Ce type de réflexion n’exclut cependant pas que la relation avec la mère, le père, la famille, influe durablement sur le développementou non de la psychose. Mélanie Klein, parmi les premières à avoir psychanalysé des enfants[2], explique combien dès sa naissance le nourrisson connaît l’angoisse de la séparation d’avec sa mère. Au gré des allers et venues de sa mère le bébé expérimente la présence et l’absence, comme autant de fusions et séparations. Toujours selon Klein, le bébé connaît une primitive tendance de mort vis à vis de sa mère lorsqu’il est confronté à la frustration, à l’attente déçue. Les différentes étapes de son développement forment justement un «processus qui implique pour le sujet un dépassement de sa primitive tendance de mort ».
Une socialisation harmonieuse de l’enfant avec son entourage, témoigne du dépassement de cette tendance de mort vis à vis d’autrui. A l’inverse, l’échec à ce niveau est un germe pour le développement de difficultés psychotiques (difficultés qui prennent leur source pour la plupart avant 7 mois, toujours selon Mélanie Klein).Chez Frances Tustin[3] qui a travaillé sur l’autisme infantile, la conscience de la séparation d’avec la mère n’est pas suffisamment expérimentée chez ces enfants. Ce qui signifie que la mère n’a pas été assez présente pour que l’enfant prenne la mesure de ce que lui et elle, forment deux entités distinctes. Au point que lorsque la mère s’éloigne, l’enfant vit la séparation comme un traumatisme : c’est comme si on lui enlevait une part de lui-même : « La psychose infantile est un état dans lequel l’enfant est totalement coupé de la réalité vécue par les autres enfants du même âge. D’après cette définition on peut énoncer que l’autisme infantile correspond à un état psychotique. »Face à ces enfants, il revient au thérapeute d’interroger les symptômes par lesquels l’enfant exprime sa psychose. Les symptômes sont en effet une expression détournée des conflits qui se déroulent au niveau inconscient, pour l’individu. Porter ces conflits à la conscience du sujet et de sa famille permet dans la plupart des cas de libérer l’enfant de la nécessité du symptôme.Comme le dit Maud Mannoni :« Le symptôme, comme nous le montre Freud, inclut toujours le sujet et l’autre. Il s’agit d’une situation dans laquelle le malade cherche à faire entendre, par le détour d’un fantasme de castration, la manière dont il se situe face au désir de l’autre. […] Le médecin a pour tâche de faire rebondir l’interrogation que le sujet formule à son insu, mais pour cela il lui faut être capable de porter son écoute ailleurs qu’à l’endroit où la crise surgit. »[4][1] BETTELHEIM B., La forteresse vide, Paris, Gallimard, 1974[2] MILLAR S., La psychologie du jeu chez les enfants et les animaux, Payot, 2002, 365 p.[3] TUSTIN F., Les états autistiques chez l’enfant, Seuil, 1986, 437 p.[4] MANNONI M., L’enfant, sa « maladie » et les autres, Seuil, 1974, 250 p.