutralité qui parle à peine,  
cet énorme mutisme où se brisent les vagues 
Los nombres no designan a las cosas:
las envuelven, las sofocan.
Pero las cosas rompen
sus envolturas de palabras
y vuelven a estar ahí, desnudas,
esperando algo más que los nombres.
Sólo puede decirlas
su propia voz de cosa,
la voz que ni ellas ni nosotros sabemos,
en esta neutralidad que apenas habla,
este mutismo enorme donde rompen las olas. 
 
Roberto Juarroz, dixième poésie verticale, traduction (de l’espagnol, Argentine) de François-Michel Durazzo (édition bilingue), Éditions Corti, 2012, pp. 56/57 et 168/169. Sur le site de l'éditeur. 
Roberto Juarroz dans Poezibao :  
bio-bibliographie, extrait 1, notes poésie 1, notes poésie 2, ext 2, ext. 3 (Ed. Unes) 


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