In memoriam

Publié le 09 février 2013 par Feuilly

Toujours, il y aura des personnes pour crier la vérité.

Pas beaucoup, mais il y en aura.

Il y en aura au moins un.

Alors, comme souvent, le croyant seul, d’autres viendront pour le faire taire.

D’où sortent-ils ?

Nul ne le sait, on ne les avait jamais vus, ni ici ni ailleurs.

Peut-être, après tout, étaient-ils bien cachés ?

Mais aujourd’hui, ils sont là, loups hurlant avec la meute, trottant en bande dans nos avenues, piétinant nos rêves.

Et voilà que quatre coups de feu ont retenti, quatre coups de feu qui marquent la fin d’un monde.

Un homme s‘écroule devant chez lui, assassiné au nom d’un livre sacré.

L’ont-ils bien lu, ce livre, ceux qui viennent de tirer, tuant du même coup la liberté, la justice et la vérité ?

Un grand silence s’est fait dans toute la ville, un silence terrible, plus profond que celui du désert.

Les loups s’en donnent à cœur joie. Ils sont maîtres des avenues, ils sont maîtres de nos rêves.

Déjà, ils gravissent les marches du Palais, où leurs pattes laissent des empreintes de sang.

Mais voilà qu’un homme sort de sa maison, puis un autre et encore un autre.

On entend le claquement sec des portes qui se referment derrière eux.

Ils marchent au milieu de l’avenue, ensemble, bientôt rejoints par d’autres encore.

Ils sont maintenant des dizaines, des centaines, des milliers.

Dans leurs yeux, il y a toute l’étendue du désert, toute sa beauté et son grand silence.

Dans leurs yeux il y a l’image de ces arbres qui poussent au milieu des sables et qui ne meurent jamais.

Ils marchent au milieu de l’avenue, ils ne disent rien.

Ils marchent.

Ces lignes sont dédiées à Chokri Belaïd, assassiné cette semaine en Tunisie pour ses idées de gauche.