Certains commentateurs politiques et économiques estiment que notre monde est tendanciellement multipolaire au plan économique, après avoir traversé la crise née fin 2006 avec une structure géopolitique unipolaire. Ce me semble là une affirmation hasardeuse.
En effet, d’une part la Chine, escortée dans son expansion par un cortège de pays asiatiques émergents, prend toute sa place de pôle économique principal de la planète, sinon du point de vue de son PIB par habitant, du moins de celui de son rythme d’expansion maintenu au-dessus de 7% malgré la crise, et d’autre part, compte tenu de la situation géopolitique affaiblie des États-Unis par les guerres, quelque soit par ailleurs la puissance de son équipement militaire, son ancien rôle de donneur de leçons politiques s’efface de jour en jour, paralysé par la perte évidente de sa propre unité intérieure. Celle-ci vient d’être durement soulignée par le résultat de ses élections présidentielles qui a débouché sur une situation fiscale et financière parfaitement conflictuelle dès janvier 2013, les républicains n’ayant octroyé à Obama qu’un sursis de trois mois pour un nouveau plafond de dettes extérieures, sous condition de la mise en application d’un plan de réduction des dépenses budgétaires à venir.
Voilà pour « une structure géopolitique unipolaire ».
Par ailleurs, en ce qui concerne un monde « tendanciellement multipolaire au plan économique », cette opinion ne peut être validée que si l’on admet que : « la globalisation façonne le monde », selon l’affirmation mutuelle des mêmes commentateurs. Sans doute est-ce actuellement le cas, même si façonner le monde n’est pas nécessairement en faire un chef-d’œuvre économique. Mais sommes-nous si certains que cette situation se pérennisera ? De nombreux faits sociaux préoccupants dans le monde, précisément conséquences des ratées de la globalisation, montrent que les peuples paient sévèrement par un chômage croissant et la perte de leur pouvoir d’achat l’absolutisme des théories assez fumeuses du néolibéralisme. Les classes souffrantes ne semblent guère disposées à supporter encore longtemps le pouvoir de classes politiques dont les insuccès ininterrompus sentent l’incompétence et l’insignifiance.
Pour le moment, les théoriciens de la nouvelle donne économique soutiennent que la crise n’est qu’un accident passager d’une ère de croissance inévitable, mais sa durée se prolongeant au-delà de celle de la crise de 1929-1933, cette affirmation prend de plus l’allure d’une désagréable prévision météorologique.
Constater cette ambiance sulfureuse ne permet sans doute pas de prévoir la suite des évènements, mais elle met sérieusement en doute la pérennisation d’une globalisation économique multipolaire. On pourrait, tout au contraire supposer que la violence de plus en plus forte des réactions populaires pourrait mettre brutalement fin aux expériences idéologiques néolibérales, à partir de l’éviction des classes politiques responsables des crises actuelles. Ça sent son 1789 !
À certains égards, le mouvement néolibéral peut se comparer à l’histoire du marxisme-léninisme, en remplaçant l’expression « dictature du prolétariat » par celle de « dictature de la finance ». Les illusions de l’une renvoyant directement à celles de l’autre. Or, l’histoire a montré à de nombreuses reprises qu’elle punit toujours sévèrement les illusions.
Laissons à présent la globalisation pour revenir au déclin des États-Unis.
Si la prévision d’une multipolarisation de la planète manque de soutien, c’est en effet parce que la situation des États-Unis tant économique que politique et sociale continue de péricliter, en dépit du fait que leur gouvernement ait déclaré au second trimestre 2009 que la crise était terminée. Empressement démentie depuis ! S’il est en effet possible que la croissance américaine donne actuellement l’impression de pouvoir repartir bientôt, ce sera manifestement sans reprise de l’emploi, car cette croissance se fait avec une utilisation croissante de robots, et l’opinion selon laquelle les chômeurs actuels ne retrouveront jamais plus de travail apparait de plus en plus partagée par les économistes, car le travail disparaît, comme l’avait prédit Rifkin dans son livre de 1998 (La fin du travail). Les entreprises américaines doivent en effet continuer de réduire leurs effectifs s’ils veulent pouvoir concurrencer les usines du monde que sont devenus les pays émergents. Mais les médias cachent encore cette réalité, qui éclatera vraisemblablement aux yeux du monde dans le courant de 2013.
La perte de l’hégémonie du dollar est déjà un fait, même si le gouvernement des É-U la dissimule sous des manipulations financières et statistiques rusées (l’assouplissement quantitatif par exemple); mais finasser n’est pas financer. Le fait que la FED crée sans cesse de la monnaie pour boucher les trous du budget de l’État américain (40 milliards par mois depuis juillet 2012, portés à 85 Mds depuis trois mois, sans arrêt programmé, après de nombreux milliards au cours des années précédentes par la grâce des QE1 [1700 Mds] et QE2 [1000 Mds]).
Or cette fabrication exponentielle de fausse monnaie ne déclenche toujours pas l’inflation tsunamique que la théorie économique prévoit en de telles circonstances. Elle ne peut donc être interprétée que d’une seule manière : la situation financière des É-U est tout simplement pire que ce que l’on nous en montre. Les prix intérieurs ne peuvent guère bouger, car les revenus des citoyens américains ne pourraient y faire face, ceux-ci limitant leur consommation, préférant diminuer leurs dettes plutôt que de les augmenter.
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Ce qui tient encore le dollar debout, ce n’est plus sa valeur ni sa puissance, qui chancèlent, mais son mythe, c’est-à-dire l’idée d’excellence que les opinions publiques s’en font encore. Mais des mouvements souterrains minent cependant rapidement la monnaie américaine.
En premier lieu, les banques centrales du monde ne croient plus au dollar et rêve d’une nouvelle monnaie internationale plus solide. Elles ne peuvent cependant le clamer ouvertement, sous peine de ruiner instantanément leur propre économie. Par contre, elles troquent progressivement leurs réserves en dollars contre d’autres monnaies, livres, euros, francs suisses, yen. Lentement, pour que cela ne se voie pas trop. D’autant que les autres monnaies ne sont guère plus brillantes. Voilà d’ailleurs pourquoi l’euro se maintient en dépit des avanies dont il est l’objet. Au royaume des aveugles, les borgnes sont rois…
En second lieu, un calcul réalisé récemment par Dow Jones, publié par le WSJ (Wall Street Journal), montrait que la part des réserves de la Chine libellée en dollars serait passée de 74 % en 2006, à 54 % en juin 2011, bien que le total de celles-ci ait encore augmenté depuis 2006. Une diminution de 27 % qui confirme mes propos et mon jugement. C’est impressionnant ! Les Chinois jouent vraiment finement, et les Américains font tout ce qu’ils peuvent pour dissimuler cette détérioration de leur situation financière.
Mais les Chinois ne se contentent pas de ce résultat-là. Plusieurs autres faits le montrent :
-« Le 26 décembre 2011, à Tokyo, la Chine et le Japon ont signé un accord visant à encourager l’utilisation dans leurs échanges commerciaux de leurs propres monnaies, le yuan et le yen… à la place du dollar… Quand on connait les relations et les tensions ancestrales entre les deux pays, le fait que le Japon décide de signer un tel accord avec la Chine en dit long sur l’évolution des rapports de force dans cette région du monde. » (RAMSÈS 2013, p. 62)
(Notons au passage que le même type d’accord a été signé il y a quelques années entre le Brésil et l’Argentine, et que l’on parle d’une généralisation du procédé à l’ensemble des pays du Mercosur. Ceci montre une tendance monétaire de fond qui pourrait toucher les pays de l’ASEAN, sous l’influence de la Chine, et qui tendrait à marginaliser peu à peu la monnaie américaine.)
Ensuite, nous savons que la Chine achète des matières premières en Afrique, lui finançant et lui construisant des infrastructures pour faciliter ses exportations vers l’Asie. Il faut savoir que les dollars de ses réserves de 3200 milliards servent précisément à payer ses investissements en Afrique, ce qui lui permet d’alléger le risque que présente pour elle ses réserves en dollars, compte tenu de ses fortes exportations vers les É-U. Celles-ci faiblissent d’ailleurs peu à peu au profit du marché intérieur chinois qui progresse rapidement. L’objectif du gouvernement chinois est de faire de sa propre monnaie celle du monde. Mais avant cela, il lui faut dépenser ses réserves en dollars pour éviter de perdre des sommes très importantes au moment où le dollar s’effondrera nécessairement, probablement au cours des deux années qui viennent.
Pour la Chine, une façon de faire baisser ses réserves en dollars consiste en effet à investir à l’étranger, précisément en dollars. Pour les dix premiers mois de 2012, ses IDE (investissements directs à l’étranger) ont augmenté de 25,8 % atteignant la somme de 58,17 milliards de dollars, dont 42,6 % destinés à Hong Kong (laquelle, en réinvestissant une forte partie de cette somme à l’extérieur de la Chine, masque ainsi aux yeux du monde la baisse des réserves en dollars de la Banque de Chine). Beijing tente en effet d’exposer le moins possible sa stratégie dollar aux yeux de Washington (une recommandation bien connue de Sun Tse, le grand stratège chinois vivant au VIe siècle av. J.-C.).
La Chine a d’ailleurs sagement agi aussi à deux niveaux dans ses échanges avec les É-U. Elle a d’abord limité les échéances de ses achats de bons du Trésor du gouvernement américain, qui sont à présent à très court terme, alors qu’il y a encore deux ans elle n’hésitait pas à investir en bons du Trésor du gouvernement américain à long terme. Depuis elle en a également réduit fortement le volume. Il est tout à fait évident que devant l’augmentation ininterrompue des différentes dettes américaines, et des liquidités émises mensuellement par la FED au profit du gouvernement et des banques, la Chine va continuer à réduire son exposition au dollar au profit de son marché intérieur, et vise à terme un taux d’exportation de 6 %, contre 8 à 9 % en 2011. Ses échanges commerciaux avec les É-U se contractent donc lentement, laissant supposer une diminution volontaire de ses exportations aux É-U. Mais, contrairement aux interprétations que font les économistes de cette évolution, il ne s’agit pas là d’une rétroaction volontaire de la part du gouvernement américain pour réduire son déficit commercial extérieur, qui peine à se stabiliser. En fait, le gouvernement chinois n’a plus autant besoin qu’auparavant de se financer par ses exportations vers l’Amérique. Il les a déjà partiellement remplacées depuis le début de la crise, par des échanges en hausse avec l’Asie du Sud et de l’Est, notamment avec le Japon, et surtout par son propre marché intérieur, la croissance des revenus de sa population ayant augmenté de 10 % par an au cours de chacune des trois dernières années (portée à 14 % en 2012).
Un troisième point, centré sur la monnaie chinoise elle-même terminera ce tour d’horizon sur la Chine et son positionnement économique en face des États-Unis .
Le yuan fait l’objet d’un questionnement incessant. Les Occidentaux peinent à discerner les intentions réelles de la Chine au cours de son évolution. La raison en est pourtant assez simple. Peu d’Occidentaux, surtout les politiciens et les économistes, font de réels efforts pour comprendre la pensée chinoise et donc la façon dont ce peuple pense, réfléchit et agit, mais y parviennent difficilement. Par ailleurs, les médias occidentaux sont généralement mal intentionnés à l’égard de la Chine et interprètent toujours négativement les informations venant de cette nation continent, sans que cela perturbe son train de sénateur. Dans ces conditions, l’Occident continuera à prévoir mille ennuis entravant l’évolution de la Chine, ennuis qui n’auront que peu de chances de se concrétiser, au grand étonnement de tous. Cela fait trente ans que ce petit jeu se poursuit. En vain !
Revenons au yuan…
On prétend souvent que le yuan est sous-évalué et l’on s’en indigne vertueusement, mais personne ne l’a jamais démontré par un calcul rationnel digne d’être retenu par l’OMC, laquelle, pour le moment, ne prend pas position, précisément faute d’argument parce qu’il n’en existe pas. D’ailleurs, il faudrait déjà définir ce que l’on entend par monnaie sous-évaluée. Or, ce concept ne possède pas de définition théorique fiable. Par contre, il est plus facile de démontrer que le yuan n’est pas sous-évalué, et cette fois d’une manière fort simple, sans rechercher de formules compliquées. Par l’absurde !
En effet, si le yuan était objectivement sous-évalué, ce serait nécessairement parce que la Chine vendrait globalement les produits qu’elle exporte en dessous de leur prix de revient. Dans ce cas-là, comment expliquer que le pays ait pu en tirer un excédent financier de trois mille milliards de dollars en vingt ans, avec une monnaie sous-évaluée ? CQFD !
Un dernier point sur la monnaie suffira pour contredire le raisonnement des économistes et politiciens américains, qui conteste la fin de l’hégémonie américaine, ainsi que la possibilité d’une multi polarisation de la planète. Mon propre diagnostic va plutôt vers une absence nette de polarisation planétaire, car si la Chine devait rester seule super puissance mondiale, son passé historique, depuis les guerres des Royaumes combattants, comme l’histoire de sa pensée, montre en elle une nation indépendante, fière, se sentant peu concernée par les autres peuples du monde, et absolument pas intéressée par la domination de ce dernier. En revanche, elle acceptera difficilement qu’une agitation trop grande autour d’elle ne contrarie son destin.
La dernière phase du déclin des États-Unis sera donc marquée par l’abandon général du dollar comme monnaie mondiale. Quelques-uns des faits qui viennent d’être énoncés ont montré que nous sommes nettement sur cette voie-là.
Car le point final devrait être le couronnement du renminbi (ou yuan). Nous en sommes fort près. La Chine prépare cette opération avec la même minutie qu’elle avait apportée dans la mise au point des Jeux olympiques de Beijing en 2008, et avec une prudence remarquable; nous sommes dans un jeu de GO. Il est fort vraisemblable que la Chine n’en fera pas la même utilisation prédatrice et hégémonique qu’en avaient faite les États-Unis. Il nous faudra suivre de très près cette opération, car à n’en pas douter, le lancement international de la devise chinoise marquera un virage très important dans l’évolution économique mondiale.
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Pour être en conformité avec les doctrines économiques contemporaines, et pour que le yuan remplace le dollar dans les fonctions mondiales qu’il ne remplit encore que partiellement, il semble que le yuan devrait devenir pleinement convertible dans toutes les autres monnaies importantes du monde. Il n’est d’ailleurs pas certain que cette obligation soit nécessaire, car si le dollar s’effondre, les banques centrales du monde seront bien obligées de passer par le yuan, convertible ou non, car ce n’est là qu’une illusion de plus des économistes. C’est cependant ce qui pourrait se passer très bientôt entre 2013 et 2014, car plusieurs évènements ont annoncé sans équivoque l’arrivée de l’ultime encerclement du jeu de GO monétaire en cours :
1 - À Qinhai, zone de 18 km2 en lisière de Shenzen et de la frontière de Hong Kong, est en train de s’aménager une zone pilote où sera testée la convertibilité du yuan. Il est prévu que cette cité soit transformée en centre financier d’ici 2020.
Cette initiative nous rappelle que c’est à Shenzen que les réformes conçues et appliquées par Deng Xiao Ping ont démarré, et qu’ont été créées dès 1979 dans les provinces du Guangdong et du Fujian dans le sud de la Chine les quatre premières zones économiques spéciales chinoises ouvertes sur le monde, pour attirer les investisseurs étrangers.
Cette place financière disposera au départ de 45 milliards de dollars de capitaux en dépôt, afin de créer un flux d’investissements entre Shenzen et Hong Kong, et d’animer une coopération financière active entre les deux villes.
2 - À partir de 2008, la banque centrale de Chine a commencé à signer des accords de swaps avec d’autres pays, notamment avec les membres de l’ASEAN dont elle fait partie, de manière à court-circuiter les paiements en dollars effectués par les banques américaines.
Simultanément, les clients de plusieurs grandes banques chinoises ont pu effectuer des transactions aux É-U en yuans.
3 - De son côté, Hong Kong a commencé à jouer un rôle de laboratoire boursier, en libellant progressivement les actions cotées à sa bourse en renminbi (autre nom du yuan). À la fin mars 2012, le montant des dépôts bancaires exprimés en yuan s’élevait déjà à 552 milliards de yuans (70 milliards d’euros). On s’attend à ce qu’il triple d’ici 2015. Le plan chinois d’installation du yuan au niveau mondial se met rapidement en place, et on sent très bien qu’il fait l’objet des plus grands soins, car il est en train de s’exécuter avec une précision rigoureuse et un tempo parfaitement respecté.
4 - La création d’une coentreprise entre la bourse de Hong Kong avec celles de Shanghaï et de Shenzen a été annoncée fin juin 2012, pour renforcer l’intégration économique régionale. Cet ensemble boursier devrait devenir la première place financière du monde, déplaçant d’un seul coup le centre de gravité financier de la planète de 10 000 km vers l’ouest.
On commence à envisager qu’au terme de cet ensemble d’opérations, le dollar de Hong Kong sera purement et simplement remplacé par le yuan.
Il s’agissait de créer au sein de la City un centre offshore pour le renminbi. Les deux responsables vont maintenant mettre en place tous les outils et procédures nécessaires pour que ce centre puisse commencer ses opérations d’ici quelques mois. Je ne suis pas certain que Ben Bernanke, le patron de la FED, apprécie beaucoup cette initiative. Pour que Londres ait décidé de faire ce pari, évidemment nuisible à la politique de Washington en matière monétaire, il fallait nécessairement que le 10 Downing street, ait été vraiment tout à fait persuadé de la chute prochaine du dollar. La City a donc pris sagement les devants.
Mais dans la situation actuelle de la monnaie américaine, son risque était pratiquement nul, car il est tout à fait vraisemblable que le renminbi va maintenant s’imposer peu à peu sur l’ensemble de la planète, tant pour la plupart des opérations monétaires que pour les opérations financières. Si les Anglais n’en avaient pas été eux-mêmes persuadés, ils n’auraient sans doute pas proposé eux-mêmes cette opération aux Chinois, car l’installation du renminbi à Londres n’est pas plus favorable à la livre sterling qu’elle ne le sera pour le dollar. Quand on connait le poids financier et monétaire considérable que la City londonienne représente dans l’économie mondiale, on comprend aussi très vite que cette opération correspond à un tsunami dans la sphère économique mondiale.
Jusqu’ici, c’était le gouvernement chinois qui freinait l’échange du renminbi. Il n’était pas prêt. En 2009, aucune transaction extérieure ne se traitait encore en yuan. En 2011, 10 % des échanges de la Chine furent payés en renminbi, et depuis 2010 les autorités chinoises relâchent peu à peu les contraintes qu’elles maintenaient sur les paiements en yuan à l’extérieur de leur territoire. Plusieurs multinationales étrangères ont même émis de la dette en yuan à partir de Hong Kong cette année. Avec les projets que je viens d’énumérer, il semble évident que les volumes traités augmenteront rapidement, c’est pourquoi je ne crois pas du tout à une résistance du dollar. Il va mourir de sa belle mort dans les deux ans qui viennent. On peut avancer cette prévision sans trop courir de risque que l’avenir en démente la réalisation, car il s’agit de faits dont l’objectif stratégique est tout à fait évident. Mais, plus important encore, la perte de l’hégémonie monétaire et financière qui s’ensuivra pour les É-U entravera tous leurs efforts pour retomber sur leurs pieds. Pour eux, l’avenir sera donc vraisemblablement cerné de nuages noirs.
Cependant, le gouvernement britannique aurait tort de croire que l’opération en cours sauvera la livre sterling, car 50 % de ses exportations se font sur le continent européen et l’euro est fort loin d’être mort. Il serait donc surprenant que l’Europe passe par le Royaume-Uni pour ses transactions commerciales. Je pense plutôt que, la Grande-Bretagne faisant partie de l’aire financière américaine, la Chine atteindra simultanément les deux monnaies en éloignant Londres du dollar; c’est une stratégie de billard à trois bandes, fort bien pensé de la part des Chinois. Et de la part des Anglais, c’est un essai désespéré pour se désenclaver. Dans les faits, le Royaume uni va devenir une obligée de la Chine, comme les États-Unis le sont déjà sur plusieurs plans, et devra probablement se rapprocher de l’Europe, en dépit de son aversion pour elle.
Avec la Chine, nous nous trouvons spectateurs d’un jeu de chat avec deux souris, et c’est elle, la Chine, qui joue le rôle du chat.
En conclusion, je crois bien que la longue énumération de tous ces éléments d’information sur les actions stratégiques des principaux partenaires de la configuration financière planétaire était indispensable, pour bien démontrer le fait que nous marchons bien actuellement vers un unique pôle stratégique mondial en la personne de la Chine, lequel pôle va apparaitre de plus en plus apparent en s’approchant de la fin de la décennie, dans le cadre global d’une descente aux enfers du monde occidental, et plus particulièrement du monde anglo-saxon.
Je conviens que cet exposé était un peu long, mais étant donné le nombre élevé des paramètres de la stratégie monétaire de la Chine pour parvenir à ses fins, on conviendra sans doute qu’il était nécessaire d’en faire un inventaire suffisamment complet, pour établir nettement que dans ce conflit particulier, ce sont les États-Unis qui jouent le rôle de la souris, à moins que ceux-ci n’en aient eux-mêmes découvert le fil conducteur. Mais cela m’étonnerait. Dans cette analyse, je ne devais ignorer aucun détail, car chacun d’eux joue un rôle actif.
André SERRA
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Cet article répond aux règles de la nouvelle orthographe