Gant de chirurgien,ou bien de crin;souffle dans celui du premier,c'est marrant,le latex gonfle,pis de vache,à cinq doigts,doigté pour une césarienne,tu ne mets pas de gant,quand tu t'en prends aux brigands.Cave à vin,ou à cigares,température contrôlée,hygiène chirurgicale,ça te va comme un gant.Sur l'armoire,des échantillons d'embryons,dans des bocaux formolés.Froid dans le dos,car une tête de gnou,oeil de verre,te fixe obstinément dans cet univers médical.On t'offre un verre de vin de palme pour te calmer,te rassurer des bonnes intentions du maître de maison.C'est un collectionneur,de trophées,de poupées,de timbres oblitérés;certes il est un peu timbré,mais pas dangereux ,du moins il ne l'est plus.La secrétaire te fais patienter,comme elle peut,te retient,te tient par les couilles,car elle sent,ta peur au ventre,ton envie de partir,illico-presto.Mais elle ne peut pas faillir à sa tâche,sinon elle risque sa place;te propose un Cohiba,ou une pipe;tu choisi les deux,un pour la bouche,une pour papa.Tu es soucieux ,malgré ta sucette céleste,tes mains tremblent un peu,tu ne peux t'empêcher d'avoir un rictus,le sexe en érection,sur un sofa freudien.Des trainées de poudre blanche, douteuses,sont également assises,sur le canapé.En face de toi,un drôle d'énergumène t'observe,silencieux depuis ton arrivée et tout d'un coup tu as des doutes;est-ce le docteur,tu regardes ses mains;pour voir si elles ne sont pas vêtues de latex;est-ce le jardinier,le cuisinier,le mari jaloux de la secrétaire?Un agent double,triple?Tu te dis,intérieurement:je divague,je m'imagine le pire,suis-je dans un film?Ta chemisette est trempée,tu pries Louisette en silence;tu te vois déjà dans un bocal,ou sur le mur,à côté du gnou.Tu finis par faire les cent pas,dans un chemin dit;des pas perdus.Pour te calmer un peu ,une soubrette,t'offre du pain perdu au sirop d'érable,un râble de lièvre et son confit d'oignons.Tu oublies le pourquoi,le temps de ce festin,et pour que tu te tiennes tranquille,tu as même droit à un digestif.Tu ne sais plus trop pourquoi tu es là;les minutes s'écoulent sur toi,les heures passent devant toi,tu as perdu le fil du temps.Tu es enfin détendu,un peu perdu;tu es à point,un peu saignant, pour la consultation.Le vétérinaire arrive enfin,tu aboies de joie,lèves la patte,et pisses sur le tapis persan,sous les applaudissements des autres patients.Tu suis de près le guérisseur,qui t'introduit dans son cabinet;somptueux,grand comme une piscine olympique,où siège une chasse d'eau volumineuse et bruyante,assistante du toubib.Te voilà rassuré par la beauté,le faste de cette mise en scène grandiloquente.Ce sage te fait assoir dans un boudoir,sur un fauteuil de marcassin,tu te déchausses,poses tes mocassins(Cardin?);la cérémonie n'est pas finie,il enfile ses gants,non pas en latex comme tu l'imaginais,mais en chevreuil,et commence par te palper.Il t'osculte de part en part,comme un quatre quarts,te tâtes,t'insère toute sortes d'objets stérilisés dans tous tes orifices.Tu serres les fesses,mais il te rassure,il a déjà déjeuné,il a pris soin de sniffer les trainés de poudre blanche du canapé.Il te fait toutes sortes de prises de sang,de prises de judo,c'est le grand jeu! Il te psychanalyse,te promet des jours meilleurs,en attente des résultats définitifs.Tu pars de là le coeur allègre,,délester de trois mille heureux euros;rendez-vous dans trois mois,une ordonnance dans la poche,digne d'un roman,et tu cours chez la pharmacienne,heureux comme un survivant en sursis,sans soucis.Tu repenses à tes appréhensions de débutant,au mythe des gants en latex,et te marre un bon coup!